Eva jeta un coup d’œil rapide dans le Juda avant de prendre une profonde inspiration puis ouvrir la porte, Emma, nonchalamment appuyée contre le battant, lui apparut aussitôt.
- Hé, lui sourit cette dernière. Ta ligne téléphonique est coupée, je suppose qu’elle est toujours ici ? demanda-t-elle, un sourcil haussé.
- Oui, répondit prudemment Eva alors qu’elle étudiait son visage, essayant de déterminer ce qu’elle pouvait bien penser.
Emma hocha la tête.
- Merci pour le sms, j’aurais été totalement paniquée si tu ne m’avais pas prévenue, enchaîna-t-elle avant de plisser légèrement les yeux. Ça va toi ? Tu as l’air exténué, ajouta-t-elle plus doucement.
Eva se gratta le sourcil.
- Disons que j’ai eu une longue nuit, sourit-elle faiblement. Qui se transforme en une longue journée, apparemment.
- Hmm, acquiesça Emma d’un ton compréhensif. Laisse-moi te débarrasser de ta sœur alors, comme ça tu pourras profiter du reste de la journée pour te reposer.
Elle s’apprêtait à entrer lorsqu’Eva lui bloqua soudainement le passage. Surprise, elle haussa les sourcils avant de se reculer légèrement.
- Quelque chose ne va pas ? demanda-t-elle, appréhensive.
Eva se mordit la lèvre tout en l’observant ; après avoir finalement remarqué plusieurs appels en absence sur son portable et sur celui de Liz, elle avait décidé de prévenir Emma lorsque Kate était partie prendre sa douche un peu plus tôt, se doutant qu’Emma allait chercher à la retrouver à un moment ou un autre, peu importe ce qui avait bien pu se passer entre elles auparavant. Mais la réaction qu’Emma avait désormais, si posée, si calme, presque... détachée, la surprenait.
Elle prit une profonde inspiration avant de répondre :
- Ecoute Emma, je sais que ça ne me regarde pas, mais Kate...
- Je sais, la coupa aussitôt Emma. Je vis avec elle depuis six ans maintenant, je la connais plutôt bien. Ne t’en fais pas, je ne compte pas faire de scène, ajouta-t-elle en lui mettant un coup amical dans les côtes.
Eva l’observa, intriguée.
- D’accord, répondit-elle, sur la réserve.
Emma hocha la tête puis l’embrassa sur la joue avant d’entrer dans l’appartement. Elle tendit l’oreille, à l’affut du moindre bruit, mais fut surprise de n’en entendre aucun. Confuse, elle lança un regard interrogateur en direction d’Eva avant de se diriger vers le salon lorsque cette dernière haussa simplement les épaules en réponse.
La première chose qu’elle aperçut lorsqu’elle pénétra dans la pièce, fut Kate qui s’arrêta soudainement de faire les cent pas pour la fixer bêtement, comme si elle venait d’avaler sa langue. Un mouvement sur sa droite attira son regard et elle salua Liz d’un signe de la main avant de reporter son attention sur Kate qui n’avait pas bougé, à l’exception de ses mains qui tripotaient nerveusement le bas de son t-shirt.
Elle s’apprêtait à prendre la parole lorsque son regard s’arrêta sur des morceaux de plastique formant un petit tas à même le sol. Elle haussa un sourcil.
- Eh bien..., je crois que c’est la dernière fois que j’investis plus de 300€ dans un téléphone portable, dit-elle d’un ton caustique.
Un silence pesant suivit ses paroles et elle leva les yeux au ciel avant de s’approcher de Kate.
- Ou alors... la prochaine fois, je t’offre la housse la plus résistante qu’ils ont avec, ajouta-t-elle en tirant légèrement sur son t-shirt.
Kate lui offrit un air totalement perplexe.
- Hum, Emma...
Emma posa une main sur ses lèvres.
- Je viens de passer les deux dernières heures dans les bouchons pour venir te retrouver ; j’ai définitivement besoin d’une tasse de thé et de quelque chose à avaler. Elle tourna la tête en direction d’Eva et Liz avant d’ajouter : ça vous dérange si on occupe votre cuisine pendant quelques temps ?
Eva et Liz échangèrent un regard avant que cette dernière ne réponde :
- Non, allez-y, on sera sur le balcon.
Emma hocha la tête.
- Merci, répondit-elle en s’emparant de la main de Kate et en l’entraînant vers la cuisine. Ça ne devrait pas être long.
Les sourcils de Kate grimpèrent sur son front. Pas être long ? C’est mauvais signe ça, non ? Elle chercha réassurance dans le regard de Liz et Eva mais n’y lut que le reflet de son propre étonnement et de son inquiétude.
Elle soupira tout en levant intérieurement les yeux au ciel. Merci les filles.
💕
- Je suis contente de voir que si quelque chose arrive, tu viens te réfugier ici, commença Emma en en désignant l’endroit du regard avant de prendre une première gorgée de son thé.
Kate hocha doucement la tête depuis sa place contre l’évier de la cuisine.
- Je ne voyais pas où aller d’autre, admit-elle.
- Hmm, j’aurais probablement fait la même chose, répondit Emma avant de se taire un instant, observant Kate. Tu as toujours eu du mal lorsque tu sais que je ne vais aimer, ou que ça va me faire mal, et que tu t’en sens infiniment coupable, reprit-elle en traçant le contour de sa tasse du bout du doigt.
Elle s’arrêta et leva les yeux vers Kate.
- Alors, qu’est-ce que c’est, cette fois-ci ? demanda-t-elle, un sourcil haussé.
Kate eut un rire dénué d’humour tout en secouant la tête.
- Cette fois-ci... A t’écouter, on dirait que j’ai quelque chose à me reprocher tous les trente-six du mois.
Emma grimaça. Ça commençait mal. Elle reposa sa tasse sur la table de la cuisine avant de s’approcher de Kate et passer ses bras autour de sa taille, redoutant un instant de se voir repousser lorsqu’elle sentit Kate se figer, mais finalement soulagée lorsque la jeune femme se détendit légèrement.
- Hé, appela-t-elle afin de croiser le regard de Kate.
Kate serra un instant la mâchoire avant de tourner légèrement la tête pour la regarder, sa colère et sa douleur s’atténuant considérablement lorsqu’elle se retrouva capturée par des yeux vert émeraude emplis d’amour.
- Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire, reprit Emma d’une voix douce, ses mains caressant le dos de son épouse en des cercles réconfortants. Juste que, les rares fois où c’est arrivé, poursuivit-elle en insistant sur les mots, tu n’avais aucune raison de t’en vouloir. Alors... que s’est-il passé ? demanda-t-elle à nouveau.
Kate secoua la tête alors que les larmes montaient à nouveau malgré elle.
- Tu ne vas pas aimer, souffla-t-elle d’une voix tremblante, la gorge douloureusement nouée.
- Dis-moi, répondit Emma d’une voix encore plus douce.
Kate détourna le regard alors qu’une première larme coulait le long de sa joue.
- Oh Kate non, s’il te plaît, reprit Emma en essuyant sa joue. Je déteste te voir pleurer.
Kate secoua de nouveau la tête avant de se reculer, se détachant de son étreinte.
- Je suis désolée, balbutia-t-elle en se dirigeant vers la porte de la cuisine. Je ne peux pas... je...
Emma l’observa un instant, son cœur se déchirant dans sa poitrine face à la douleur de Kate qu’elle percevait aisément et elle baissa les yeux vers le sol avant de murmurer :
- Tu ne m’as pas trompée, Kate.
Les mots lui parvinrent et Kate finit par s’arrêter, le cœur tambourinant.
- Qu... quoi ?
- Tu ne m’as pas trompée, répéta Emma en s’approchant. C’est bien ce que tu croyais avoir fait, non ?
Interdite, Kate se retourna pour lui faire face et l’observa un long moment avant de répondre :
- Je... comment...
Emma eut un faible sourire avant de prendre le visage de Kate entre ses mains et l’embrasser doucement.
- Comment je le sais, hein ? demanda-t-elle en se reculant légèrement pour pouvoir la regarder. Je le sais parce que vous étiez ensemble pendant à peine cinq minutes, et, non pas que je doute de tes... capacités, dit-elle, le regard brillant. C’est un peu court, non ?
Kate secoua légèrement la tête, confuse.
- Je ne comprends pas.
Emma soupira avant de venir s’emparer d’une main qu’elle porta à ses lèvres.
- Eva a déjà vérifié mes doigts, répondit aussitôt Kate, embarrassée.
Emma s’interrompit, les sourcils haussés.
- Je comptais juste t’embrasser, précisa-t-elle, perplexe, avant de se sentir fondre devant l’air si adorable de Kate. Mais... la seule personne avec qui tu as fait l’amour la nuit dernière, Kate, c’est moi, dit-elle sérieusement. Enfin, tu as essayé, parce que tu t’es endormie en route, ajouta-t-elle en se retenant visiblement de rire. Tu ne supportes vraiment pas l’alcool.
Kate lâcha un rire nerveux alors qu’elle ne quittait pas sa main du regard, toujours tenue entre celles d’Emma.
- Endormie en route, hein ? Je suis plutôt embarrassée, maintenant.
- Non, répondit Emma en secouant frénétiquement la tête. Je m’endormais aussi, ajouta-t-elle en se mordillant la lèvre inférieure avant de grimacer. Je suis désolée.
- Pas grave, sourit Kate avant de soupirer. Mais, la limousine...
Emma lui offrit un regard confus.
- La limousine ?
- J’étais seule avec Cassie lorsque nous sommes rentrées cette nuit, dans la limousine.
- Ah, sourit Emma. Il fallait bien que quelqu’un ramène la voiture, non ? dit-elle, un sourcil haussé. Je t’ai rejointe à la soirée Kate... le coup de fil qui m’a retenue ?
Kate se passa une main sur le visage, se sentant soudainement incroyablement stupide et fatiguée.
- Je n’avais pas pensé à ça, répondit-elle enfin, abattue. Je n’ai pensé à rien... Il y a eu ces flashs, et les paroles de Cassie...
Emma encadra de nouveau son visage de ses mains.
- Kate, vous n’étiez ensemble que pendant deux minutes. Deux minutes. Tu peux me dire ce que tu aurais eu le temps de faire pendant ce temps-là ? Ce n’est même pas dans le livre des records. Elle grimaça. Bon, si, ça l’est. Mais honnêtement, à part apparaître dans ce fichu bouquin, ils n’avaient aucun autre but. Je veux dire, ce n’est pas en une trentaine de secondes que tu as le temps d’en oublier ton prénom, si tu vois ce que je veux dire.
Sa phrase à peine terminée, elle fut ravie d’entendre le rire de Kate.
- Oh bon sang, répondit Kate en s’essuyant les yeux. Trente secondes ? Oserais-je demander comment tu sais ça ?
Emma se mordit la lèvre.
- Les lycéens ont des intérêts bien particuliers, parfois, admit-elle. Bon, ce n’était pas vraiment le record du rapport le plus rapide, mais plutôt du nombre de rapport dans une seule et même journée. Chaque rapport sexuel devait excéder trente secondes pour être comptabilisé.
- J’ai envie de savoir le résultat ? grimaça Kate.
- 919. Avec des partenaires différents.
Kate écarquilla les yeux avant de grimacer à nouveau.
- Beurk, c’est dégoûtant ! Et puis, en une journée ? J’imagine même pas l’état dans lequel elle devait être après...
Elle fut coupée par une main sur ses lèvres.
- Arrête, je ne veux vraiment pas penser à ce genre de chose.
Elle sentit Kate sourire avant qu’elle ne reprenne rapidement son sérieux, un air coupable prenant place sur son visage.
- Elle était nue, dans le même lit que moi, Emma. Et je n’étais pas beaucoup vêtue non plus.
- Hmm, lorsque je l’ai aperçue, elle était enroulée dans une serviette de bain, non ?
Kate cligna un instant des yeux avant d’hocher la tête.
- Oui, ses cheveux étaient humides aussi.
- Je sais, sourit Emma. Viens, on sera plus à l’aise dans le salon. Et allons chercher Eva et Liz aussi, je n’ai pas envie de raconter l’histoire une deuxième fois, ajouta-t-elle en feignant un air blasé.
💕
- Ca va aller, tu crois ? Entre elles ?
Liz haussa les épaules alors qu’elle prenait place sur le hamac rouge qu’elles avaient installé sur le balcon.
- Je ne sais pas, répondit-elle. S’il y a bien quelqu’un de compréhensif, c’est Emma. Rappelle-toi cette histoire avec Cassie ; elle a une confiance aveugle en Kate. Mais... si Kate l’a vraiment trompée... je ne sais pas comment on peut passer au-dessus de ça.
- Ce serait ridicule, soupira Eva depuis sa place contre la balustrade, le regard perdu dans le paysage qui s’étendait devant elle. Je veux dire, Kate ne s’en souvient même pas.
- Hmm. C’est juste une épreuve qu’elles vont devoir affronter ensembles, tenta de la rassurer Liz d’un ton conciliant. On sera là pour elles, comme elles l’ont été pour nous. Pas vrai ?
Eva lui jeta un rapide coup d’œil alors qu’un faible sourire prenait place sur ses traits.
- Elles ont plutôt assuré, hein ? demanda-t-elle faiblement.
- Elles ont été géniales, acquiesça Liz alors que les images repassaient dans son esprit.
💕
Installée dans le fauteuil près de la fenêtre, Liz resserra un peu plus le plaid autour d’elle alors qu’une fois de plus, des pensées désolantes la traversaient. Jamais elle n’avait éprouvé une telle souffrance, la douleur d’apprendre la mort d’un être qu’Eva et elle chérissaient déjà tant, le regret de ne plus jamais pouvoir le connaître, la culpabilité de ne pas avoir été là pour empêcher le drame et, pire que tout, ce sentiment d’impuissance pour soutenir Eva. Une énième larme coula le long de sa joue, et elle sursauta légèrement lorsque quelqu’un vint l’essuyer pour elle.
- Hé, sourit doucement Emma dans l’espoir de la rassurer.
- Hé, répondit Liz, la voix rendue rauque par l’émotion. Tu... hum, ça fait longtemps que tu es là ?
Emma secoua légèrement la tête.
- Non, je viens tout juste de rentrer, répondit-elle en venant prendre ses mains dans les siennes. Je suis désolée, je ne voulais pas te faire peur.
Liz haussa les épaules avant de reporter son attention sur son épouse. L’opération avait eu lieu deux heures plus tôt et, après s’être plainte de douleur dans le bas du ventre, Eva s’était de nouveau endormie. Elle n’avait pas quitté son chevet depuis, et ce même lorsque ses parents, Cassie et Emma étaient arrivés.
- Elle va avoir besoin de toi, lui parvint de nouveau la douce voix d’Emma.
- Je sais…
- Elle s’en veut énormément, reprit Emma en déviant son regard vers Eva. Elle est persuadée que c’est de sa faute, qu’elle aurait pu l’éviter.
Liz détourna son regard et l’observa, surprise.
- Elle te l’a dit ? demanda-t-elle d’un ton mêlant à la fois étonnement et reproche.
Emma secoua aussitôt la tête.
- Non, elle m’a à peine dit un mot après l’opération. Mais il n’y a pas besoin d’être devin pour le deviner ; son corps tout entier le crie.
- Mais c’était un accident, murmura Liz alors que les larmes coulaient à nouveau.
Emma se leva et la prit dans ses bras.
- Shh, je sais. Je n’ai pas arrêté de lui répéter, mais elle ne veut rien entendre. Elle est perdue. Je pense... je pense qu’elle a peur que tu lui en veuilles.
Liz se recula légèrement et secoua la tête d’incrédulité.
- Lui en vouloir ? Emma je t’en prie... Elle prit une inspiration tremblante, le regard rendu vague par la douleur. Oh bon sang, c’est un cauchemar.
Emma prit place sur l’accoudoir et vint caresser ses cheveux dans un geste de réconfort.
- Ecoute, le docteur a assuré que physiquement, Eva allait aussi bien que possible, lui dit-elle d’un ton doux. Elle pourra avoir d’autres enfants sans problème. En attendant... il faut qu’elle fasse le deuil de ce bébé, toi seule peux l’y aider.
Liz s’essuya les yeux d’une main irritée.
- Je sais. C’est juste… elle était si heureuse d’attendre cet enfant Emma, je te jure, renifla-t-elle. Elle était... je ne sais pas comment elle va pouvoir s’en remettre.
- Avec du temps et ton amour, lui sourit doucement Emma. Et sa prochaine grossesse. Il ne faut pas qu’elle oublie que ce n’était qu’un accident et qu’elle pourra avoir tous les enfants qu’elle veut.
Liz hocha doucement la tête.
- J’aurais dû..., j’aurais dû faire plus attention, peut-être que…
Emma l’interrompit aussitôt en venant encadrer son visage de ses mains.
- Liz, il n’y a rien que tu aurais pu faire qui aurait empêché sa fausse couche, lui dit-elle d’un ton ferme mais doux. Ne laisse pas la culpabilité prendre le dessus, tu n’aurais rien pu faire. C’était un accident. Tu dois être forte pour elle, Liz, elle a traversé une épreuve terrible, il lui faudra plusieurs mois pour en guérir. Elle n’y arrivera pas sans toi.
- Elle va avoir besoin de vous aussi.
Emma lui offrit aussitôt un sourire entendu.
- Bien sûr, et ses parents sont en route. Elle aura toute l’aide dont elle va avoir besoin, et plus encore.
- Merci Emma, répondit Liz en prenant ses mains dans les siennes. Ça te dérange si... enfin, j’aimerais être un peu seule avec elle. D’accord ?
Emma se redressa et l’embrassa sur la tempe.
- Pas de soucis, répondit-elle d’un air entendu. Je serais dans la salle d’attente au bout du couloir, avec Cassie et tes parents. Kate ne devrait pas tarder à arriver.
Liz hocha la tête d’un air entendu et Emma commença à s’éloigner avant de s’arrêter soudainement, hésitant un instant avant de se retourner afin de lui faire face à nouveau.
- On est là pour toi aussi, Liz, d’accord ? lui dit-elle sincèrement. Elle va avoir besoin de toi, mais je sais aussi que tu auras tout autant besoin d’elle. Ça lui prendra peut-être du temps... mais on est là, nous, d’accord ? A n’importe quelle heure du jour comme de la nuit, compris ?
Liz hocha la tête, l’émotion la gagnant à nouveau.
- Compris, souffla-t-elle en s’essuyant les yeux. Merci Emma, tu n’imagines même pas ce que ça représente pour moi.
- Oh si, je pense en avoir une petite idée, lui répondit Emma d’un air compatissant avant de s’éloigner à nouveau. A tout à l’heure.
Liz la regarda disparaître, avant de relâcher un soupir tremblant. Enfin, elle ressentait un peu d’espoir.
💕
Eva croisa son regard avant de tourner à nouveau la tête vers le paysage qui s’étendait devant elle. Malgré les paroles rassurantes de Kate ce jour-là, lorsqu’elle était enfin sorti de son mutisme, elle n’avait pu trouver la force d’affronter Liz contrairement à ce qu’elle avait prévu. La peur, l’appréhension, la culpabilité l’avaient clouée sur place, et mis à part quelques brèves paroles, elle n’avait rien dit. Pire encore, elle redoutait depuis se retrouver en sa présence, non plus pour les mêmes raisons, mais parce qu’elle s’était rendu compte à quel point son attitude avait dû la faire souffrir, et également combien elle lui manquait.
Il est grand temps que cela change, pensa-t-elle fervemment avant de tourner à nouveau la tête vers Liz. Elle croisa aussitôt un regard bleu azur perplexe.
- Ça va ? demanda Liz, le ton inquiet.
- Oui, sourit nerveusement Eva. Je… hum, j’aimerais te parler te quelque chose, en fait, ajouta-t-elle, hésitante.
Liz cligna un instant des yeux avant de se redresser et s’appuyer contre les oreillers.
- D’accord, répondit-elle, sur la réserve. Qu’est-ce qu’il y a ?
- Eh bien..., commença Eva en se tordant nerveusement les doigts. Liz… je... oh bon sang, je ne sais même pas par où commencer, soupira-t-elle en se passant une main dans les cheveux. Des excuses seraient un bon début, hein ? J’ai été horrible avec toi depuis..., bref, depuis le début, et j’en suis sincèrement désolée. Tu as toujours été là pour moi et je n’ai fait que te repousser…
Liz tenta de l’interrompre en levant une main mais elle manqua subitement de tomber à la renverse lorsque le hamac bascula sous elle. Deux bras vinrent aussitôt l’entourer et elle releva la tête, surprise, pour se retrouver aussitôt capturée par deux yeux noisette qu’elle affectionnait tant. Le temps sembla s’arrêter autour d’elles et elles restèrent ainsi, comme paralysées, avant que Liz ne murmure enfin :
- Tu veux bien t’installer à côté de moi ? demanda-t-elle, pleine d’espoir. S’il te plaît ? ajouta-t-elle lorsqu’elle vit Eva hésiter.
Elle se doutait qu’Eva désirait mettre de la distance entre elles afin d’avoir la force de pouvoir dire ce qu’elle avait sur le cœur, mais Liz en avait marre de cette distance, justement. Elle s’était installée entre elles, avait fait son nid, et ne semblait plus vouloir les laisser tranquilles. La proximité qu’elles échangeaient à présent s’était faite cruellement rare dans leur vie, et cela lui manquait plus que tout.
Il est grand temps que ça s’arrête.
- Ce sera plus simple pour discuter, continua-t-elle. Et puis..., je ne mords que si tu me le demande.
Le sourire qu’elle espérait apparut aussitôt et elle s’écarta légèrement lorsqu’Eva vint la rejoindre.
- Tu ne demandes pas toujours, rétorqua cette dernière malgré l’angoisse qui lui serrait le ventre.
- C’est vrai, admit Liz avant de prendre à nouveau un ton taquin. Mais c’est uniquement parce ce que ton corps tout entier me hurle de le faire.
Eva sourit faiblement et elles s’allongèrent de profil de manière à être l’une en face de l’autre, leurs doigts venant doucement se frôler, hésitant, avant de s’entrelacer. Liz lui sourit timidement avant de parler :
- Tu n’as pas à t’excuser, Eva, reprit-elle d’un ton sérieux.
Eva secoua aussitôt la tête pour l’arrêter.
- Si, ma tristesse n’excuse pas tout, Liz, souffla-t-elle en se rapprochant légèrement. Je ne suis pas la seule à avoir perdu un enfant ; tu l’aimais autant que moi, et je n’ai vu que ma propre souffrance. Et, pire que tout, j’ai refusé ton aide et, faisant cela, je t’ai fait souffrir encore plus.
Elle avala difficilement avant d’ajouter :
- Alors que tu avais besoin de moi.
- Ce n’est pas pour autant que tu dois t’en vouloir, Eva, lui murmura sincèrement Liz alors qu’elle soupirait intérieurement de soulagement d’entendre ses paroles. Je ne t’en veux pas, j’ai toujours compris pourquoi tu réagissais ainsi.
Eva lui offrit un regard perplexe :
- Liz, je t’en prie. Je t’ai fait souffrir, ne dis pas le contraire.
Liz secoua frénétiquement la tête avant de venir l’embrasser sur le front.
- Non, souffla-t-elle. Ce qui m’a fait mal, c’est de te voir souffrir autant. Que tu me repousses est une réaction naturelle dans ce genre de situation.
- Naturelle ? s’étonna Eva avant de se mordre la lèvre. Liz..., tu trouves naturel d’être égoïste quand on souffre ?
- C’est un moyen de se protéger, alors oui... c’est une réaction naturelle, lui répondit Liz avant de s’interrompre, les sourcils légèrement froncés. Mais on a tout à construire, Eva. Je sais que tant que tu seras à mes côtés, j’en aurai la force.
Elle perçut aussitôt les larmes qui apparaissaient de nouveau dans le regard d’Eva, et elle attira sa tête contre sa poitrine avant de la serrer fort contre elle.
- Shh, murmura-t-elle d’une voix apaisante lorsque les premiers sanglots lui parvinrent.
Elle sentit Eva lui rendre son étreinte, et elle fut surprise de constater qu’en dépit de la douleur qu’elle ressentait à voir Eva aller aussi mal, elle éprouvait aussi un bonheur sans nom à la voir revenir vers elle. Ses yeux s’embuèrent, et elle attendit patiemment qu’Eva se calme avant de s’écarter légèrement, puis saisir doucement son menton afin de lui relever la tête.
Elle parla à travers sa gorge nouée :
- Eva, amour, je peux tout supporter, sauf de te perdre. Ces derniers jours… j’ai eu peur que tu me fermes la porte au nez à tout jamais, et que tu ne retrouves jamais l’envie de vivre, même à mes côtés. J’ai... j’ai eu peur que ma présence te rappelle trop le bébé qu’on a perdu.
- Tout me le rappelle, renifla aussitôt Eva d’un air désespéré. Mais… j’ai compris qu’il fallait que j’accepte l’idée que jamais nous ne l’oublierons, et que j’allais devoir apprendre à vivre ainsi.
- Ensemble.
Eva acquiesça, un triste sourire sur les lèvres.
- Crois-moi, je n’y arriverai pas sans toi, Liz.
- Tant mieux, répondit Liz dans un sourire ému. Je serai toujours là pour toi, Eva. Je ferai tout pour te rendre heureuse à nouveau, je te le promets.
Eva ferma un instant les yeux, de nouveau gagnée par l’émotion, avant de les rouvrir.
- Uniquement si tu retiens que je suis là pour toi aussi.
- Marché conclu, acquiesça Liz dans un faible rire de soulagement.
Eva vint de nouveau se blottir dans ses bras et, après quelques minutes d’une étreinte mêlant réconfort et soulagement de retrouver l’autre, elle ressentit le sommeil la gagner, épuisée par les évènements. Collée tout contre Liz, elle retrouva cet effet apaisant que cette dernière avait toujours eu sur elle et elle se demanda un instant comment elle avait bien pu faire pour oublier à quel point Liz effaçait toujours ses peurs et appréhensions. Confortablement installée sous son menton, elle laissa ses paupières se fermer et s’endormit dans ses bras sans même s’en rendre compte.
Le son de sa respiration profonde lui parvint et Liz devina qu’Eva avait rejoint le pays des rêves. C’était bien. Ses nuits étaient légèrement agitées et rares étaient les fois où elle parvenait à enchaîner plusieurs heures de sommeil. Elle s’apprêtait à s’accorder quelques minutes de repos elle aussi lorsqu’elle entendit les doubles portes menant sur le balcon glisser légèrement. Elle leva les yeux pour croiser ceux souriant d’Emma.
- Ça fait plaisir, de vous voir comme ça.
Liz se sentit rougir légèrement.
- Je ne vais pas te contredire la dessus, acquiesça-t-elle avant d’essayer de voir par-dessus son épaule. Kate n’est pas avec toi ? ajouta-t-elle, inquiète.
- Elle est dans le salon, répondit Emma d’un ton rassurant. J’aimerais vous parler à toutes, mais si Eva dort...
- ‘suis réveillée, marmonna Eva, la voix endormie avant de se redresser.
Elle se frotta les yeux tout en baillant à s’en décrocher la mâchoire.
- Je suis réveillée, répéta-t-elle plus clairement tout en se levant, ne lâchant pas la main de Liz alors que cette dernière descendait à son tour du hamac. Ouvre la marche, on te suit.
Emma secoua légèrement la tête, amusée et attendrie, avant de prendre la direction du salon. Lorsqu’elles pénétrèrent dans la pièce, Kate leva aussitôt les yeux vers elles avant de s’arrêter sur les mains liées d’Eva et Liz. Emma sut exactement quelles pensées traversaient son esprit ; de la joie et du soulagement, car elle savait qu’ensemble, elles ne tarderaient pas à reprendre goût à la vie.
Elle prit place sur l’accoudoir du fauteuil dans lequel Kate était assise et s’empara aussitôt de sa main, son autre bras venant encercler son cou. Elle attendit ensuite qu’Eva et Liz s’installent sur le canapé, puis, une fois sûre d’avoir leur attention, elle ouvrit la bouche afin de prendre la parole lorsque le bruit de la porte d’entrée leur parvint, rapidement suivit d’une voix forte :
- Bon, où est ma maitresse, que je vienne l’embrasser avant de filer prendre mon avion !
Emma grimaça, sentant Kate se figer aussitôt alors qu’Eva et Liz haussaient les sourcils, surprises.
- Oh bon sang, gémit Eva en se couvrant le visage de ses mains. Vous le voulez vraiment ce triangle amoureux, c’est pas possible.
Kate lui lança un regard noir et elle feignit un air innocent avant de tourner la tête vers Cassie lorsqu’elle apparut dans la pièce, une petite tête blonde entre ses bras.
Cassie les observa tour à tour avant de s’arrêter sur Kate, son visage prenant aussitôt un air dépité face à celui distant de Kate :
- Awww, quoi, on rompt déjà ? gémit-elle avant de plisser les yeux lorsqu’elle nota sa main liée à celle d’Emma. Et pour la même fille qu’à l’époque, en plus. Décidément, je suis maudite, ajouta-t-elle en se laissant retomber dans le fauteuil le plus proche. Heureusement que je t’ai ma puce, tu ne m’abandonnerais pas toi, hein ? ajouta-t-elle en direction de sa fille alors qu’elle lui retirait son bonnet blanc.
Sa phrase fut à peine terminée que la petite descendit de ses genoux pour aller sauter dans ceux d’Eva en lâchant un « tata ! » enthousiaste, provoquant le rire de tous.
Cassie couvrit son visage de ses mains.
- Laquelle d’entre vous m’achève ?
- Tu me l’aurais demandé six ans plus tôt, je t’aurais dit oui volontiers, taquina Emma.
Cassie plissa des yeux avant de reporter son attention sa fille.
- Zoé, mon cœur, qu’est-ce qu’on a dit au sujet des chaussures sur le canapé ? dit-elle d’une voix typiquement maternelle.
Zoé leva aussitôt les deux pieds en l’air, poussant la robe qu’elle portait à remonter subitement et Cassie se couvrit les yeux avant de pointer un doigt vers Emma.
- Ne va certainement pas dire qu’elle tient de moi cette fois-ci, prévint-elle, un sourcil haussé.
Emma ricana, mimant une fermeture éclair de ses doigts avant de jeter la clé imaginaire par-dessus son épaule. Cassie leva les yeux au ciel.
- Allez viens, princesse, dit Eva en installant Zoé sur ses genoux, la débarrassant de ses chaussures avant de venir tresser de nouveau ses nattes que le bonnet avait légèrement décoiffées. Elle a des boucles d’oreilles ? s’étonna-t-elle soudainement en relevant les yeux vers Cassie. A quatre ans ? Woah.
Cassie soupira.
- Ce sont des fausses.
- Des fausses ? répéta Liz, dubitative alors qu’elle observait les boucles de plus près. Ça m’a l’air plutôt réaliste.
- Ce sont des vraies, reprit Cassie en levant les yeux au ciel. Ce que je voulais dire, c’est que ses oreilles ne sont pas percées ; ce sont des boucles à clip. Zoé n’est pas du genre capricieux, mais lorsque ma belle-mère lui a mis l’idée en tête...
- Elle a oublié qu’elle n’avait que quatre ans ? lâcha Emma, incrédule.
Cassie soupira de soulagement.
- Ravie de voir que je ne suis pas la seule à penser qu’elle est trop jeune pour ça. Mais selon ma belle-mère, si elle n'a pas de boucles d'oreilles, ce n'est pas une fille. Je l’adore, mais parfois... Bref, je préfère attendre qu’elle soit plus grande, et réellement capable d’en prendre la décision elle-même.
- Tu as raison, acquiesça Eva en venant embrasser la joue de Zoé. Elles sont toutes mignonnes en plus, des petites grenouilles, ajouta-t-elle en lui chatouillant les côtes.
Zoé rit aussitôt en remuant sous les assauts et Cassie les observa, attendrie, avant de porter son attention sur Kate qui était restée étonnamment silencieuse depuis son arrivée. Un air absent sur le visage, sa joue reposait contre la tête d’Emma qui avait glissé sur ses genoux. Ses bras quant à eux l’encerclaient dans une étreinte possessive, comme si elle avait peur qu’elle disparaisse soudainement.
Cassie se mordit la lèvre alors qu’elle croisait le regard d’Emma :
- Laisse-moi deviner, je suis arrivée trop tôt ? grimaça-t-elle.
Emma retint un sourire tout en hochant légèrement la tête. Le mouvement fit sortir Kate de sa torpeur, et elle observa Cassie à son tour.
- Bon, maintenant que tu es là, vous allez pouvoir m’éclairer, dit-elle alors que l’impatience la gagnait de plus en plus.
- J’avoue que l’on aimerait bien un petit éclaircissement nous aussi, enchaîna Eva dont le regard ne cessait de passer alternativement d’Emma à Cassie, Zoé somnolant à présent contre son épaule.
- Ca va venir, répondit Cassie avant de se pencher légèrement vers Kate. Mais avant... Kate, si on avait...
Elle se rappela soudainement la présence de sa fille et elle fit signe à Liz de lui couvrir les oreilles.
Zoé fronça aussitôt les sourcils tout en essayant de se dégager avant de se laisser faire lorsqu’elle sentit Eva l’embrasser sur le front avant de lui offrir un sourire rassurant.
Cassie ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel. Zoé aimait tellement Eva que cette dernière pouvait lui faire faire n’importe quoi. Heureusement pour moi, elle n’en abuse pas.
- Je disais donc, Kate, si on avait couché ensemble... tu t’en souviendrais, sourit-elle dans un clin d’œil. Pour le reste, ta femme est définitivement une petite malicieuse.
Kate lui offrit aussitôt un regard confus.
- Hein ?
💕
Arcadie, la capitale. Le matin même.
Lorsqu’Emma ouvrit les yeux, la première chose qu’elle aperçut fut les diodes rouges du réveil qui vinrent agresser sa rétine. Un grognement s’échappa aussitôt de ses lèvres et elle enfonça son visage dans l’oreiller avant de se tourner de l’autre côté. Le visage de Kate lui apparut aussitôt et elle sentit un sourire se dessiner sur ses lèvres alors qu’elle la regardait. Son air serein et ses cheveux légèrement en bataille la rendaient infiniment craquante.
Elle jeta de nouveau un œil au réveil et réalisa qu’il était 07h14. Il était encore tôt, surtout pour un lendemain de soirée et encore plus pour un dimanche matin, mais elle savait que Cassie avait un avion à prendre et elle ne voulait pas abuser de son hospitalité.
Après un léger baiser sur le front de Kate, elle se glissa discrètement hors des couvertures puis enfila un peignoir avant de quitter la chambre. Elle fit un petit tour plus qu’indispensable aux toilettes, puis prit la direction de la cuisine et s’arrêta dans l’entrée lorsqu’elle y retrouva Cassie, vêtue d’une simple serviette de bain enroulée autour de son corps et une autre autour de sa tête.
- Mince, et moi qui voulais préparer le petit déj, tu m’as devancée, mentit-elle dans un sourire tout en s’appuyant contre le chambranle.
Cassie lui jeta un rapide coup d’œil avant de reporter son attention sur les oranges qu’elle pressait.
- Bien sûr, quel dommage, hein ? sourit-elle. Le café est en route pour notre marmotte nationale, j’ai du chocolat chaud aussi, et il y a également du thé, si tu veux.
- Un thé sera parfait, répondit Emma en allant se servir. Tu as besoin d’aide pour quelque chose ?
Cassie se mordilla la lèvre tout en regardant autour d’elle.
- Tout dépend de ce qui vous fait envie. Je me contente d’un verre de jus d’orange et de rondelles de bananes dans un bol de lait. Mais j’ai des céréales, des toasts...
- Ce sera parfait, la coupa Emma alors qu’elle enclenchait la bouilloire puis fouillait dans les placards. Je m’en occupe, t’embête pas. J’irais réveiller Kate quand ce sera prêt.
Cassie lâcha un rire.
- Prévois plutôt le remède contre la gueule de bois, elle va avoir une jolie migraine.
- Je sais, grimaça Emma. Elle n’a jamais supporté le champagne, je ne sais pas trop ce qui lui est passé par la tête hier soir.
- Besoin de décompresser, sûrement. La soirée a été forte en émotions pour elle.
Emma hocha doucement la tête alors qu’elle étalait du beurre sur deux tranches de pain.
- Hmm. Et si elle compte laisser sa mère entrer de nouveau dans sa vie, j’ai bien l’impression que ça n’est pas prêt de se terminer.
- Mais tu seras là pour elle, enchaîna Cassie dans un clin d’œil. Comme tous les gens pour qui elle compte. Tiens, goûte moi ça, fraichement pressé ; le petit déjeuner des champions.
Emma s’empara du verre de jus d’orange et le porta à ses lèvres.
- Mmh, excellent. Gardes-en pour Kate.
- Le pichet est plein, mais je doute qu’elle réussisse à en avaler.
Elle prit place sur l’un des hauts tabourets entourant la table puis releva soudainement la tête vers Emma.
- Hé, il n’est même pas huit heures, qu’est-ce que tu fais déjà debout au fait ?
- Tu as un avion à prendre, non ? demanda Emma, confuse, alors qu’elle versait l’eau bouillante dans sa tasse avant d’y plonger le sachet de thé. Et puis, on n’a pas envie de trop s’imposer. C’était déjà très gentil de ta part de nous héberger.
Cassie leva les yeux au ciel.
- Tu aurais dû dormir aussi longtemps que tu le voulais, bêta. Vous êtes ici chez vous. Ça me fait plaisir de vous avoir à la maison. Surtout étant donné qu’avec la distance, on ne se voit pas beaucoup.
- C’est vrai, acquiesça Emma. Mais, et ton avion ?
- Hmm ? Oh, j’ai encore le temps, j’ai choisi un vol de nuit. Ça me permettra de dormir, je m’ennuie sinon.
Emma plissa des yeux.
- Alors pourquoi est-ce que toi, tu es déjà levée, et même douchée, alors qu’il n’est pas encore huit heures ?
- Je dors mal sans la présence de mes amours, répondit aussitôt Cassie dans un grand sourire. Puis j’ai encore mes valises à faire. Je m’y prends toujours au dernier moment, grimaça-t-elle.
- Besoin d’aide ? demanda Emma tout en venant mordre dans sa tartine.
Cassie secoua la tête et attendit d’avoir avaler avant de répondre.
- Merci, mais non, ça ira. Tu as une grosse marmotte dont tu dois t’occuper, taquina-t-elle.
Emma leva les yeux au ciel.
- En parlant de ça, je ferais bien d’aller la réveiller.
Cassie s’apprêtait à répondre lorsqu’une tornade blonde pénétra dans la cuisine, un « maman ! » infini s’échappant de ses lèvres. Surprise, elle sauta aussitôt de son tabouret et écarta les bras pour la recevoir.
- Hé ma petite puce ! Qu’est-ce que tu fais là ? demanda-t-elle alors que son regard empli d’inquiétude se posait sur son frère qui pénétrait à son tour dans la pièce. Jérôme ? ajouta-t-elle tout en regagnant sa place, sa fille entre ses bras.
- Elle va bien, la rassura-t-il en se frottant les yeux. Elle s’est réveillée à cinq heures et n’a cessé de demandé à te voir depuis ; elle ne voulait pas te louper avant ton départ.
Cassie soupira tout en venant embrasser la tête blonde.
- Je t’avais pourtant dit que je viendrais passer du temps avec toi mon cœur, répondit-elle avant de hausser les sourcils lorsque Zoé l’ignora au profit des rondelles de bananes flottant dans son bol de lait. Eh, forcément, ma nourriture t’intéresse plus que moi, hein ? Petite coquine, ajouta-t-elle en la chatouillant légèrement, produisant aussitôt un éclat de rire qui comme toujours lui réchauffait le cœur.
- Elle est surtout rassurée d’être enfin dans tes bras, bailla son frère avant de venir s’emparer de l’une des tartines d’Emma après l’avoir saluée.
Cette dernière haussa aussitôt les sourcils sans le lâcher du regard.
- C’était mon déjeuner, Jérôme.
- Ah ? Il est délicieux, sourit-il, carnassier.
- Jérôme ? répondit Cassie sans lever les yeux vers lui. Kate est dans la chambre d’ami.
Son sourire s’effaça aussitôt et il reposa la tartine qu’il venait de prendre tout en marmonnant entre ses dents. Emma haussa de nouveau les sourcils avant de sourire malicieusement.
- Alors là, je veux que tu m’expliques ça.
Cassie sourit à son tour en levant les yeux vers elle.
- Ça remonte à l’époque où Kate et moi étions ensemble. Jérôme était une vraie tête dure, il l’a cherché, et...
Elle recouvrit les oreilles de sa fille avant d’ajouter :
- Kate lui a répondu par un bon coup de genoux entre les jambes suivit d’un poing dans le nez. Il ne l’a plus jamais embêtée depuis. Pourtant, quand on sait qu’il revient de l’armée maintenant...
Emma se mit à rire, ça ressemblait bien à Kate ça, avec son caractère bien trempé, que rien ne semblait impressionner. Elle vint mordre dans sa tartine tout en le charriant, mais Jérôme se contenta de plisser des yeux avant de venir embrasser Zoé dont la tête reposait à présent conte l’épaule de Cassie, son pouce entre ses lèvres.
- On ne pense pas bouger de la journée, dépose là quand tu veux. On appellera si jamais nos plans changent, ajouta-t-il avant de venir embrasser sa joue.
- Je note, répondit Cassie en l’embrassant à son tour. Merci.
Jérôme lui fit un clin d’œil avant de venir embrasser Emma puis quitter la pièce.
- On ? demanda aussitôt Emma. Il est casé ?
- Curieuse, la taquina Cassie avant de reprendre son sérieux. Elle s’appelle Sarah, elle était sa psychologue.
- Sa psy ? s’étonna Emma.
Le visage de Cassie s’assombrit.
- L’armée ne l’a pas épargné, tu sais, dit-elle tristement. Cauchemars, flashs, crises de panique... elle l’a beaucoup aidé, et de fil en aiguille... Elle a arrêté de s’occuper de lui avant que ça n’aille plus loin que la simple relation médecin-patient. Ca fait bientôt un an qu’ils sont ensemble maintenant.
- C’est plutôt sérieux alors.
- Hmm. Il est toujours suivi par le psychologue qui a pris la révèle, mais je pense que c’est elle qui continue à vraiment l’aider. Il va beaucoup mieux aujourd’hui, tu l’aurais vu à son retour... il n’était plus que l’ombre de lui-même. Je suis vraiment contente qu’il l’ait trouvé.
- L’amour est un bon médicament, hein ? sourit Emma.
Cassie retrouva sa bonne humeur.
- Et comment. En parlant de ça, allons réveiller la marmotte. Hein, ma puce ? ajouta-t-elle en venant embrasser la joue de Zoé alors qu’elle glissait une rondelle de banane dans sa bouche.
- Justement..., commença Emma. Tu devrais y aller.
Cassie releva la tête, confuse.
- Hmm..., j’ai dû louper un épisode, là.
Emma se pencha et lui murmura à l’oreille. Se redressant, elle ajouta :
- Ca lui apprendra d’abuser du champagne à s’en rendre malade, sourit-elle.
- Oh tu es diabolique, répondit Cassie, le regard brillant. Remarque, je le savais déjà. Je me souviens d’une certaine boite de nuit, et d’une danse assez collée serrée...
- Tcht, l’admonesta Emma tout en s’emparant de Zoé. Il est des choses qu’il est bien de garder sous silence. Maintenant file, on a à discuter, ta fille et moi.
Cassie afficha un air boudeur avant de plisser des yeux.
- Et de quoi ? demanda-t-elle en cédant sa place, amusée de voir que Zoé ne lâchait pas son bol des yeux et tendait de nouveau une main vers les fruits.
- Il faut bien qu’elle apprenne un jour qu’elle genre d’adolescente était sa mère, non ? taquina Emma.
Cassie remua un doigt sous son visage.
- La piste de danse te pend au nez, ma belle, feignit-elle de menacer avant de soupirer. Zoé, mon cœur, si tu as faim tu le dis.
- Non, répondit Zoé avant d’enfourner une nouvelle rondelle de banane.
Cassie leva les yeux au ciel.
- Je suis sûre que Jérôme lui a donné son petit déjeuner, mais visiblement, elle m’a l’air d’avoir encore de l’appétit. Tu veux bien t’en occuper pour moi ?
Emma hocha la tête.
- Pas de soucis. Elle prend quoi ?
- Prépare lui la même chose que moi, un bol de lait chaud avec des rondelles de bananes. Mais ajoute des céréales. Hein, mon cœur ?
- J’ai pas faim, sourit Zoé en prenant une nouvelle bouchée.
Emma ricana.
- Elle n’a pas uniquement hérité de ton apparence, taquina-t-elle, riant à nouveau lorsque Cassie lui tira la langue. Je m’en occupe. Maintenant, bouge-moi tes jolies petites fesses et file !
- Merci et… Hein ? Tu as dit quoi au sujet de mes fesses ?
Emma leva les yeux au ciel.
- C’est une expression Cass’, pas la peine de prendre cet air outré ! File !
- J’y vais, j’y vais ! se plaignit Cassie en s’éloignant. Quelle rabat-joie.
💕
Cassie colla son oreille contre le battant avant d’ouvrir la porte lorsqu’elle entendit la respiration profonde de Kate. Elle se glissa rapidement dans la pièce puis referma doucement derrière elle avant de venir prendre place sur le rebord du lit, près des oreillers.
Son regard tomba sur le visage de Kate, et elle ne put s’empêcher de l’observer d’un air compatissant. Elle n’était pas une grande consommatrice d’alcool, de temps en temps, lors de soirées ou d’événements, histoire de marquer le coup. Mais comme la plupart des gens, elle avait elle aussi, à un moment ou un autre, expérimenté la gueule de bois.
Un sentiment de sympathie s’empara d’elle mais elle le repoussa. Ce qu’elle comptait faire n’était pas méchant. Loin de là. Juste un peu de taquineries pour une femme qui aurait dû s’abstenir de s’abreuver d’un liquide qu’elle savait ne pas supporter.
Sa main glissa sur l’épaule dénudée de Kate et elle est dessina des arabesques invisibles du bout des doigts. Elle ne fut pas surprise lorsque Kate remua légèrement tout en marmonnant quelque chose d’incompréhensible. Repoussant le rire qui montait de sa gorge, Cassie recommença à nouveau tout en appelant doucement.
- Kate... réveille-toi...
L’épaule bougea de nouveau, puis Kate s’installa plus confortablement contre son oreiller avant de murmurer :
- Hmm ?
Cassie remonta sa main vers sa joue et la frôla de ses doigts tout en appelant de nouveau.
- Kate...
Elle vit les sourcils remuer légèrement, puis, après quelques battements de cils, un œil brun lui apparut. Elle sourit tout en glissant une mèche brune derrière son oreille.
- Ravie de te revoir enfin parmi le monde vivant, mon cœur, murmura-t-elle en venant embrasser son front. Tu as bien dormi ? ajouta-t-elle en se redressant.
Cassie retira la serviette qui entourait sa tête et commença à se sécher les cheveux tout en l’observant sans se départir de son sourire. Kate laissa un deuxième œil brun apparaitre avant relever la tête et regarder autour d’elle. Lorsque son regard croisa de nouveau le sien, Cassie fronça légèrement les sourcils.
- Laisse-moi deviner, mal de tête, hein ?
Kate cligna des paupières avant de répéter :
- Mon cœur ?
Cassie s’interrompit et vint de nouveau poser sa main sur sa joue.
- Ou mon amour. Mon ange. Ma chérie, énuméra-t-elle en la caressant de son pouce. Tu as toujours préférée « mon amour ». Tu veux quelque chose pour ta tête ? demanda-t-elle en venant s’occuper de nouveau de ses cheveux.
Elle vit Kate laisser son regard glisser sur son corps avant de baisser la tête vers le sien, soulevant légèrement la couverture avant de la rabaisser rapidement. Elle s’assit précipitamment en tailleur.
- Je suis complètement nue, lâcha-t-elle en se passant une main nerveuse dans les cheveux.
- Ah ça, tu l’es très certainement, répondit Cassie d’un air appréciateur. J’y ai particulièrement veillé, ajouta-t-elle en laissant un regard appréciateur courir sur la peau nue qu’elle pouvait apercevoir.
Kate suivit son regard et remonta la couverture jusqu’à son cou avant de couvrir son visage de ses mains.
- Oh bon sang, je ne me souviens de rien.., lâcha-t-elle dans un souffle tout en se balançant légèrement d’avant en arrière. Qu’est-ce que j’ai fait... mais qu’est-ce que j’ai fait...
Ses doigts vinrent appuyer sur ses tempes et Cassie décida de mettre fin à son supplice. Elle voulait certes jouer un peu, mais elle n’était pas sadique non plus. Et elle était loin d’imaginer que Kate marcherait autant. Elle tendit une main, mais Kate se leva soudainement du lit et s’éloigna à toute vitesse vers la porte.
Elle écarquilla les yeux.
- Woah. Ne vomis pas avant d’être arrivée aux toilettes ! hurla-t-elle alors que Kate troquait la couverture pour un peignoir puis s’élançait dans le couloir. La pauvre, elle va passer une mauvaise journée, grimaça-t-elle en se levant à son tour. Il n’y a rien de pire que la gueule de bois.
Elle retrouva Emma dans la cuisine et sourit lorsqu’elle la vit en train de jouer avec Zoé. Elle prit appui contre le chambranle et les observa un instant.
- Who stole the cookie from the cookie jar? chantait Emma alors que Zoé tapait dans ses mains, un grand sourire sur les lèvres et les yeux brillants.
- Emma ! s’exclama cette dernière.
- Emma stole the cookie from the cookie jar, reprit Emma avant d’afficher un air surpris. Who, me ? demanda-t-elle.
Zoé lâcha un rire tout en hochant la tête.
- Yes you ! s’exclama-t-elle.
- Couldn’t be !
- Then who ? répondit Zoé en posant ses mains sur ses hanches.
Emma vint lui chatouiller le ventre.
- Zoé stole the cookie from the cookie jar, taquina-t-elle avant de s’interrompre lorsqu’elle aperçut Cassie. Hé.
- Elle ne maîtrise même pas encore entièrement sa langue maternelle que tu lui apprends déjà l’anglais, répondit Cassie en faignant un air exaspéré.
- C’est un bon moyen de devenir bilingue facilement, hein, princesse ? répondit Emma en frottant le nez contre le sien.
Son accent était bien sûr loin d’être parfait, mais Zoé se montrait plutôt avancée pour son âge.
Cassie sourit.
- Tu peux en avoir une rien qu’à toi si tu le veux, tu sais, taquina-t-elle à moitié.
Emma rougit légèrement.
- Dis pas de bêtises.
- En quoi vouloir un enfant serait une bêtise ? demanda Cassie en s’approchant. Ma fille t’a bien conquise, elle, ajouta-t-elle en posant les mains autour de la taille de Zoé, la laissant prendre appui contre son ventre alors qu’elle continuait à jouer avec Emma.
- Cassie... il passerait son temps chez la nourrice, et ça, non merci. Et puis, après ce qu’Eva et Liz ont dû traverser, ça refroidit pas mal.
Le visage de Cassie quitta son air taquin pour s’adoucir ostensiblement.
- J’avoue. Perdre sa progéniture est la pire chose qui puisse arriver à quelqu’un. Même avant qu’elle n’ait eu le temps de pointer le bout de son nez. Mais... c’est comme les accidents de voitures, on sait que ça existe, pourtant, on conduit quand même. Sinon on ne vivrait plus. Il ne faut surtout pas s’arrêter là-dessus.
Elle sourit de nouveau en caressant les cheveux de Zoé :
- Donner la vie est un cadeau inestimable, crois-moi.
Emma l’observa à travers ses sourcils.
- Tu essayes de me convaincre ? sourit-elle.
- Non, répondit Cassie. Peu importe ce que tu me réponds, je sais que l’idée est là, dit-elle en tapotant légèrement sa tête de son doigt, et qu’elle fait son tour...
Emma secoua la tête, amusée.
- D’accord, je reconnais y avoir déjà réfléchi.
- Ah, tu vois, enchaîna aussitôt Cassie, fière d’elle.
- Chut, l’admonesta Emma avant de poursuivre. Ce n’était pas difficile en même temps, entre toi qui nous as apporté cette petite princesse, dit-elle en frottant son nez contre celui de Zoé, provoquant de nouveau un rire. Et Eva et Liz..., ça nous a été impossible de ne pas y penser nous aussi.
- Et ? insista Cassie, impatiente.
Emma se sentit rougir de nouveau.
- Eh bien, on l’envisage. Mais pas pour tout de suite. Kate vient d’entamer son DES en chirurgie, elle en a encore pour cinq ans avant d’être diplômée, et elle est plutôt débordée. Quant à moi, je viens tout juste de commencer à enseigner, alors...
- Hmm, je comprends. Envie d’avoir une vie stable et bien rangée avant d’envisager agrandir la famille, hein ?
Emma hocha la tête et Cassie sentit son sourire s’agrandir.
- Ma petite puce à deux tatas ultra sérieuses qu’elle va pouvoir garder rien que pour elle pendant encore quelques années, alors.
Emma éclata aussitôt de rire.
- T’es bête. En parlant de la tata, où est-elle ?
Cassie ouvrit la bouche pour répondre lorsque la porte d’entrée claqua derrière elle. Surprise, elle se retourna aussitôt et fronça les sourcils avant de retourner dans la chambre d’amis, Emma sur ses talons.
- Elle est partie ? s’étonna Emma en actionnant l’interrupteur avant d’entrer dans la pièce.
Son regard tomba sur leurs valises et elle comprit aussitôt qu’elle avait vu juste ; cette dernière était ouverte et des vêtements étaient éparpillés autour d’elle.
Cassie se confondit aussitôt en excuse lorsqu’elle se tourna vers elle :
- Emma, je suis vraiment désolée. Je ne pensais pas...
- C’est rien, répondit Emma en lui tendant Zoé. Je suis celle qui en a eu l’idée, non ?
Cassie serra sa fille contre elle tout en affichant un air coupable.
- Si j’avais su...
- T’en fais pas Cass’, vraiment. L’important pour l’instant, c’est de la retrouver. Je ne me le pardonnerais jamais s’il lui arrivait quelque chose.
Sur ces paroles, Emma réunit quelques vêtements puis quitta la pièce à son tour.
- Merd... er... mince, se rattrapa Cassie en suivant Emma qui s’était réfugiée dans la salle de bain.
Elle s’arrêta devant la porte légèrement entrouverte.
- Tu as une idée d’où elle a pu aller ?
Des bruits de vêtements lui parvinrent avant que la voix d’Emma ne se fasse entendre :
- Les connaissances que l’on a à Arcadie sont assez limitées ; je ne vois qu’une personne chez qui elle se réfugierait.
- Hmm. Eva.
- Tata ! s’exclama aussitôt Zoé en relevant la tête avant d’étouffer un bâillement.
Emma et Cassie ne purent retenir un rire.
- Tata oui, et toi, petite coquine, dit-elle en venant embrasser sa joue, tu vas retourner au dodo. Tu m’as l’air exténuée.
- Non ! répondit aussitôt Zoé en ouvrant grands ses yeux bleus comme pour prouver son point.
Emma ouvrit complètement la porte et vint embrasser la joue de Zoé avant de retourner devant le lavabo.
- Elle tient définitivement de toi, sourit-elle avant de se passer de l’eau sur le visage.
- Mon mari n’est pas un ange non plus, hein, marmonna Cassie en berçant sa fille d’un léger mouvement du bassin.
Emma lâcha un rire alors qu’elle s’essuyait le visage. Elle arrangea ensuite ses cheveux puis se tourna vers Cassie.
- J’aurais adoré une douche, mais ça devra faire l’affaire pour le moment. Ça va ? Je ne risque pas d’effrayer la moitié de la ville ?
- Non, Kate s’en est déjà chargée, taquina Cassie avant de venir l’embrasser sur la joue. Tu es parfaite, file retrouver ta douce.
Emma soupira.
- Merci, répondit-elle en retournant vers la chambre. Si elle appelle –
- Je te préviens aussitôt, répondit Cassie en la suivant.
Elle s’installa sur le lit alors qu’Emma enfilait sa veste et s’emparait de son sac à main.
- Je suis sûre qu’elle va bien, Emma. Essaye de ne pas trop t’inquiéter.
- Plus facile à dire qu’à faire, répondit cette dernière en sortant ses clés avant d’attraper leurs valises. Elle n’a pas pris la voiture, au moins. Même si je ne sais pas si c’est censé me rassurer ou non.
Cassie se redressa et prit sa main dans la sienne tout en retenant Zoé de l’autre, désormais endormie contre son épaule.
- Je suis sûre qu’elle a pris un taxi, et qu’à l’instant même, elle est chez Eva et Liz. J’essaye de les joindre, concentre toi sur Kate, d’accord ? Je t’appelle dès que j’ai des nouvelles.
Emma prit une profonde inspiration qu’elle relâcha doucement.
- D’accord, acquiesça-t-elle en hochant la tête. Merci Cass’, tu es géniale.
- Je n’ai pas vraiment l’impression de l’être pour l’instant, grimaça cette dernière. Mais tu peux toujours compter sur moi. Aller, file.
Emma l’embrassa à nouveau puis caressa légèrement le dos de Zoé avant de quitter la pièce d’un pas rapide.
- Croise les doigts pour moi ! cria-t-elle par-dessus son épaule.
- Promis ! répondit Cassie avant de venir embrasser la tête de Zoé. On va même croiser les orteils, hein ?
💕
- Tout ça... pour une histoire de champagne ? lâcha Kate, incrédule, alors que son regard passait de l’une à l’autre.
Cassie évita son regard et lorsqu’elle observa Emma, cette dernière fixait ses mains qu’elle tordait nerveusement.
- Non mais qu’est-ce qui ne va pas dans vos têtes ?
- C’était une plaisanterie qui a mal tournée, tenta Eva dans l’espoir de détendre l’atmosphère. De mauvais goût, plutôt puérile, et qui aurait pu vraiment mal finir...
Elle remarqua le regard désapprobateur de Liz et elle se reprit :
- Mais qui se finit bien, sourit-elle. C’est le plus important, non ? Vous êtes ensemble, et l’histoire se finit bien.
Aucune réaction ne lui parvint et elle lâcha un profond soupir :
- Bon sang, vous êtes vraiment butées lorsque vous le voulez, hein ?
Cassie esquissa un petit sourire.
- Et c’est toi qui dis ça ? demanda-t-elle, provoquant les rires de chacune.
- Je suis la plus âgée, j’ai le droit, rétorqua Eva en lui tirant la langue.
- Oh bien, ton discours sur la maturité vient de tomber à l’eau, amour, rit Liz en la chatouillant légèrement dans les côtes.
Eva sursauta et s’empara des doigts inquisiteurs avant de reporter son attention sur Emma et Kate.
- Allez les filles, réconciliez-vous, sourit-elle doucement. Il y a pire dans la vie.
Emma et Kate relevèrent aussitôt la tête vers elle et lorsqu’Eva perçut leurs regards compatissants, elle leva les yeux au ciel.
- J’aurais dû la sentir venir, celle-là, marmonna-t-elle entre ses dents. Bon sang, les filles, je ne faisais pas référence à moi.
Emma fut la première à réagir et elle lui murmura un « désolée » avant de détourner le regard. Kate pour sa part, observa son épouse du coin de l’œil et elle ne put retenir un sourire. Après tout, elle savait que le malaise d’Emma venait de son appréhension face à sa réaction, et même si réaliser que la crainte qui lui avait noué l’estomac toute la journée n’était que le fruit d’une plaisanterie, le soulagement qu’elle ressentait de savoir que sa plus grande peur ne s’était pas réalisée balayait tout le reste.
Elle était trop heureuse pour en vouloir à qui que ce soit.
- Si je comprends bien, j’ai gagné une maitresse, alors ?
Emma releva aussitôt la tête et dévisagea Kate comme pour s’assurer qu’elle n’avait pas rêvé ces paroles. Elle remarqua aussitôt ses traits détendus, taquins même et elle se sentit sourire de soulagement avant de plisser des yeux.
- Jamais de la vie, répondit-elle, provoquant aussitôt une nouvelle tournée de rire.
Elle se sentit rougir légèrement mais n’eut pas le temps de s’en soucier que Kate l’attirait à elle avant de venir l’embrasser dans une infinie douceur.
- Bon, maintenant que tout ceci est réglé, dit Cassie en posant ses mains sur ses cuisses. Je vais pouvoir partir l’esprit tranquille. J’ai une petite princesse à déposer, en plus.
- Elle ne vient pas avec toi ? s’étonna Eva en détournant les yeux de Zoé.
- Non, on va passer tout notre temps entre réunions d’affaires, conventions et j’en passe. Elle resterait enfermée dans la chambre d’hôtel avec une nourrice, ce n’est certainement pas ce que je veux pour elle.
Eva sourit ; Cassie était définitivement différente de ceux du milieu dans lequel elle évoluait. Mais elle savait surtout que la jeune femme ne voulait pas reproduire les mêmes erreurs que ses parents – ou ceux de Kate en l’occurrence – avaient pu commettre avec elle. Cassie désirait offrir à sa fille une enfance la plus normale possible, malgré leur situation particulière. Elle devait bien s’avouer qu’elle l’admirait pour ça.
- Et puis elle a l’école, maintenant, poursuivit Cassie. Elle va rester chez mon frère.
- Oh.
Même si elle tenta de le cacher, Cassie n’eut aucun mal à apercevoir l’air de déception teinté de peine qui passa sur le visage d’Eva. Elle et Liz étaient celles qui gardaient Zoé à chaque fois qu’elle en avait besoin ; elle avait depuis le début désiré des visages familiers autour de sa fille, pas une succession de nourrices inconnues, et le choix s’était naturellement imposé. Mais son frère était de retour en ville, désormais, et avec le drame qu’Eva et Liz venaient de connaître... elle devait bien s’avouer qu’elle avait volontairement choisi de changer, cette fois-ci. Non pas par manque de confiance, mais parce qu’elle savait qu’elles avaient des blessures à panser. Chose peu évidente avec une enfant de quatre ans dans les parages.
- Tu vas pouvoir profiter de ton tonton pendant quelques jours alors, poursuivit Eva d’un ton taquin en chatouillant légèrement Zoé. Petite chanceuse.
- Arrête ! rit Zoé en asseyant d’attraper les mains inquisitrices. Mais je l’ai déjà vu, j’ai envie de rester ici maintenant, poursuivit-elle d’un air boudeur, les sourcils froncés et la lèvre inférieure légèrement ressortie.
Emma se mit à rire.
- Quand je dis qu’elle te ressemble, regarde son adorable petite bouille ; tu as la même quand tu boudes.
- Hmm, moi j’ai surtout envie de voir comment elle va se sortir de ce pétrin, enchaîna Kate, un sourire moqueur sur les lèvres.
Cassie plissa des yeux dans leur direction et se retint de justesse de tirer la langue, elle reporta son attention sur Zoé.
- Zoé, mon cœur, tu viens voir maman deux minutes s’il te plaît ? demanda-t-elle en écartant les bras.
Zoé soupira mais obtempéra, sautant des jambes d’Eva puis venant à sa rencontre.
- Quoi ? dit-elle une fois arrivée à sa hauteur, son visage montrant bien qu’elle n’était pas contente d’avoir dû quitter sa place.
Cassie entendit Emma tenter d’étouffer son ricanement et elle la fusilla du regard avant de reporter son attention sur sa fille.
- Dis le si je t’embête, princesse, dit-elle en venant chatouiller son ventre.
Zoé se tortilla, un rire s’échappant de ses lèvres avant qu’elle ne vienne lui entourer le cou de ses bras tout en lâchant un petit « non ». La tête de sa fille dans le creux de son cou, Cassie en profita pour tirer la langue à Emma et Kate avant de venir embrasser la chevelure blonde identique à la sienne. Elle recula légèrement Zoé pour pouvoir croiser son regard.
- Tu veux rester avec tes deux tatas, alors ? demanda-t-elle d’un air conspirateur.
Zoé hocha frénétiquement la tête avant de dévier son regard vers Eva et Liz, comme pour s’assurer que sa réponse allait. Vu les sourires niais qu’elles ont sur le visage, elles sont plus que d’accord pour la garder, rit intérieurement Cassie tout en levant les yeux au ciel.
- Et tonton alors ? poursuivit-elle.
- Je l’ai déjà vu ! répondit Zoé d’un ton plaintif en la regardant à nouveau.
Cassie se mit à rire.
- D’accord, d’accord, capitula-t-elle. Alors file leur demander –
Sa phrase à peine terminée, Zoé partit comme une flèche et Cassie dut la retenir par le bras pour terminer ce qu’elle disait.
- Hop hop hop, je n’ai pas fini, jeune fille, dit-elle en l’attirant de nouveau vers elle, retenant difficilement un sourire face aux yeux grand ouverts de Zoé, trahissant sa surprise et son impatience. Je disais donc, file leur demander si elles sont d’accord, et on verra tonton le weekend prochain, d’accord ?
- Avec toi aussi, hein ? demanda Zoé d’un ton incertain.
Cassie vint l’embrasser sur la joue avant de coller son front contre le sien.
- Bien sûr mon cœur, avec moi, et papa aussi, la rassura-t-elle. On revient jeudi, tu te souviens ?
- C’est loin jeudi, soupira Zoé en baissant les yeux.
Cassie sentit son cœur se serrer, devoir laisser Zoé derrière elle était la seule chose qui lui faisait se demander pourquoi elle avait choisi cette voix-là, et lui donnait parfois envie de tout laisser tomber pour pouvoir rester avec elle.
Heureusement, elle s’était arrangée pour que les déplacements ne soient pas nombreux. Et lorsqu’il n’y avait d’autres choix, Michael s’arrangeait pour partir en premier et faire le plus gros. Ainsi, elle ne partait que pour quelques jours. Zoé voyait un peu moins son père, mais Cassie préférait cette alternative plutôt qu’ils soient tous les deux absents.
- Ça passera vite, je te le promets, murmura-t-elle sincèrement. On t’appellera tous les soirs, et les matins à chaque fois qu’on le pourra, d’accord ?
- Promis ? demanda Zoé en la regardant à nouveau.
- Promis, souffla Cassie en frottant son nez contre le sien. Alors, tu leur demandes ou je le fais ? la poussa-t-elle dans un sourire afin de lui remonter le moral. Allez mon cœur, je ne supporte pas de te voir triste.
Pour son plus grand bonheur, Zoé retrouva son sourire et partit comme une flèche vers le canapé, retrouvant aussitôt sa place sur les genoux d’Eva. Prenant soudainement conscience du silence qui s’était installé, Zoé regarda tour à tour les visages qui l’entouraient, indécise, avant de s’arrêter sur celui de Cassie. Oh elle est adorable lorsqu’elle devient soudainement timide comme ça. Cassie lui offrit un sourire encourageant suivit d’un clin d’œil et Zoé se tourna aussitôt vers Eva, soulevant doucement une mèche de cheveux pour atteindre son oreille. Elle murmura si fort que tout le monde entendit :
- Je peux dormir chez toi ce soir ?
Elles se mirent toutes à rire et Eva se recula légèrement avant de murmurer à son tour d’un air conspirateur :
- Juste ce soir ?
Zoé se mordit la lèvre inférieure tout en secouant la tête. Elle leva une main sur laquelle elle compta à l’aide de l’autre pendant un instant, les sourcils froncés de concentration, puis finit par lever quatre doigts.
- Quatre nuits ? demanda Eva en feignant un air surpris.
- Hmm hmm, répondit Zoé en hochant la tête. Alors ? chuchota-t-elle à nouveau.
Eva retint un rire.
- Ca dépend, répondit-elle. Tu as apporté tes affaires ?
Zoé écarquilla soudainement les yeux avant de se tourner de nouveau vers Cassie.
- Jérôme viendra les déposer, rassura cette dernière avant de se redresser. Tu viens me faire un câlin ma puce ? Maman va devoir partir maintenant.
Contrairement à la réaction qu’elle avait eue un peu plus tôt, Zoé descendit cette fois-ci lentement du canapé, si lentement que l’on pouvait facilement ressentir combien elle redoutait d’affronter l’inévitable. Elle arriva finalement devant Cassie et se glissa dans ses bras dans un silence surprenant. Cassie l’enserra aussitôt tout en se relevant.
- Eva ? Tu nous accompagnes en bas ?
Eva hocha la tête et Cassie entama les au revoir, commençant par Liz avant de terminer par Kate et Emma.
- Prenez soin de vous les filles, d’accord ? reprit-elle alors qu’elle glissait son sac à main sur son épaule libre, Zoé toujours silencieuse contre l’autre. Et prévenez-moi la prochaine fois que vous montez à la capitale.
- Tu peux venir à la maison aussi, tu sais, répondit Kate en caressant doucement le dos de Zoé. Bon, ce n’est pas aussi grand que chez toi, taquina-t-elle, mais il y a assez de place pour tout le monde.
Cassie lui offrit un air contrarié.
- J’aimerais beaucoup, mais avec le poste que j’ai...
- Ce n’est pas évident, termina Emma. T’en fais pas, on comprend, la rassura-t-elle.
- Merci, répondit Cassie. Mais on essayera, c’est promis. Si ce n’est pour nous, au moins pour Zoé. Vous êtes autant ses tantes qu’Eva et Liz, je tiens à ce qu’elle vous ait autant dans sa vie qu’elles.
Elles hochèrent la tête d’un air entendu et Kate vint de nouveau la prendre dans ses bras.
- Ne t’en fais pas, quatre jours, ça passe vite, murmura-t-elle à son oreille dans un ton réconfortant.
Cassie lâcha un faible rire.
- Je pensais l’avoir bien caché, souffla-t-elle à son tour alors que sa vue se voilait légèrement.
- Je te connais, répondit simplement Kate en se reculant. Elle sera entre de bonnes mains.
- Je sais, sourit aussitôt Cassie.
Elle leur offrit un dernier signe de main avant de quitter l’appartement avec Eva qui avait troqué sa tenue pour un jean et un haut à capuche.
- Pfiouh, soupira aussitôt Emma en se laissant retomber sur le canapé. Ce fut le weekend le plus fort en émotions que je n’ai jamais connu.
- Hmm, acquiesça Kate en s’asseyant à son tour. Mais il s’est plutôt bien terminé, non ? ajouta-t-elle en s’emparant de sa main.
- Oui, sourit Emma avant de porter son attention sur Liz qui occupait désormais le fauteuil dans lequel Cassie était assise. Et pas uniquement pour nous, en plus.
Liz rougit légèrement.
- J’avoue que la situation a pris un tour inattendu, admit-elle avant de sourire. Tes bêtises nous ont été bénéfiques, petite fauteuse de trouble.
- Humpf, gémit Emma en cachant son visage entre ses mains. J’aurais aimé ne pas l’avoir fait aux dépends de Kate, répondit-elle en se mordant la lèvre inférieure tout en regardant cette dernière. Je suis vraiment désolée.
Kate entoura son cou de son bras et vint l’embrasser sur la tempe.
- C’est oublié, ne t’en fais pas.
Liz les observa à tour de rôle, un sourire attendri sur les lèvres, avant de reporter son attention sur Kate :
- Dis Kate... pourquoi tes parents t’ont-ils choisie toi, pour prendre la relève ? demanda-t-elle, les sourcils froncés. Pourquoi ta mère n’a-t-elle pas poursuivi ce qu’elle et ton père avaient commencé ? Car, ne me méprends pas, mais tu n’as pas remis les pieds dans ce milieu depuis six longues années ; je ne vois pas comment tu aurais pu reprendre les rênes dans ces conditions...
- Insinuerais-tu que je manque cruellement d’expérience ? taquina aussitôt Kate, un sourcil haussé. Mon père a toujours été le cerveau du Groupe, le grand dirigeant. Que cela ne m’en déplaise, il faisait partie des meilleurs dans son domaine, et le succès du Groupe le prouve bien. Ma mère aurait été incapable de prendre relève sans lui, ou alors, elle aurait eu besoin de Jessie... et ça, elle ne s’y serait jamais abaissée.
Liz lui offrit un regard confus.
- Ils préféraient alors tout remettre entre tes mains... quitte à tout perdre ?
Kate feignit aussitôt un air blessé.
- Ouch ! s’exclama-t-elle en portant une main sur son cœur, provoquant aussitôt le rire de Liz.
- Excuse-moi, reprit cette dernière. Je ne voulais pas être blessante, mais –
- Ca va, l’interrompit Kate dans un petit sourire. J’aurais été incapable de reprendre les rênes, tu as raison. Mais ils ne sont pas si bêtes, je pense surtout qu’ils avaient pour espoir de faire de moi un pantin dirigé par Jessie ; elle se serait chargé de tout en coulisse, et j’aurais joué la comédie, prétendant être l’auteure de ses idées.
Sa phrase à peine terminée, elle sentit Emma soupirer contre son cou.
- Cela remet en cause l’honnêteté de ta mère, remarqua-t-elle simplement en jouant avec le col du t-shirt de Kate.
Kate réfléchit un instant avant de répondre.
- Je pense qu’elle était sincère, dit-elle enfin. Mais que les intérêts de Groupe – et plus encore, de la dynastie – passeront toujours en premier.
- Le lien est définitivement coupé, alors ? demanda doucement Liz.
Kate l’observa avant de hocher imperceptiblement la tête.
- Le lien est définitivement coupé, répéta-t-elle d’un ton démontrant clairement sa détermination.
- Quel lien ? demanda Eva alors qu’elle rentrait de nouveau dans la pièce, Zoé dans ses bras.
Les yeux de cette dernière étaient visiblement rougis alors qu’elle reposait silencieusement contre son épaule.
- Pas facile, le départ, hein ? remarqua Emma d’une voix douce alors qu’elle regardait Zoé d’un air compatissant.
- Hmm, on a eu droit à de grosses larmes de crocodile, répondit Eva en venant embrasser le front de Zoé tout en caressant sa joue. Mais elle va revenir vite, maman, hein ? souffla-t-elle en glissant une mèche blonde derrière son oreille.
Zoé se redressa et frotta ses yeux de ses poings avant de regarder un instant autour d’elle, puis hocher doucement la tête lorsqu’elle regarda de nouveau Eva.
- Tu veux regarder un film ? Némo ?
Zoé ouvrit aussitôt grand les yeux et hocha frénétiquement la tête. Eva soupira de soulagement, elle n’avait certes pas encore réussit à lui arracher un sourire, mais elle avait au moins réussi à la distraire ; c’était le plus important. Elle s’installa sur le canapé et positionna Zoé de manière à ce qu’elle puisse voir l’écran tandis que Liz insérait le DVD dans le lecteur. La première image fut à peine apparue que toute l’attention de Zoé fut retenue par le téléviseur.
- Et moi qui croyais que c’était le film préféré de Liz, dit Kate en s’installant confortablement contre l’accoudoir, attirant Emma contre elle. Il semblerait qu’elle ait été détrônée de sa place de plus grande fan.
Zoé tourna la tête dans sa direction et lâcha un « chut ! » enthousiaste tout en portant un doigt contre ses lèvres avant de reporter son attention sur l’écran. Kate haussa les sourcils alors qu’Emma, Eva et Liz étouffaient tant bien que mal leurs rires. Zoé fronça les sourcils dans leur direction avant de regarder de nouveau le film.
- On ne t’a jamais dit que lorsqu’il y avait un enfant dans la pièce, c’était lui qui commandait ? taquina Emma depuis sa place contre son épaule.
Kate vint la chatouiller au niveau des côtes, poussant Emma à sursauter aussitôt tout en lâchant un rire hystérique. Le regard noir qu’elles reçurent de Zoé les arrêta cependant aussitôt.
- Tu vois ? murmura Emma, essoufflée, avant de retenir de nouveau un rire lorsque Kate marmonna quelque chose d’incompréhensible entre ses dents.
Elle laissa ses doigts courir le long du visage de Kate, souriant lorsque cette dernière ferma instantanément les yeux.
- Tu as changé, tu sais, murmura-t-elle simplement.
Kate laissa apparaitre un œil noisette, puis un second.
- Et... c’est un mal, ou un bien ?
- Tu crois que je serais là, si c’était un mal ? la taquina Emma en lui pinçant légèrement le bout du nez. Bon, ton côté volcanique était très... excitant, mais tu as prouvé hier soir que tu étais plus posée. J’ai redouté pendant un instant ta montée sur l’estrade lorsque ton nom a été appelé.
Kate sourit légèrement.
- Qui aurait pu croire qu’il allait falloir la médecine pour m’aider à canaliser mes réactions ? répondit-elle les yeux brillants.
Emma rit doucement avant de venir lui voler un baiser.
- Tu vas devenir chirurgienne, Kate, murmura-t-elle. Je t’ai déjà dit combien j’étais fière de toi dernièrement ?
Kate rougit légèrement.
- C’est plutôt toi qui m’impressionne. Je veux dire, prof ? Elle frissonna. C’est le genre de métier où il faut savoir s’accrocher.
- Non, c’est facile, sourit Emma, l’air malicieux. Il suffit d’avoir un charme irrésistible, et ils ne posent aucun problème.
Kate secoua la tête, amusée.
- Et dire que je ne peux même pas te contredire, souffla-t-elle contre ses lèvres avant de l’embrasser.
Leurs lèvres se rencontrèrent furtivement avant de se séparer pour mieux se retrouver, Kate sentant les douces mains d’Emma se poser sur ses joues afin de tenir son visage en place. Les siennes vinrent se resserrer autour d’une taille fine alors qu’elle se concentrait sur les lèvres sucrées qu’elle savourait avec délice. C'était tellement furtif, tellement léger, seul le bout de leurs lèvres et de leurs langues entrant en contact, s’effleurant à peine. Et pourtant, c’était si doux que chacune d’elle se sentait fondre comme neige au soleil.
Emma pouvait sentir les bras protecteur autour d’elle, qui la serraient contre le corps Kate. Une main vint s’enfouir dans ses cheveux tandis que l'autre tenait sa hanche et elle sourit intérieurement ; même après sept longues années, rien qu'en l'embrassant, Kate faisait naître des sensations indescriptibles en elle.
Kate passa ses mains dans le dos d’Emma et la rapprocha plus encore. Leurs corps se collèrent et elle put sentir la moindre de ses courbes à travers ses vêtements, souriant lorsqu’elle réalisa que le cœur d’Emma battait aussi vite que le sien. Sa respiration légèrement saccadée l’électrisait et sa langue partait à nouveau à la recherche de celle d’Emma lorsqu’elle ressentit une vive douleur dans son côté gauche. Elle recula vivement.
- Ouch ! s’exclama-t-elle tout en regardant Emma comme si elle avait perdu la tête.
Emma cligna des yeux, perplexe, avant de tourner la tête lorsqu’elle sentit une présence à ses côtés.
- Zoé ? appela-t-elle, confuse.
Cette dernière croisa les bras sur sa poitrine, les sourcils froncés.
- T’es partie chercher Némo dans sa bouche ?
Emma se mit aussitôt à rougir furieusement tandis que Kate couvrait son visage de ses mains avant de jeter un œil vers Eva. Vu comment cette dernière tentait d’étouffer son rire contre l’épaule de Liz, elle n’eut aucun mal à deviner où Zoé avait entendu la phrase qu’elle venait de prononcer.
- Espèce de –
Elle fut coupée par une main sur ses lèvres.
- Pas de vilains mots devant les enfants, l’admonesta Emma avant de venir prendre Zoé dans ses bras. Aller, viens par ici petite princesse, qu’on regarde la fin de ton film.
- J’ai plus envie, vous arrêtez pas de m’embêter ! rouspéta Zoé en affichant un air boudeur.
- Oh..., promis on arrête, d’accord ? répondit Emma en la chatouillant légèrement.
Zoé remua légèrement mais resta silencieuse, un sourire apparaissant néanmoins sur ses lèvres.
- J’ai envie de savoir s’il va retrouver Némo, moi, en plus, continua Emma.
Zoé tourna aussitôt la tête vers Kate et regarda sa bouche d’un air méfiant, provoquant une nouvelle tournée de rires alors que Kate haussait les sourcils avant de couvrir ses yeux de sa main.
- Eva..., gronda-t-elle. Arrête de dire des bêtises, tu vas finir par l’effrayer cette pauvre petite.
Eva feignit un air innocent, clignant des paupières tout en se désignant du doigt.
- Moi ?
- Oui toi ! soupira Kate avant de reporter son attention sur Zoé. Promis princesse, je n’ai pas avalé Némo.
- Moi en tout cas, j’irais bien avaler quelque chose, dit Eva en se redressant. Zoé, ma puce, on va cuisiner ?
Zoé sauta aussitôt du canapé et partit en direction de la cuisine tout en hurlant un « à table ! » interminable.
- Eh, je suppose que ça veut dire qu’elle est partante, répondit Eva les sourcils haussés avant de se joindre aux rires des autres.
Elle s’apprêtait à se lever lorsqu’une pensée lui traversa soudainement l’esprit et elle observa Liz d’un air hésitant.
- Le frigo est plein, la rassura cette dernière. J’ai fait les courses hier.
- Oh.
Je ne l’ai même pas entendue partir, soupira intérieurement Eva. Bon sang, je crains. Il est vraiment temps d’arrêter ça.
- Merci, murmura-t-elle en venant l’embrasser. Je m’en chargerai la prochaine fois, ajouta-t-elle néanmoins, mal à l’aise.
- C’est rien, répondit Liz en l’embrassant à nouveau, juste parce qu’elle le pouvait. Hmm. Ça m’a définitivement manqué. File avant que Zoé ne touche à quelque chose et ne se blesse.
Des bruits de casseroles s’entrechoquant leur parvinrent et Eva écarquilla aussitôt les yeux.
- Je suis déjà partie ! s’exclama-t-elle en quittant la pièce à toute allure.
Elles se mirent à rire à nouveau, puis, une fois calmée, Kate se mordilla la lèvre inférieure.
- Ca veut dire que l’on va pouvoir de nouveau bénéficier de ses talents de cuisinière alors ? dit-elle d’un ton empli d’espoir.
- Tout dépend de qui choisit le menu, sourit Emma. Car si c’est Zoé...
Liz rit doucement.
- Peu importe, j’ai surtout envie qu’Eva avale quelque chose.
- Elle est sur la bonne voie, ne t’en fais pas, la rassura Kate. Elle va déjà beaucoup mieux depuis que vous avez discuté.
- Et que Zoé est arrivée, acquiesça Liz avant de sourire malicieusement. Si j’avais su qu’il suffirait de sa présence...
Emma leva les yeux au ciel, amusée.
- T’es bête, c’est surtout toi qui l’as aidée.
- Peut-être, répondit Liz en haussant les épaules. Je crois que pour l’instant, c’est le cadet de mes soucis, et que j’ai simplement envie d’en profiter. Je vais voir ce qu’elles font, vous restez ici ?
Emma glissa son visage dans le cou de Kate et vint embrasser la peau douce avant de la regarder à nouveau, les yeux brillants.
- File, sourit-elle en lui faisant signe de la main de partir. On trouvera bien de quoi s’occuper.
Liz secoua la tête tout en se redressant.
- Ca j’en doute pas, ricana-t-elle. Mais n’oubliez pas que Zoé est dans la pièce voisine ! ajouta-t-elle alors qu’elle s’éloignait.
Aucune réponse ne lui parvint et elle marmonna un « les chambres d’hôtel, ça existe » tout en s’approchant de la cuisine. Une douce odeur de cuisson lui parvint et elle glissa sa tête à l’intérieur de la pièce, souriant lorsqu’elle aperçut Eva et Zoé en pleine conversation, chacune occupée de son côté. Eva faisait tantôt face aux plaques de cuisson, tantôt face au plan de travail où elle et Zoé semblaient préparer une salade maison.
Liz s’approcha et glissa ses bras autour de la taille d’Eva, se collant contre son dos alors que cette dernière faisait revenir quelque chose à la poêle.
- Alors, qu’est-ce que vous nous cuisinez ? demanda-t-elle en jetant un œil par-dessus son épaule.
- Des croque madame ! s’exclama Zoé alors qu’elle tentait tant bien que mal de casser un œuf.
- Et une salade composée, rappela Eva en lui jetant un regard en coin. Ainsi qu’une poêlée de légumes et de la viande rouge pour les plus grands.
Liz haussa les sourcils. Une poêlée de légumes et de la viande rouge pour les plus grands ?
- Ca veut dire que tu vas manger aussi alors ? demanda-t-elle avant qu’elle n’ait pu s’en empêcher.
Eva remua la poêle une nouvelle fois avant de se retourner et la prendre dans ses bras, soupirant d’aise lorsque Liz vint aussitôt entourer son cou.
- Peut-être, sourit-elle avant de venir embrasser sa tempe. Qu’as-tu fait des deux énergumènes ?
- Tcht, l’admonesta aussitôt Liz en la pinça légèrement au niveau des côtes. Elles sont dans le salon en train de se câliner.
Eva sourit contre ses cheveux, s’assurant que Zoé restait dans son champ de vision.
- Elles ont bien raison.
- Hmm, répondit Liz avant de venir lui voler un baiser, souriant lorsqu’Eva arbora un air boudeur face à la brièveté du contact. Désolée mon amour, mais on a une enfant dans la pièce.
- Plus tard alors, répondit aussitôt Eva en venant mordiller son oreille.
Les yeux de Liz se fermèrent d’eux même face à la sensation avant qu’elle n’observe le visage d’Eva lorsque cette dernière ce recula. Oh s’il vous plaît dites-moi que je ne rêve pas.
- Tu m’as manqué, murmura-t-elle, ses doigts caressant légèrement la nuque à sa portée.
- Je sais, répondit Eva, un air coupable prenant place sur ses traits alors qu’elle déviait son regard vers Zoé. Je suis désolée.
Liz secoua doucement la tête.
- Non, ne le sois pas, souffla-t-elle. Ce n’était pas ta faute, Eva.
Elle hésita avant d’ajouter :
- Je suis juste contente de te retrouver, de retrouver ça, entre nous.
Eva lui sourit faiblement.
- Moi aussi, répondit-elle sincèrement. Je t’aime.
- Et je t’aime aussi, répondit Liz en venant embrasser sa joue.
Elle reporta son attention sur Zoé et elle grimaça légèrement. Cette dernière avait les deux mains plongée dans le bol dans lequel elle avait cassé quelques œufs et Liz pouvait voir d’ici qu’elle y avait aussi laissé de nombreux morceaux de coquille.
- Vous comptez faire une omelette aussi ? taquina-t-elle. Parce que là, vu les œufs...
- J’étais sensée l’aider, tu m’as distraite, accusa Eva dans un sourire en la poussant légèrement alors qu’elle retournait à la préparation de la salade.
Liz lui tira la langue par-dessus son épaule avant de s’emparer de Zoé et la guider vers l’évier.
- Mais, c’était pour les croque madame ! s’exclama aussitôt cette dernière lorsque Liz vida le contenu du bol à même le siphon.
- T’en fais pas ma puce, on en a plein des œufs, commença Liz en l’aidant à se laver les mains. C’est juste qu’un croque madame n’a pas besoin d’œufs battus.
Elle lui essuya les mains à l’aide d’un torchon puis se saisit d’une chaise qu’elle plaça près du plan de travail. Elle fit signe à Zoé d’y monter.
- Regarde, je vais te montrer.
Elle enfourna les croque dans le four afin de les faire dorer et faire fondre le fromage puis beurra une petite poêle qu’elle déposa sur la plaque de cuisson, l’allumant sur feu moyen. Une fois le beurre fondu, elle cassa délicatement un œuf dans la poêle sans crever le jaune.
- Ils doivent être au plat tes œufs, ma puce, expliqua-t-elle. Comme ça, d’accord ?
Zoé hocha la tête alors qu’elle observait, attentive.
- Tu veux essayer ? demanda Liz en lui tendant un œuf.
Zoé acquiesça aussitôt d’un frénétique hochement et Liz retint difficilement le grand sourire qui menaçait d’apparaître. Zoé avait cette dualité dans sa personnalité, étant incroyablement calme lorsqu’elle était concentrée, triste, ou fatiguée, et débordante d’énergie lorsqu’elle voulait jouer ou était enthousiasmée pour une quelconque raison. Deux côtés qui, en plus de son adorable visage, la rendaient craquante.
Liz s’empara d’un bol propre contre lequel Zoé cassa l’œuf, puis elle l’aida à vider le contenu dans la poêle.
- Je crois bien que l’on a une future chef cuisinière, la félicita-t-elle avant de regarder Eva, le regard brillant de malice. Fais attention mon amour, elle pourrait bien te détrôner.
- Nah, elle sera mon associée, hein Zoé ? sourit Eva, fière d’elle.
Zoé lui jeta à peine un coup d’œil avant de hocher distraitement la tête, son attention fixée sur les œufs au plat. Liz ricana.
- Elle n’a pas l’air très enthousiaste à l’idée, se moqua-t-elle. Tiens, sale le blanc maintenant Zoé. Juste-là.
Zoé obtempéra puis observa Liz sortir les croque du four avant de venir étaler légèrement le blanc avec une spatule.
- Tu monopolises toute son attention juste parce que tu es jalouse, rétorqua aussitôt Eva, savourant le rire de Liz lorsqu’il éclata dans la pièce.
- Bien sûr, répondit cette dernière en levant les yeux au ciel. Tu veux les faire glisser sur les croque maintenant ? demanda-t-elle à Zoé alors que cette dernière poivrait.
Zoé acquiesça aussitôt et elle s’empara de la poêle avec l’aide de Liz avant de venir faire glisser les œufs à l'aide d’une spatule.
- Et voilà, sourit Liz alors qu’elle reposait la poêle. On forme une belle équipe hein ?
Elle échangea un high five avec Zoé avant de tourner la tête vers Eva qui n’avait cessé de les observer.
- Les légumes sont prêts ?
- Oui, acquiesça cette dernière. La viande et la salade aussi. A table.
- A table ! s’écria aussitôt Zoé en sautant de la chaise puis en se dirigeant vers le salon.
Elles lâchèrent aussitôt un rire avant de s’arrêter, surprise de voir Zoé revenir à peine cinq secondes plus tard. Elle s’arrêta au beau milieu de la cuisine avant de croiser ses bras sous sa poitrine, un air renfrogné sur le visage.
- Elles faisaient encore des bisous, dit-elle, les sourcils froncés.
Liz grimaça. Merde, j’avais oublié ça, pensa-t-elle alors que le rire qu’Eva tentait d’étouffer lui parvenait. Elle lui offrit un regard incrédule auquel Eva répondit en levant les yeux au ciel.
- Je suis sûre qu’elle a déjà vu ses parents s’embrasser, expliqua-t-elle d’un ton conciliant. Pas vrai, ma puce ?
Zoé l’observa un instant avant d’hocher la tête.
Eva sourit. Cela la rassurait de voir la tendresse de ses parents lorsqu’elle était toute petite. Des gestes tendres, des petits bisous, une main tenue. Rien d’excessif en soit, mais qui la faisait se sentir bien au sein du cocon familial. Elle pensait qu'il était important dès le plus jeune âge de savoir qu'il n'y avait pas que l'amour parent-enfant dans la vie, que l'on pouvait embrasser son conjoint, ses enfants, sa famille, ses amis. C’était aussi une façon pour l'enfant de se construire, de se projeter dans des relations aux autres, selon elle.
- Tu sais qu’elles font ça parce qu’elles sont amoureuses, pas vrai ? poursuivit-elle.
Zoé lâcha un petit rire typique des jeunes de son âge lorsque ce genre de sujet était évoqué tout en acquiesçant à nouveau.
- Et ça ne te met pas mal à l’aise non plus, n’est-ce pas ? sourit-elle.
Elle connaissait déjà la réponse. Cassie leur avait raconté une fois que lorsque Zoé les surprenait à échanger un petit bisou son mari et elle, cette dernière s’amusait à s’exclamer un « oh, papa ! » qui les faisait rire et qui la rendait très fière d'avoir cassé le bisou d'amoureux. Ou alors, elle lâchait des « oh les amoureux ! » ou des « je vous ai vus ! » interminables avant de venir réclamer un câlin à son tour.
- Non, rit de nouveau Zoé en secouant la tête.
- Je m’en doutais, répondit Eva en venant la prendre dans ses bras avant de se tourner vers Liz. Tu vois, pas de quoi se faire de soucis.
Liz leva les yeux au ciel avant de s’approcher.
- Tant mieux, parce que les connaissant, elles ne sont pas prêtes de s’arrêter. Elle appuya son front contre celui de Zoé. Et tu sais pourquoi ? demanda-t-elle en chatouillant légèrement son ventre.
Zoé secoua la tête et Liz vint lui chuchoter d’un air conspirateur :
- Parce que les vraies histoires d’amour ne finissent jamais.