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⚢ Fictions lesbiennes ⚥
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Nouveauté :
  FTF, STF ou TTF ? MPLC ! (One-shot bonus Le Bunker) de Claire_em

Projets en cours :
  ❂ Errance en co-écriture avec Claire_em (20% - 90 pages).
  ❂
εξέγερση - L’Insurrection des Arcans (Troisième et dernière partie).

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⚢ Fictions lesbiennes ⚥

Claire-em

8 avril 2015

Chapitre 7 : Retour au Bercail en Famille

– Tu as retrouvé ton frère, Mathis et sa maman sont enfin réunis, la fête bat son plein, et toi, tu es dans ta chambre à défaire tes valises ? s’exclama Allison, en appui contre le chambranle.

   Soann roula des yeux.

   – Je comptais juste changer de t-shirt, expliqua-t-elle, désignant le tissu mouillé. J’arrive pas à croire que mon propre frère m’ait craché dessus, grimaça-t-elle. J’ai horreur de la bière, en plus.

   – Il a éclaté de rire, ça arrive, rétorqua Allison, luttant pour ne pas s’esclaffer elle aussi. Et puis, vois le bon côté des choses, les gens ne se souviendront même plus de quoi vous riiez comme ça.

    – Je suis pas sûre de préférer qu’on se rappelle que je me suis fait cracher dessus, plutôt que le jour où j’ai appelé la police à cinq ans parce que ma grand-mère insistait pour que je prenne mon bain, marmonna Soann.

   Elle plissa des yeux quand Allison ricana et cette dernière leva aussitôt les mains en signe d’apaisement, dévoilant une bouteille au liquide ambré.

   – Excuse-moi. Et pour me faire pardonner, je t’emmène un petit délice de la maison, cadeau de mon paternel.

   Soann attrapa la bouteille et en but une gorgée, savourant la brûlure de l’alcool dans sa gorge. Puis elle toussa, les yeux remplis de larmes.

   – Hé doucement, rit Allison en lui prenant la bouteille des mains. Il est bon, hein ? C’est du whisky.

  – J’avais remarqué, rétorqua Soann, la voix légèrement rauque. La vache, c’est chaud !

   Allison lâcha de nouveau un rire. Un rire profond et chaud qui poussa Soann à sourire en retour et à la regarder. Elle ne sut si c’était l’alcool, mais une brusque montée de température sembla lui enflammer le corps et elle invita Allison à boire avant de reprendre elle-même une gorgée.

   – Portons un toast, déclara Allison lorsque la bouteille fut de nouveau entre ses mains.

   Elle la leva entre elles.

   – A ton frère, que nous avons enfin retrouvé, sourit-elle. A Mathis et sa maman, enfin réunis.

   – Grace à toi, coupa Soann.

   Allison rougit légèrement. Elle porta un dernier toast :

   – Et à nous, pour la merveilleuse nuit que nous allons passer ensemble, et toutes celles qui suivront, taquina-t-elle.

   Soann haussa un sourcil parfaitement épilé.

   – Ah oui ?

   – Hmm hmm, acquiesça Allison tout en la saisissant par le bras.

   Sa main glissa furtivement de son coude à son poignet, lui provoquant d’agréables frissons, puis elle porta l’un des doigts de Soann à ses lèvres et s’afféra à retirer son gant avec ses dents. Le geste avait quelque chose de si sensuel que Soann fut incapable de détourner le regard.  Puis, le vêtement retiré, Allison caressa finalement la peau délicate de sa paume, les yeux rivés dans ceux de Soann.

   – Bien sûr, tu peux refuser.

   – Ça pourrait ne pas marcher, choisit cependant de répondre Soann.

   Allison haussa les sourcils, puis afficha un sourire. Elle s’approcha jusqu’à frôler le corps de Soann.

   – Ça pourrait. Mais ça... on ne le saura qu’en essayant, pas vrai ?

   Soann sentit glisser sous son t-shirt, sur sa peau nue, deux mains chaudes et douces comme de la soie, suivi d’un baiser dans son cou, sur la peau enflammée, qu’Allison  mordilla au passage.

   Un frisson de plaisir intense la traversa, et elle répondit la seule chose qu’elle pouvait répondre en cet instant :

   – Mon lit. Maintenant.

   Le rire d’Allison résonna aussitôt dans la pièce, mais ne tarda pas à céder la place à des gémissements passionnés entremêlé de leurs soupirs...

 

 

- FIN -

 

 

N'hésitez pas à nourir l'auteure, faites-lui savoir ce que vous avez pensé de son histoire !

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8 avril 2015

Chapitre 6 :Le Début de la Fin

Les faibles rayons du soleil tirèrent Allison du sommeil le lendemain matin, et elle s’extirpa de leur lit improvisé, le drap glissant sur ses jambes nues. Les yeux encore gonflés de sommeil, elle enfila un long t-shirt qui lui tomba jusqu’aux genoux et prit la direction du petit bois qui bordait leur camp afin de satisfaire ses besoins naturels.

   La lumière légèrement tamisée par les arbres avait quelque chose d’agréable et elle fut reconnaissante des bruits de la faune et de la flore environnante qui lui permirent de se réveiller en douceur. Agenouillée aux abords d’un petit cours d’eau, elle savourait l’agréable sensation de l’eau qui glissait sur sa peau, suffisamment fraîche pour réactiver chaque muscle de son corps, lorsqu’un sentiment étrange s’empara d’elle.

   Un silence anormal, pesant, s'était installé sur la prairie. Les oiseaux ne chantaient plus, tout semblait s'être figé autour d’elle.

   Puis elle sentit le canon d'un pistolet contre l’arrière de sa tête, et elle comprit pourquoi.

💕

   Soann était en train de s’étirer dans la tente quand le bruit de quelque chose qu’on traînait sur le sol se fit entendre à l’extérieur. Intriguée, elle sortit la tête par l’ouverture, et bondit aussitôt sur ses pieds lorsqu’elle vit Allison tirer le corps inerte d’un soldat à bout de bras, avant de le laisser tomber lourdement à ses pieds.

   – Je t’avais dit que quelque chose clochait, lâcha Allison, essoufflée avant de se passer une main sur son front dégoulinant de sueur.  Le pervers, il a attendu que je fasse ma toilette pour me surprendre !

   Soann s’accroupit aux côtés du soldat et l’observa longuement avant de fouiller sous sa chemise. Son visage était recouvert d’une peinture camouflage, le rendant méconnaissable, et à la vue de son dog tag, elle secoua la tête d’incrédulité.

   – Tu peux le sentir ? demanda-t-elle en levant les yeux vers Allison.

   Cette dernière cligna des yeux, surprise de voir que Soann avait le regard embué. Elle secoua négativement la tête tout en s’accroupissant à son tour.

   – C’est ton frère ? demanda-t-elle, peu sûre d’y croire.

   Soann lâcha un rire mêlé de pleurs.

   – Allison, je te présente Sofyan, acquiesça-t-elle, s’essuyant le nez d’un revers de bras. Je suis désolée, j’avais oublié... il n’a pas de pouvoirs, mais il a toujours été immunisé au mien. Tu crois que... ?

   – Ça pourrait en effet expliquer pourquoi je ne peux pas le sentir, répondit Allison, secouant la tête d’incrédulité. Il doit avoir une espèce de bouclier ou quelque chose du genre. Je comprends mieux pourquoi ils nous regardaient comme ça à la base en tout cas.

   Soann hocha la tête.

   – Ils se sont méfiés, consentit-elle avant de lever la tête. Qu’est-ce que tu lui as fait ? Tu l’as assommé ?

   – Je ne cache pas qu’il risque d’avoir quelques bleus ici et là, grimaça Allison en se redressant. Mais c’est en effet mon grand final qui l’a achevé ; je lui ai mis un coup de crosse sur la tempe, ajouta-t-elle, penaude.

   – Tu peux me passer le bidon derrière toi ? demanda Soann.

   Allison obtempéra et Soann but une gorgée de l’eau désormais chaude avant de jeter le reste sur le visage de son frère. Ce dernier se réveilla aussitôt en sursaut, recracha les quelques gouttes qui s’étaient infiltrées dans son nez et dans sa bouche, puis les observa à tour de rôle tout en s’écartant avec prudence. Son regard s’arrêta finalement sur Soann et il se passa une main sur le visage, incrédule, avant de l’attraper par l’avant du t-shirt et la serrer contre lui.

   – J’étais persuadé que c’était un mensonge, une imposture... Putain, j’ai jamais été aussi heureux de ma vie.

   Trop émue pour pouvoir répondre, Soann se contenta de le serrer contre elle en retour.

8 avril 2015

Chapitre 5 : Si Près Du But, Et Pourtant...

Un mois s’était écoulé depuis leur visite au Harem, et Soann pouvait désormais également rayer le Mexique de leur zone de recherche. Pays majoritairement pauvre, seules les grandes villes avaient été aménagées de routes goudronnées et elles avaient passé les dernières semaines à ne voir que de vastes étendues de sable parsemées de villages miteux.  

   Sans la moindre trace de son frère.

   Se trouvait-il quelque part en Amérique du Sud ? Ou, pire encore, sur un autre continent ? Si tel était le cas, autant chercher une aiguille dans une botte de foin.

   Soupir.

   Elle tourna la tête pour voir Allison prendre place à côté d’elle sur le capot du char et sourit quand elle lui tendit une barquette.

   – Merci. T’es pas obligée de t’embêter à me mettre de la viande à chaque fois, tu sais. Je peux très bien me servir moi-même.

   Allison haussa les épaules.

   – Ça me dérange pas. C’est pas comme si la bestiole allait me manger maintenant qu’elle est morte, taquina-t-elle.

   Soann lâcha un rire, son désespoir momentanément oublié. C’était d’ailleurs exactement pour ça qu’elle adorait la compagnie d’Allison. Pour cette fraîcheur, cette légèreté qu’elle apportait sans même s’en rendre compte.

   – Tu sais, d’habitude, j’ai horreur de manger en compagnie de végétariens. A la façon dont ils me regardent, j’ai toujours l’impression de manger leur chiot.

   – Hmm au moins, toi, on te regarde pas comme si tu venais d’une autre planète, renchérit Allison, le regard fixé au loin. Je t’assure, ce que tu manges m’est complètement égal.

   – Je me fiche aussi que tu sois végétarienne, répondit Soann.

   Elles échangèrent un regard et éclatèrent aussitôt de rire. Allison se tourna vers elle et prit appui sur un coude.

   – Sache en tout cas que je n’ai aucun problème avec les fruits de mer, taquina-t-elle, faisant glisser sa langue sur le plat de sa cuillère sans quitter Soann des yeux. Les moules surtout, oh la la...

   Cette dernière sentit aussitôt son visage se réchauffer, mais refusa de se laisser démonter. Elle rétorqua, les yeux pétillants de malice :

   – Ah ? Eh bien sache que pour ma part, j’adore les fruits tout court. Quelle que soit la saison. Prune, ou figue. Cerise, fraise ou framboise... hmm... Mon préféré ?

   Allison haussa les sourcils, pendue à ses lèvres, et Soann s’approcha de manière à chuchoter, en conspiratrice :

   – L’abricot.

   Allison se mordit aussitôt la lèvre inférieure, un air béat sur le visage, avant de se laisser retomber sur le dos.

   – Hmm l’abricot..., soupira-t-elle de plaisir, avant d’éclater de rire lorsque Soann ricana à ses côtés.

   Une sonnerie stridente choisit ce moment pour se faire entendre et elle lâcha un « oh merde ! » tout en se précipitant à l’intérieur du char. Elle en ressortit cinq minutes plus tard, un air plein d’espoir sur le visage qui fit aussitôt battre le cœur de Soann.

   – C’était la base de San Antonio, dit-elle d’une voix excitée. Les portraits robots ont portés leurs fruits, ils ont reconnu ton frère.

   Soann se contenta de ramasser leurs barquettes et de la rejoindre à l’intérieur pour toute réponse.

💕

   Le soleil était déjà bas dans le ciel lorsqu’elles quittèrent la base et elles roulèrent sur une dizaine de kilomètres avant de s’arrêter dans un endroit désert pour passer la nuit. Il leur avait fallu deux jours pour atteindre l’enceinte militaire, et une bonne heure avant qu’on ne les autorise à entrer à l’intérieur, comme si, malgré le fait qu’elles avaient été invitées, elles n’étaient clairement pas les bienvenues.

   Un sentiment qui n’avait fait que se confirmer par la suite.

   – Ça va ? demanda Soann lorsqu’elle remarqua l’air perplexe qu’affichait Allison.

   Cette dernière secoua légèrement la tête.

   – Oui, c’est juste que..., répondit-elle, visiblement tourmentée avant de se passer une main sur le visage et soupirer. Ecoute, je sais qu’ils nous ont invités, et qu’ils ont répondu à nos questions, mais t’as pas eu l’impression qu’ils nous regardaient bizarrement ?

   – Ils étaient loin d’être à l’aise, ça c’est sûr, répliqua Soann, étirant ses longues jambes devant elle malgré l’étroitesse du char. Mais si deux parfaits inconnus se rendaient à Holy Cross afin d’interroger ton père à ton sujet, il serait sûrement un peu suspicieux lui aussi, non ?

   Allison haussa les épaules.

   – Hmm, sûrement, répondit-elle, même si elle semblait peu convaincue.

   Soann hésita un instant avant de demander :

   – Tu l’as... hum, senti ?

   – C’est ça le problème, soupira à nouveau Allison en tournant la tête vers elle. J’en sais rien.

   – T’en sais rien ? s’étonna Soann. Qu’est-ce que ça veut dire ?

   Allison se débarrassa de sa ceinture avant de lui faire face, penchée en avant, les coudes posés sur les genoux.

   – Y a un truc qui cloche ici, Soann. Je sais que ça fait deux ans qu’il est parti, mais c’est comme si... soit je le sens, soit je ne le sens pas, mais là... c’est comme si mon pouvoir avait disparu.

   Elle soupira lorsqu’elle vit Soann hausser les sourcils.

   – C’est pas clair, je sais, s’excusa-t-elle. Je suis pas sûre d’y comprendre quelque chose moi non plus. Je sais juste qu’un truc ne tourne pas rond ici.   

   Soann laissa retomber sa tête contre le dossier. En ce qui la concernait, elle ne s’était jamais sentie aussi proche et aussi éloignée de son frère à la fois.

8 avril 2015

Chapitre 4 : Le Royaume des Mille et Une Nuits.

La semaine suivante, elles arrivèrent au Harem de Farah, où l’un des nombreux soldats gardant l’entrée principale leur demanda d’attendre sur un large perron qui menait au vestibule d’entrée.

   – Y a pas de doute, y en a qui savent vraiment tirer parti de la guerre, remarqua Allison d’un ton admiratif, les yeux rivés sur le palais et les immenses statues qui l’entouraient. Tu sais, si elle est aussi belle qu’on le dit, j’aurais presque envie de devenir l’une de ses femmes, taquina-t-elle.

   Soann roula des yeux.

  – Ça je te laisserais en juger par toi-même, ironisa-t-elle.

   – Hmm, elle te laisse insensible, c’est mauvais signe, soupira Allison, feignant un air dépité.

   Soann soupira.

   – J’ai jamais dit ça, faut aimer le genre dictateur, c’est tout.

   Allison fit mine de sortir un calepin de sa poche et décrire dessus :

   – Dictateur : non ! C’est noté, chef, sourit-elle fièrement.

   – Je ne savais pas que mes préférences amoureuses t’intéressaient tant, rétorqua Soann, mi-amusée, mi-blasée.   

   Elle sentit un souffle chaud contre son oreille avant que la voix d’Allison ne lui parvienne :

   – On est parti pour passer de longs mois ensemble, si j’ai la moindre chance, j’aime le savoir, taquina-t-elle. Au fait, tu ne m’a pas dit comment tu comptais t’y prendre pour pousser notre chère souveraine à coopérer ?

   Soann eut besoin de quelques secondes pour retrouver ses esprits, et permettre à son visage de retrouver une teinte normale. Elle se racla finalement la gorge :

   – Elle a une dette envers moi.

   Allison haussa les sourcils.

   – Wow. Je me serais attendue à tout sauf à ça. Comment t’as fait ton coup ?

   – J’ai pas fait grand-chose, répondit Soann en haussant les épaules. Je l’ai trouvé au beau milieu du désert peu après avoir mis en place le pénitencier, une vilaine blessure à l’abdomen et sévèrement déshydratée. Je l’ai soignée et une fois remise sur pied, elle m’a juré qu’elle me renverrait la pareille. Je ne pensais pas avoir à lui en faire la réclamation un jour mais...

   – Mais ça va nous être bien utile, conclut Allison, levant la tête lorsqu’une femme vêtue d’une armure en cuir, d’un tulle argenté et d’une longue épée attachée à la ceinture s’approcha d’elles.

   Elle se mit à parler d’une voix grave :

   – A l'époque des dieux de la mythologie, des seigneurs de la guerre, et des rois de légendes. Un pays en plein désordre demandait un héros. Alors survint...

   Elle vit Soann qui l’observait comme si elle avait perdu l’esprit et elle haussa les épaules.

   – Quoi ? Je t’en prie, tu ne peux pas dire qu’elle ne ressemble pas à Xena !

   Soann secoua la tête mais retint néanmoins difficilement un sourire. Elles s’inclinèrent lorsque Farah s’arrêta devant elles.

   – Souveraine, salua Soann avec respect.

   Farah hocha légèrement la tête en réponse.

   – Soann. Après la destruction du pénitencier, je ne m’attendais plus à te voir.

   Elle détailla Allison de la tête aux pieds avant d’ajouter :

   – Qui plus est en compagnie de la fille du chef d'état-major des armées. Que me vaut l’honneur d’une telle visite ?

   Soann se redressa et essuya discrètement ses mains sur son jean avant de répondre :

   – Tu te souviens de ce service que tu me dois ?

   Elle prit une profonde inspiration avant d’ajouter, ignorant le sourcil relevé de Farah :

   – J’en aurais besoin. Maintenant. 

💕

   Assises sur un banc en marbre dans le hall de l’entrée, Soann et Allison observaient silencieusement Farah tandis qu’elle arpentait la pièce en réfléchissant, le visage si impassible qu’aucune ne pouvait dire si elle était hors d’elle ou non.

   – Laisse-moi résumer, déclara-t-elle enfin. Tu cherches un frère que tu n’as pas revu depuis plus de dix ans.

   – Oui.

   – Et... Allison t’aide à le retrouver grâce à ses aptitudes pour le pistage.

   – C’est ça.

   Farah hocha légèrement la tête.

   – Et il s’avère que la dernière personne l’ayant vu vivant se trouve ici et qu’elle est la mère de son fils, dit-elle en s’arrêtant devant elles. Celle-là même qui a poussé tes amies à enfreindre mes règles juste pour lui parler.

   Soann grimaça intérieurement.

   – C’est ça, répéta-t-elle lamentablement.

   – Hmm. Et tu voudrais que je te laisse lui parler parce que tu m’as sauvée la vie par le passé.

   Soann se passa une main sur le visage.

   – Dis comme ça, on dirait du chantage, soupira-t-elle avant de lever les yeux vers Farah. Je veux juste retrouver mon frère, et elle peut peut-être m’y aider. Je n’ai même pas besoin de lui parler moi-même, tu peux lui montrer les portraits robots et lui demander toi.

Farah plissa des yeux, l’air menaçant.

   – Tu veux que je l’interroge, explicita-t-elle, croisant les bras sur sa poitrine. Et qu’en plus, je lui montre des clichés d’un ancien amant.

   A côté d’elle, Soann put sentir Allison rentrer la tête dans les épaules et elle grimaça à nouveau. Elle fut cependant surprise d’entendre Farah ajouter :

   – Oublie les clichés. Suivez-moi.

   Construit au cœur d’une immense beauté architecturale, le harem de Farah était composé de couloirs obscurs, de cours exiguës, d'escaliers dérobés, et de petites salles aménagés autour d’un immense bassin naturel enveloppé de verdure et d’une imposante caverne naturelle creusée dans un rocher. Soann fut cependant surprise de voir qu’elles quittaient le bâtiment commun du rez-de-chaussée pour rejoindre une suite au premier étage.

   Allison sembla sentir sa confusion.

   – Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-elle.

   – Seules les favorites sont installées à l’étage, répondit Soann. Celles qui partagent la couche impériale.

   – Oh. Wow, la vile chanceuse, semblerait qu’elle ait reçu une promotion !

   Soann haussa les sourcils et Allison articula silencieusement « je t’en prie, avec des fesses pareille, je tuerais pour partager son lit ! »

   Soann se sentit rougir et sursauta lorsque Farah s’arrêta soudainement devant une entrée à double porte.

   – Tu as cinq minutes, précisa-t-elle avant de poser une main contre la poitrine d’Allison lorsqu’elle voulut la suivre. Seule.

   Soann acquiesça avant d’entrer à l’intérieur.

💕

   La porte refermée, Farah avait pris place sur la banquette longeant le mur après avoir invité Allison à l’y rejoindre. Il n’avait fallu à cette dernière que quelques secondes pour réaliser que malgré le mur qui les séparaient, elles percevaient néanmoins aisément la conversation qui se tenait à l’intérieur.  

   Allison n’eut pas besoin d’être un génie pour savoir que Farah l’avait fait exprès.

   Pourtant, en tant que fille du chef d'état-major des armées, elle-même responsable d’une centaine de soldats, elle comptait bien tirer parti de la situation elle aussi.

   Elle prit une profonde inspiration avant de tourner la tête vers Farah.

   – D’après Soann, vous n’êtes pas alliée avec L’Elite mais vous leur offrez des soirées divertissantes en échange de femmes.

Farah plissa légèrement les yeux.

   – Et vous vous permettez de tels propos parce que... ?

   Allison décida d’ignorer la menace sous-jacente.

   – Vous savez qui je suis, vous pensez réellement que j’allais rester assise, là, à attendre que le temps passe ?

   – Qu’est-ce que vous voulez ? se contenta de rétorquer Farah.

   – Vous possédez votre propre armée. Et je ne pense pas vous surprendre en vous disant que la guerre est proche. 

   – En effet, répliqua Farah. Et on gagnerait du temps si vous alliez droit au but.

   Allison afficha un léger sourire. Elle adorait les femmes de pouvoirs, elles avaient quelque chose de terriblement excitant.

   – Nous savons toutes les deux que le moment venu, vous allez devoir faire un choix. L’Elite voudra se rallier à vous et si vous refusez, elle vous écrasera aussitôt. Je peux vous proposer une protection de l’armée.

   – En échange d’une alliance ?

   Allison secoua la tête.

   – Non, même si je vous conseillerais grandement de vous joindre à nous le jour venu. Je peux vous promettre une protection contre l’ennemi, en échange de la femme située de l’autre côté de cette porte.

   La réponse fut si longue à arriver qu’Allison était persuadée qu’elle n’arriverait plus.

   – C’est une demande osée, remarqua Farah tout en l’observant intensément Et quand bien même j’accepterais, il me faudrait des garanties.

   – La protection avant la fille, rétorqua aussitôt Allison. Je n’ai qu’un mot à dire et un premier bataillon peut être là d’ici une semaine.

   Des bruits de voix se rapprochèrent des doubles portes  mais Farah les ignora. Elle plissa légèrement des yeux.

   – J’y réfléchirai, répondit-elle finalement, juste avant que la porte ne s’ouvre.

   Même si elle le masqua rapidement, Allison sut aussitôt à l’air déconfit de Soann que la conversation n’avait pas porté ses fruits.

   Elle avait plus qu’à espérer pour que Farah, au moins, accepte sa proposition.

8 avril 2015

Chapitre 3 : A la Recherche de l’Epingle dans la Botte de Foin

Quand Allison regagna le char ce soir-là, ses chaussures et son pantalon étaient trempés mais grâce aux pouvoirs de Neva, elle ne sentait rien. Au contraire, elle avait pris du plaisir à entendre le bruit de la neige qui craquait sous ses pas alors qu’elle passait la ville au peigne fin, et s’était même plusieurs fois surprise à renverser la tête en arrière pour observer les flocons de neige qui tourbillonnaient.

   Une fois à l’intérieur du véhicule, une vague de culpabilité la submergea cependant d’avoir laissé Soann seule aussi longtemps et elle retira son manteau d’hiver avant de venir prendre place à ses côtés.

   – Mince, j’ai oublié qu’il pouvait faire si froid à l’intérieur, s’excusa-t-elle, prenant les mains de Soann dans les siennes afin de les réchauffer. Ça va ?

   Soann hocha la tête. Entre ses vêtements d’hiver et les couvertures polaires, elle n’avait pas eu si froid que ça. C’était surtout le fait d’attendre sans pouvoir bouger qui l’avait rendue folle.

   – Alors ? demanda-t-elle, incapable de patienter plus longtemps

   – J’ai repéré deux appartements dans lesquels Mathis a apparemment vécu, mais aucune trace de ton frère, répondit Allison dans un air désolé.

   Soann hocha la tête, compréhensive.

   – Je m’en doutais. Mathis n’a jamais connu son père, et si j’en crois ce que m’a dit Neva, sa mère n’était pas du genre à s’investir amoureusement parlant, ironisa-t-elle. 

   – Hmm. On devrait atteindre les terres arides d’ici trois à quatre semaines, tu pourras interroger les habitants pendant que je piste la trace de ton frère.

   – On ne va pas pouvoir s’y rendre avec le char, remarqua Soann. On va se faire repérer trop facilement.

   Allison secoua négativement la tête.

   – Aucune chance, mon bébé est invisible, sourit-elle dans un clin d’œil, caressant le tableau de bord avec affection.

   – Invisible ? rétorqua Soann, dubitative. Si le char est invisible... comment se fait-il qu’on puisse toujours se voir ?

   Allison se mordit l’intérieur de la joue, pensive.

   – Tu connais Harry Potter ? demanda-t-elle inquisitrice. Tu sais, Poudlard, Dumbledore...

   Elle s’interrompit lorsque Soann lui offrit un regard appuyé.

   – Harry Potter possédait une cape d’invisibilité qui lui permettait de se rendre invisible aux yeux de tous, mais lui pouvait toujours se voir à l’intérieur de la cape. Eh bien là, c’est pareil. C’est comme si le char tout en entier avait été recouvert de sa cape, sourit-elle, fière de son analogie.

   – Donc le bruit, les odeurs... tout ça reste quand même repérable ? conclut Soann.

   Allison hocha la tête, un soupir s’échappant de ses lèvres.

   – Malheureusement oui, n’importe qui soupçonnant notre présence peut nous toucher mais bon, c’est quand même mieux que rien, non ?

   – Hmm. Pistage, invisibilité... il y a encore d’autres pouvoir que tu possèdes ?

   Allison se mordit la lèvre.

   – J’aime en général jouer la carte du mystère, mais... Je suis un peu comme... un caméléon ? Je copie les pouvoirs des autres et me les approprie, expliqua-t-elle avant de désigner les mains de Soann. Tu peux d’ailleurs retirer tes gants, aucun risque de m’électrocuter, dit-elle tout en faisant apparaître des petits éclairs d'électricité entre ses doigts.

   Elle reprit plus sérieusement lorsque Soann l’observa bêtement :

   – June m’a dit que tu t’interdisais de toucher les gens à cause de ça. Excepté Mathis, sourit-elle furtivement. Tu peux me toucher si tu veux. Enfin, en tout bien tout honneur, bien sûr, taquina-t-elle.

   Soann retira ses gants et sursauta quand Allison s’empara aussitôt de l’une de ses mains. Le bout de ses doigts contre les siens lui fit l’effet d’une décharge électrique comme jamais elle n’en avait connu avant, et quand Allison afficha un sourire, Soann se sentit presque pousser des ailes.

   Elle avait l’impression de vraiment respirer pour la première fois.

💕

   Comme prévu, elles atteignirent les terres arides quatre semaines plus tard. Principalement parce que même si le char pouvait atteindre les 70km/h, il était toutefois plus sûr d'adopter une vitesse de croisière allant de 25 à 30 km/h. Sans compter qu’elles devaient également faire attention à bien gérer leur consommation d’essence. Plus elles allaient vite, plus elles risquaient de tomber en panne dans un endroit dépourvu de bases militaires.

   Après discussion, elles avaient décidé de s’arrêter au harem avant d’envisager de s’enfoncer un peu plus dans le Mexique, et, en attendant, Allison sillonnait chacune des villes qu’elles croisaient dans l’espoir de relever la moindre odeur pendant que Soann montrait les différents portraits-robots de son frère aux passants. 

   Le soleil était déjà bas dans le ciel quand elles se retrouvèrent près du char.

   – Alors ? demanda Allison tout en débarrassant du foulard qui la protégeait du soleil et du sable.

   – Rien, soupira Soann, ses longs cheveux flottant autour de son visage. Toi ?

   – Nada, nix, zilch, répondit Allison avant de regarder autour d’elle. On ferait bien d’installer la tente et d’allumer un feu avant qu’il ne fasse nuit. Je ne sais pas toi, mais je meurs d’envie de goûter les mangues et les bananes qu’on a trouvées.

   Le ventre de Soann grogna rien qu’à l’idée et elles se mirent aussitôt au travail. Deux heures plus tard, elles étaient allongées sur de fines paillasses à observer les étoiles.

   Allison se tourna sur le côté et prit appui sur un coude.

   – Dis, je pensais à un truc tout à l’heure ; t’as un petit côté Pocahontas, tu sais ? dit-elle tout en admirant le profil de Soann. Les longs cheveux bruns, les yeux gris sombres, les pommettes saillantes, le teint mat...

   – ... et elle a été nommée Pocahontas pour son espièglerie, sans compter que son père était le chef de l'empire Powhatan, renchérit aussitôt Soann, un sourire amusé au coin des lèvres. Tu es beaucoup plus Pocahontas que moi.

   Allison secoua négativement la tête.

   – Non, j’ai la peau beaucoup trop claire. Et les cheveux légèrement bouclés. Et les yeux whisky. Comme...

   – Blanche neige.

   Allison porta une main à ses lèvres avant d’éclater de rire.

   – Quoi ? demanda Soann, surprise.

   – Rien, répondit Allison, la larme à l’œil. Je me disais juste que contrairement à elle, j’avais bien plus que sept nains ! rit-elle à nouveau en pensant aux soldats qu’elle avait sous ses ordres. Et j’ai pas de méchante reine qui veuille ma mort. Ni de prince charmant.

   – L’un comme l’autre sont tout aussi bien si tu veux mon avis.

   Allison haussa des épaules.

   – Bon, tu serais plutôt qui alors si t’es pas Pocahontas ?

   Soann plissa des yeux, réfléchissant un instant.

   – Cléopâtre.

   – Oh la femme de caractère, séductrice, ambitieuse et étrangère, ronronna Allison. Ça te correspond peut-être mieux, vu que tu étais à la tête du refuge du pénitencier Severide. Mais si tu as une sexualité dépravée, je te préviens, je préfère ne pas savoir, précisa-t-elle avant de lâcher un cri lorsque Soann la pinça au niveau des côtes.

   Elles rirent un instant avant qu’Allison ne demande plus sérieusement.

   – Mon père était déçu d’apprendre que tu avais refusé le grade d’officier, tu sais. Les Arcans te font confiance, ils t’auraient suivie n’importe où.

   – Ils ont confiance en l’armée aujourd’hui, répondit Soann en haussant les épaules. Et puis, diriger ce n’est pas mon truc. Au pénitencier, je ne faisais que maintenir l’ordre. Il aurait dû offrir le poste à June, elle a de bonnes qualités de meneuse.

   – Oh il l’a fait, juste après que tu aies refusé.

   Soann haussa les sourcils de surprise. June ne lui avait rien dit.

   – Et ?

   – Elle a refusé. Je crois qu’elle a déjà les mains pleines avec Mia. La pauvre, il va visiblement lui falloir encore un peu de temps avant qu’elle ne maîtrise pleinement son pouvoir, frissonna-t-elle.

   Soann s’apprêtait à acquiescer lorsqu’un déclic se fit dans sa tête. Elle se redressa soudainement. 

   – Attends, tu m’as dit que tu copiais les pouvoirs des autres, c’est bien ça ? demanda-t-elle, le regard rivé sur Allison. Donc tu dois avoir les mêmes capacités que Mia...

   Allison secoua aussitôt la tête.

   – Oh non, non, non. Je n’ai rien contre elle, mais je préfère l’éviter comme la peste. J’ai aucun envie de devenir une bombe atomique.

   Le rire de Soann la fit prendre conscience du double sens de ses paroles et elle se couvrit le visage de ses mains, les joues rougies.

   – Bref, tu as compris ce que je voulais dire, rit-elle à son tour.

   Soann se rallongea à ses côtés avant de reprendre plus sérieusement :

   – Tu peux te rendre invisible. Couple ça avec le pouvoir de Mia, et tu pourrais...

   – Faire sauter les centres de l’Elite ? On y a déjà pensé. Surtout que je pourrais également rendre Mia invisible. A nous deux, on offre un sacré avantage à l’armée, hein ? Mais crois-le ou non, l’idée est très loin de réjouir mon père et encore plus loin de réjouir Neva.

   Ça, Soann pouvait le comprendre.

   – Mais toi, qu’est-ce que tu en penses ? demanda-t-elle en lui faisant face.

   Allison la regarda dans les yeux.

   – Que le moment venu, l’armée pourra définitivement compter sur moi.

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8 avril 2015

Chapitre 2 : Dans les Entrailles de la Bête

Installée sur un siège étroit, Soann observait les nombreux cadrans, l’espèce de frein à main et les quelques manettes qui constituaient le tableau de bord. Devant elle s’ouvrait une mince fente de visée, de même que sur les côtés et elle essayait tant bien  que mal de ne pas se laisser envahir par le sentiment de claustrophobie que lui inspirait l’habitacle.

Elle tourna la tête lorsqu’Allison prit place à côté d’elle et l’observa positionner une lampe sous son menton de façon à éclairer son visage par le dessous. Elle imita une voix d’outre-tombe :

– Bienvenue dans les entrailles de la bête.

Amusée, Soann afficha l’un de ses rares sourires et Allison feignit un air surpris, clignant des yeux tout en portant une main à sa poitrine.

– Mais regardez-moi ça, elle sait sourire ! taquina-t-elle.

Soann leva les yeux au ciel.

– Oui eh bien ne t’y habitue pas trop, répondit-elle, le soupçon de son sourire néanmoins toujours présent sur ses lèvres.

– Chef oui Chef ! rétorqua Allison tout en tournant la clé du démarreur.

Un grondement sourd emplit la cabine et elle écrasa ensuite la pédale d’embrayage, l’engin faisant un léger bond en avant, avant de glisser sur le sol, obéissant aux leviers commandant les chenilles et la direction qu’Allison manipulait.

– Tu penses pouvoir manier la tourelle ? demanda-t-elle après quelques minutes de silence.

– La quoi ? répondit Soann en regardant autour d’elle.

Allison retint difficilement un rire.

– Le long tube du canon ? Celui qui nous sert à tirer les obus ? taquina-t-elle. Si l’ennemie nous tombe dessus, l’une devra conduire pendant que l’autre tire. Je te montrerai comment ouvrir la culasse du canon et charger le projectile. Pour la mise à feu, c’est facile, suffit de tirer la manette rouge, ajouta-t-elle dans un clin d’œil.

Soann secoua légèrement la tête.

– C’est moi ou tu as l’air excitée par le voyage ? demanda-t-elle en posant son coude contre la meurtrière et appuyant sa tempe contre son poing.

Un long manteau neigeux s’étendait à perte de vue devant elles depuis qu’elles avaient quitté le hangar et elle trouvait le paysage apaisant.

Allison haussa les épaules.

– Un peu. Être une femme militaire, c’est pas toujours facile. Être une femme militaire fille du chef d'état-major des armées ? C’est l’enfer. Non seulement je dois montrer l’exemple mais en plus ses soldats me fuient comme la peste, soupira-t-elle en roulant des yeux. Je crois qu’ils me redoutent autant qu’ils me détestent, remarqua-t-elle avant de lâcher un rire : si seulement ils savaient combien je passe plus de temps à désobéir à mon père qu’autre chose...

– Il est si difficile à vivre ?

– Pas vraiment. Il a surtout des valeurs en lesquelles il croit, qu’il fait passer en priorité. Il n’a pas forcément tort, mais j’ai passé toute ma vie dans l’armée, alors parfois j’ai envie de plus, d’autre chose... il a du mal à l’accepter.

– Rassure-moi, c’est pas une crise d’adolescence tardive quand même ?

Allison lâcha un rire.

– Non, ça j’ai déjà donné. J’avais juste envie de m’éloigner un peu de toute cette testostérone et faire autre chose. La suggestion de June de te venir en aide est tombée au bon moment.

Elle ajouta après quelques minutes :

– Mais pour répondre à ta question, la première, pas celle sur la crise d’adolescence, précisa-t-elle, feignant un air renfrogné. Je me suis dit que ça t’éviterait de penser à ton fils que tu laissais derrière. Je sais que ça ne doit pas être facile.

Soann haussa les sourcils.

– Mon fils ? répéta-t-elle, peu sûre d’avoir bien entendu.

– Mathis ? rétorqua Allison, confuse. C’est bien ton fils, non ?

Soann secoua légèrement la tête.

– Non... mais j’imagine que tu as tiré cette conclusion parce qu’on a les mêmes pouvoirs ?

– Oui, non, c’est... oh merde ! s'exclama soudainement Allison en portant une main à son front. Quelle andouille ! J’ai senti que vous aviez du patrimoine génétique en commun mais pas suffisamment pour que ce soit entre une mère et son fils. Une tante et son neveu par contre...

Elle tourna la tête vers Soann qui l’observait, le cœur battant.

– Tu n’as pas d’autres frères et sœurs ?

Soann secoua négativement la tête.

– Alors ton frère est papa, et son fils s’appelle Mathis, conclut Allison en tapant des doigts contre son menton.

Elle tendit soudainement une main vers l’arrière de son siège et en sortit une carte qu’elle déplia sur le tableau de bord, gardant un œil sur la route.

– Tu sais où il vivait avant de rejoindre le refuge ? demanda-t-elle, levant les yeux lorsque Soann ne répondit pas.

Un air coupable s’abattit sur elle lorsqu’elle remarqua son visage éberlué. Elle posa une main sur son bras.

– Désolée, ça doit faire beaucoup à assimiler d’un coup...

Soann secoua légèrement la tête tout en clignant des yeux.

– Non, c’est... hum, c’est plutôt une bonne nouvelle, en fait. C’est la première fois que j’ai des nouvelles de mon frère depuis l’insurrection. Je pensais...

Elle ferma les yeux lorsqu’elle sentit les larmes monter et prit une profonde inspiration pour se calmer.

– Une part de moi pensait qu’il n’avait pas survécu, alors apprendre qu’il a un fils ? Je sais que je ne dois pas trop me faire d’espoirs mais savoir qu’il était encore en vie il y a huit ans...

– Je comprends, répondit Allison avec compassion.

Soann lui sourit tristement avant de se racler la gorge :

– Crane Lake. Il a grandi à Crane Lake, au nord du pays. Mais sa mère appartient au harem de Farah.

Allison haussa les sourcils d’incrédulité.

– Un harem ? s’exclama-t-elle. Tu sais, c’est pas parce que je me suis plainte de l'excès de testostérone qui envahissait la base qu’il faut automatiquement m’emmener dans un endroit non seulement interdit aux hommes, mais qui regorge de femmes en tenues d’Eve, taquina-t-elle.

Soann l’ignora et désigna la ville sur la carte. Allison changea aussitôt le char de direction.

– On devrait y être d’ici trois semaines. Si ça ne donne rien, on filera au harem juste après.

Soann se contenta d’hocher la tête.

Pour la première fois depuis la disparition de son frère, elle sentit l’espoir renaître en elle.

4 avril 2015

Anne Azel - Juste Partenaires (Academy Valentine 2003)

(Texte original ici : Anne Azel - Just Business Partners)

 

Nous sommes juste partenaires commerciales, Erin et moi. Erin Rapetti est une boule d’énergie d’1,57 mètre, qui pourrait vendre du sable à un Egyptien. Elle est petite, jolie comme un cœur et sait mettre chacun de ses attributs en valeur. Je suis tout le contraire. Je mesure 1,70 mètre, musclée et là où Erin possède la beauté brune des Italiennes, je suis la blonde scandinave stoïque. Ce que nous partageons est indispensable si on veut se garantir le succès.

Ce sont les années 1990. L’époque où on pouvait se détendre et apprendre à se connaître soi-même est révolue depuis longtemps. J'ai eu un portefeuille d'investissement depuis que ma mamie Nordrum m'a donné une tirelire à cinq ans. Erin jure qu'elle est née avec un agenda à la main. Nous avons rencontré le succès, principalement grâce aux baby-boomers qui ont soudainement réalisé qu'ils étaient passé à côté de tous ces bons moments qu'ils étaient censés avoir. Erin et moi vendons des motos. Pas les massives qui vrombissent, qui effraient les gens dans la rue et attirent les gangs, mais des motos de yuppies. Beaucoup de chrome, de couleurs, de sacoches de selle, et de systèmes audio. Secrètement, nous les appelons les bécanes de la ménopause.

Comme c’est la Saint Valentin, j’ai aidé Erin à installer une moto rouge brillant dans la vitrine et nous avons laissé une rose à longue tige sur le siège en cuir noir. Elle avait allumé le système audio et les Spice Girls chantaient Wannabe.

– Les mecs vont envisager de s’offrir une dernière folie, et les nanas, une histoire d'amour avec un rebelle, sourit Erin, les mains sur les hanches, en regardant le vélo dans la vitrine.

– Du moment que ça marche.

Je tire une clé de ma poche de jeans et me dirige vers à la boutique, vu que la customisation des bécanes, c’est mon travail.

– Val ?

Je m'arrête et me retourne.

– T’as jamais pensé à vendre l'entreprise ?

Je reviens sur mes pas, mes sourcils se fronçant.

– Bien sûr, mais on vend juste après un pic de la demande, pas quand on résiste aux aléas du marché boursier. Pourquoi ?

Erin se perche sur une moto turquoise avec des sacoches blanches, qui, pour des raisons dépassant mon entendement, fait partie de nos meilleures ventes. Je m’appuie contre le chambranle de la porte. Ça va visiblement être une conversation sérieuse.

Erin se mort la lèvre.

– J'ai rencontré quelqu'un.

Mon cœur fait Pan. Pan. Il n'y a pas d'autre façon de le décrire. Ok, Erin a eu une série de petits amis au fil des ans, mais elle n'a jamais commencé une conversation par « J'ai rencontré quelqu'un. » C'est stupide, mais je me sens trahie.

– Rencontré quelqu'un ?

– Une femme.

Pan. C’est à mon tour de m’asseoir. Je choisis le bord de la vitrine.

 – Une femme.

Super, j’en suis réduite à des phrases de deux mots.

– Je suis lesbienne.

– Lesbienne.

Je secoue la tête pour faire fonctionner mon vocabulaire à nouveau.

Je suis lesbienne. T’as jamais été lesbienne. Est-ce que tu t’es déjà rendue à des défilés de la Gay Pride ? T’es déjà sortie avec une femme ? Merde, tu flirtes avec tous les gars qui viennent ici !

– C'est mon travail. Je les flatte, je les caresse dans le sens du poil, puis je les sers. D’ailleurs, c’est pas pour flirter avec des hommes qui retombent en enfance pour la seconde fois et pour flatter des femmes en quête de liberté que je suis resté fidèle à ce travail.

Pan. Je crois que je vais m'évanouir. Le travail de ma vie se délite. Je m’en sors très bien avec les motos mais je ne pourrais pas en vendre une pour sauver ma vie.

– Qu’est-ce qui a déclenché tout ça ?

– Rencontrer Rose tout d’abord, mais aussi en regardant les gens enfourcher leur moto et partir d’ici comme si pour la première fois dans leur vie, ils étaient vraiment vivant.

Je pouffe de rire.

– Pour l'amour de Dieu, Erin, ce sont des bécanes de la ménopause, tu le sais. T’es trop jeune pour avoir la crise de la quarantaine. 

– J’ai pas la crise de la quarantaine. J’ai la crise de toi !

– Moi ?

Soudain, le visage d’Erin est rouge de colère et elle se tient debout devant moi.

– Toi, espèce d’idiote ! Tu sais quel jour on est ?

Je réfléchis sérieusement. Son anniversaire est au printemps. Il est déjà temps pour elle d’avoir sa mammographie et son examen physique ? Elle déteste ces jours-là. Nan.

– C'est juste la Saint Valentin, c’est ça ?

Elle me frappe avec une sacoche.

– Je t'aime, espèce de grande nigaude !

Pan. C’est pas mon cœur cette fois-ci. C'est une moto rouge vif, plutôt lourde, qui tombe sur moi. L'annonce d'Erin mérite une réflexion sérieuse. Je ne lui en accorde aucune puisque je ne reprends conscience qu’une fois l'ambulance à mi-chemin de l'hôpital.

Une fois admise, je vois un médecin, qui est légèrement flou et arbore deux têtes.

– Alors, pouvez-vous me dire ce qui s'est passé ?

– J'ai été frappé à l'épaule avec une sacoche blanche et sur la tête avec une moto rouge, marmonne-je. 

Il rit.

– Vous me semblez confuse ?

– Confuse ? Et comment ! Ma partenaire vient juste de me dire que je suis une grande nigaude et elle m'aime.

– C’est elle qui vous a roulé dessus avec la moto ?

– Non, elle se trouvait à l’autre bout de la sacoche blanche. La moto a agi de son plein gré. 

– Ça arrive, répond le docteur, hochant sagement la tête.

– J'ai besoin de voir Erin.

– Serait-ce celle qui tient une rose à longue tige et une clé ?

– C’est ça.

– Vous avez une bonne commotion cérébrale et devrez être admise au moins pendant la nuit, mais je vais vous donner quelques minutes avec votre, euh, partenaire commerciale, si elle accepte de me remettre sa clé.

Le médecin disparaît et quelques minutes plus tard, Erin apparaît au coin du rideau.

– Je suis tellement désolée. La moto est juste tombée, je te jure.

Elle sanglote.

– Je sais. Tu m'aimes ? 

Deux têtes floues hochent la tête vers moi.

– Je t'aime aussi.

Erin s’approche et prend ma main.

– Vraiment ? Pourquoi ne m'as-tu rien dit ?

– Parce que je n'avais aucune idée que tu étais de ce bord-là.

– Rose m'a dit qu'il était temps d'être honnête avec moi-même.

– Mais c’est qui cette Rose, bordel ?

– Chut, t’énerve pas. C’est ma thérapeute.

– T’as pas besoin de thérapeute. Tu as besoin de moi.

J'essaie de m'asseoir, mais le monde continue de tourner.

– Reste tranquille. Oui, c'est ce que dit Rose. Cesse de porter ton cœur à bout de bras, dis-lui simplement et vis avec les conséquences.

Je souris.

– Pas « conséquences », « commotions ».

Erin embrasse délicatement mes lèvres. Pan. Ça, c'était mon cœur.

– C'est le plus beau cadeau de Saint-Valentin que j'ai jamais eu. Dès que je sors d'ici, je vais t’inviter à sortir, Erin Rapetti. Je me fiche que tu grasseyes et que tu aies deux têtes.

 

- FIN -

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