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⚢ Fictions lesbiennes ⚥
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⚢ Fictions lesbiennes ⚥

Claire-em

31 août 2015

Chapitre 20

Elysia salua une dernière fois ses invitées de la main puis referma la porte avant de prendre appui contre le battant, un profond soupir s’échappant de ses lèvres

— Bon sang, qui aurait pu imaginer qu’organiser une soirée entre filles pouvait demander autant d’énergie ? gémit-elle en se passant une main sur le visage.

Le sourire aux lèvres, Kat l’attira contre elle, un frisson la parcourant quand Elysia laissa courir ses ongles le long de son dos dans un contact taquin.

— Peut-être, mais au moins, tout est rentré dans l’ordre. Tu devrais être fière.

— Hmm, c’est vrai, admit Elysia, déposant un léger baiser dans le cou de Kat avant de relever la tête. Ça valait la peine de passer au travers de tout ça, pas vrai ?

— J’admets. Même si ça n’a pas forcément été facile, je suis quand même contente qu’on l’ait fait.

Le sourire d’Elysia s’agrandit et elle glissa ses mains dans les poches arrière du bermuda de Kat avant de déclarer d’un ton nonchalant :

— Mathilde est partie avec ta voiture et les clés de ton appartement.

Kat sourit, ayant une petite idée d’où Elysia voulait en venir.

— Exact.

— Alors... qu’est-ce que tu dirais d’aller se coucher maintenant et de ne pas quitter la chambre avant... disons... dimanche soir au plus tard ?

Pour toute réponse, Kat souleva délicatement Elysia dans ses bras et la porta jusqu’à la chambre.

— J’en dis que tu es une petite dévergondée, taquina-t-elle.

Elysia l’embrassa aussitôt au coin des lèvres.

— Et moi j’en dis que vu où tu me conduis, tu l’es tout autant que moi, dit-elle en lui mettant une petite tape sur le bout du nez.

Kat sourit, amusée.

— Possible.

La porte de la chambre lui apparut enfin et elle en profita pour voler un baiser à Elysia avant de la déposer au pied du lit. L’espièglerie avait laissé place à quelque chose de plus intense et quand Kat remarqua l’amour avec lequel Elysia la regardait, elle sentit aussitôt ses entrailles se réchauffer de la manière la plus douce qui soit.

Elle embrassa Elysia sur le bout du nez avant de prononcer :

— Je t’aime.

Elysia ferma aussitôt les yeux de contentement, puis caressa la joue de Kat avant de murmurer :

— Et je t’aime.

Kat lui répondit en entourant sa taille de ses bras avant de s’emparer de ses lèvres, le corps brûlant d’anticipation. Elle sentit les doigts d’Elysia venir déboutonner son bermuda et elle la débarrassa de sa belle robe d’été, leurs corps s’enlaçant sur le lit avant même que leurs vêtements n’aient eu le temps de toucher le sol.

Kat se sentit trembler de tout son être, enivrée par l’effet que les mains habiles d’Elysia avaient sur elle. De ses lèvres, Kat redécouvrit la douceur de sa peau, la plénitude de ses seins gonflés, la fermeté de son ventre satiné, puis descendit jusqu’à trouver son intimité, et elle sentit le corps sous elle se mettre à frissonner, puis à onduler, pour enfin se tendre sous l’effet de l’orgasme.

Un sourire satisfait sur les lèvres, Kat posa sa joue contre la cuisse d’Elysia et la couvrit d’un regard tendre tandis que cette dernière retrouvait progressivement ses esprits. Ce n’était pas la première fois qu’elles s’aimaient comme ça, et pourtant, Kat savait qu’elle ne s’y habituerait jamais. Pas quand le spectacle qui s’offrait à elle était aussi pur, aussi beau et aussi intense.

Elle déposait finalement un baiser contre la peau douce avant de remonter le long du corps Elysia, quand quelque chose attira son attention. Là, à l'intérieur du « v » de ses cuisses, juste sur la droite, se trouvait un minuscule tatouage. Si petit qu’il était impossible de le remarquer immédiatement, à moins de vraiment regarder.

Au-dessus d’elle, du mouvement lui parvint, et Kat devina qu’Elysia venait de relever la tête, se demandant très certainement pourquoi elle avait arrêté de bouger.

— Amour..., qu’est-ce que-tu fais ? demanda Elysia, à la fois gênée et amusée.

Kat aurait pu répondre, si elle avait eu la moindre idée de ce qui se passait. Ce tatouage, ces quatre caractères chinois entremêlés les uns avec les autres, elle savait très bien ce qu’ils signifiaient.

Mon Amour, Ma Tigresse

Dans un tout autre contexte, l’association de ces deux termes l’aurait indéniablement fait rire, s’ils ne lui rappelaient pas la dernière personne sur laquelle elle les avait vus.

 

Sept ans plus tôt

Le regard de Kat s’évada autour d’elle depuis sa place au pied du lit. C’était la première fois qu’elle se retrouvait dans une chambre d’hôtel, et elle devait bien admettre qu’elle était plutôt surprise. Elle qui s’était attendue à quelque chose de sombre et miteux comme on le voyait souvent dans les films, c’était justement tout le contraire qui l’avait accueillie, tant la pièce était spacieuse et très charmante avec ses tons crèmes doux et apaisants.

Pourtant, la seule question qui tournait dans sa tête depuis plusieurs minutes déjà, c’était : mais qu’est-ce que je fabrique ici ?

Elle l’avait voulu, pourtant. Elle en était l’instigatrice. Mais maintenant qu’elle y était... elle était terrorisée.

Un soupir d’aise lui parvint et elle reporta son intention sur la jeune femme allongée à ses côtés, le dos en appui contre les oreillers. Ses paupières mi-closes lui donnaient un air endormi, et son torse quasi nu dévoilait aux yeux de Kat des courbes charnelles qui la mettaient étrangement mal-à-l’aise. 

Une main se posa sur la sienne et Kat sursauta avant d’entourer sa taille de ses bras.

— Woah, souffla la jeune femme, surprise. Désolée..., tu semblais ailleurs depuis tout à l’heure. Ça va ?

— Oui, répondit aussitôt Kat en hochant la tête, se giflant intérieurement pour sa réaction exagérée.

La jeune femme la regarda, intriguée, avant de descendre du lit.

— On a un minibar, tu veux quelque chose ?

— Non merci, ça va, répondit Kat tout en prenant à son tour appui contre les oreillers.

La jeune femme haussa les épaules, l’air de dire « comme tu veux » puis s’accroupit afin de fouiller dans le minuscule frigo. Elle en sortit quelque chose avant de rejoindre Kat sur le lit.

— Tiens, regarde, sourit-elle en lui tendant une bouteille.« Sex-appeal — boisson aphrodisiaque », ça te dit ?

Kat ne sut si c’était le nom ou le regard empli de sous-entendus que la jeune femme lui offrait, mais elle se sentit rougir malgré elle.

— Euh, non merci. Je suis pas trop alcool.

— O.K.

Le bouchon craqua et la jeune femme le dévissa rapidement avant d’en boire une gorgée, s’essuyant ensuite la bouche d’un revers de main.

— Hmm, ronronna-t-elle. Coco et fraise, t’es sûre que tu veux pas essayer ?

— Certaine, sourit faiblement Kat tout en levant intérieurement les yeux au ciel.

Oh bon sang, elle va me prendre pour une vraie coincée.

La jeune femme l’observa à nouveau, intriguée, avant de déposer la bouteille sur la table de nuit puis s’approcher d’elle. Ses lèvres se posèrent sur la joue de Kat et cette dernière sentit des mains venir jouer avec l’ourlet de son t-shirt alors que l’inconnue se rapprochait petit à petit de sa bouche. Son souffle s’accéléra, en rythme avec les battements de son cœur, et bien vite, leurs lèvres se rencontrèrent dans une succession de petits baisers. Kat vint glisser ses mains dans les boucles brunes de son inconnue avant de soudainement se figer lorsqu’elle sentit les doigts de cette dernière passer la barrière de son haut et venir frôler la peau de son ventre. La jeune  femme se recula.

— Ça va ? demanda-t-elle, l’air concerné. Je ne t’ai pas fait mal, si ?

Kat secoua négativement la tête mais resta silencieuse, trop embarrassée et énervée contre elle-même pour répondre. 

— C’est... c’est ta première fois ? continua la jeune femme après une légère hésitation.

Kat releva subitement la tête, surprise, avant de lâcher un rire nerveux qui se transforma rapidement en sanglots malgré elle. Je suis pathétique, pensa-t-elle avec dépit.

— Non, répondit-elle enfin, les yeux humides. Laisse tomber, je suis désolée, poursuivit-elle en descendant du lit. C’était une mauvaise idée.

— Non, attends, l’interrompit la jeune femme en posant une main sur son bras. Hé, ça va. On n’est pas obligées de... enfin, si tu as besoin de parler, je peux faire ça aussi, tu sais ?

Son ton était empli de douceur et lorsque Kat tourna la tête dans sa direction, elle réalisa que son visage l’était aussi. Elle hésita un instant avant de s’essuyer les yeux d’un revers de main puis se réinstaller contre les oreillers. Une main se glissa dans la sienne et la jeune femme l’observa d’un air concerné.

Kat se racla la gorge.

— Il n’y a pas grand-chose à dire, en fait, répondit-elle finalement.

— C’est pas ta première fois, alors ?

Kat secoua négativement la tête.

— Non.

— D’accord, acquiesça doucement la jeune femme. Alors, si c’est pas...

— J’ai été violée.

Les mots l’échappèrent et Kat sentit aussitôt la jeune femme se figer, puis la vit cligner des paupières à plusieurs reprises.

— Oh, articula-t-elle enfin. Je..., c’est..., je suis désolée, enfin...

— Ça va, la coupa Kat. T’embête pas, je sais qu’il n’y a pas grand-chose à répondre face à ça.

La jeune femme lui offrit un air désolé et au vu de sa main qui tripotait nerveusement la couette sur laquelle elles étaient assises, Kat sut qu’elle était mal à l’aise.

— Écoute, je ferais mieux de rentrer, commença-t-elle en se redressant. Tout ça ne rime à rien et —

— Non, l’interrompit à nouveau la jeune femme avant d’afficher un sourire embarrassé. Je me sens un peu bête maintenant, je ne voulais pas..., enfin, si je t’ai mis la pression où...

— C’est moi qui t’ai proposée de venir ici, lui rappela aussitôt Kat.

La jeune femme se mordit la lèvre.

— C’est vrai, admit-elle. Alors pourquoi..., je veux dire, si...

— Pourquoi t’emmener ici si je ne peux même pas aller plus loin qu’un simple baiser ? répondit amèrement Kat avant d’abaisser son regard vers leurs mains toujours liées.

En vérité, depuis les humiliations et la douleur subies aux mains de son ravisseur, partager son intimité avec quelqu’un d’autre lui était devenu tout simplement impossible. Mais une part d’elle refusait de donner à ce monstre la satisfaction qu’il attendait. Elle ne voulait pas le laisser gagner. Elle ne voulait pas le laisser lui prendre ça aussi.

Son inconnue, sans le savoir, avait fait revivre en elle des émotions qu’elle pensait perdues à jamais. Et ce à travers un simple regard, un simple sourire, un simple frôlement de la main sur la sienne. Avant même d’en avoir conscience, Kat s’était sentie réagir à sa présence. Et, plus important encore, elle était l'exact opposé du misérable qui s’était tellement amusé à abuser d’elle.

Kat voulait que son inconnue l’aide à retrouver cette part d’elle qui lui avait été volé.

— Je ne veux pas que ma dernière fois soit un viol, répondit-elle enfin, la voix légèrement tremblante avant de lever vers la jeune femme un regard embué. Je ne veux pas lui donner cette satisfaction. Je voulais que tu me fasses l'amour.

Son inconnue l’observa, l'expression de ses yeux clairs s'adoucissant ostensiblement pour devenir plus chaleureuse, et Kat fut surprise de la voir se déplacer pour s’étendre de tout son long à côté d’elle. Le regard qu’elle lui offrit ensuite lui coupa un instant la respiration, tant Kat réalisa que la jeune femme avait compris ce dont elle avait réellement besoin avant qu’elle-même ne le réalise.

Son inconnue s'offrait entièrement à elle, comprenant mieux qu’elle-même les émotions qui l’habitaient et qui l’avaient poussée à se diriger vers elle dans cette discothèque, puis à lui faire cette demande peu commune. Son ravisseur lui avait volé son libre arbitre, et cette femme, cette inconnue, avait décidé de le lui rendre. Kat avait été violentée, déshabillée, humiliée, impuissante à se défendre, et cette jeune femme lui offrait un contrôle total, tout en la rassurant.

Kat réalisa qu’elle n'aurait pas aimé se retrouver étendue sous elle, comme soumise. Elle voulait pouvoir contrôler le don de son corps ; faire les choses à sa manière ; être celle qui décidait du quand, du comment. Celle qui tenait les reines et dirigeait.

Elle s'agenouilla aux côtés de son inconnue tout en frémissant d’impatience. Sa peau, nue et laiteuse, attira ses mains comme un aimant. Dans une impulsion qui lui fit oublier sa nervosité, Kat vint caresser son estomac d'un geste avide avant de remonter un peu plus haut. Le cœur battant, ses doigts suivirent avec fascination le sillon de ses côtes, savourant la faible musculature et la dureté des os.

Lorsque sa main remonta vers la poitrine de la jeune femme, Kat réalisa que son cœur battait rapidement et que sa respiration était saccadée. Ses yeux remontèrent brièvement vers son visage et Kat se retrouva aussitôt prisonnière de ses iris bleus brûlants d’envie et d’une bouche légèrement entrouverte. Les signes du désir chez une femme ne lui étaient pas inconnus, pourtant, elle ne put s’empêcher d’en être surprise, parce qu’elle n'avait pas du tout envisagé cette possibilité dans la proposition qu’elle avait faite à son inconnue.

Kat retira ses mains tout en rougissant furieusement.

— Désolée, répondit aussitôt la jeune femme dans un sourire. Mais tes caresses sont loin de me laisser insensible ; ce doit être l’aphrodisiaque.

Son ton était léger, un peu taquin, et Kat ne put s’empêcher de rougir davantage. Doucement, elle écarta les mains de son inconnue et les remonta de chaque côté de sa tête avant de croiser son regard, et à nouveau, elle sut qu'elle comprenait. C’était à Kat de prendre toutes les décisions, à chaque étape. Elle la sentit se détendre puis réalisa qu’elle avait fermé les yeux, lui arrachant un faible sourire. Une fois encore, son inconnue avait compris ce qui était le mieux pour elle avant même qu’elle-même ne le réalise : il lui était plus facile d'agir si elle ne la regardait pas.

Sans se donner le temps de réfléchir, Kat tendit une main et détacha l’unique bouton du pantalon de son inconnue avant d’abaisser la fermeture. Un string en dentelle de couleur noire lui apparut aussitôt et elle glissa ses mains sous l’élastique avant de commencer à le faire descendre, lui et le pantalon, le long des jambes de la jeune femme. Cette dernière souleva les hanches pour l'y aider.

— Je peux savoir ton prénom..., murmura-t-elle, les yeux toujours clos, ...maintenant que tu m’as mise à nue ?

Kat ne put retenir un sourire malgré sa nervosité.

— Kat, répondit-elle, tout en caressant les cuisses fermes à proximité.

Un frisson de plaisir inattendu la traversaau contact de cette peau douce et ferme et elle tira un peu plus fort sur les vêtements, avant de les faire disparaître.

— Kat... c’est un joli prénom, j’aime beaucoup.

Kat rougit légèrement à nouveau.

— Merci. Et toi ?

— Lucy, souffla la jeune femme tout en repositionnant ses jambes sur la couverture.

La main de Kat remonta vers les seins de Lucy et, avec son aide, elle retira le dernier rempart à sa nudité avant de laisser son regard glisser sur son corps nu, le long de ses courbes harmonieuses, avant de s’arrêter sur sa fine toison déjà luisante de plaisir.

Attirée comme un aimant, Kat tendit une main pour la toucher d’un doigt, un léger frôlement qui poussa aussitôt Lucy à sursauter et à prendre une inspiration soudaine. Sa réaction surprit Kat et elle se crispa d'émotion avant qu'une chaleur brûlante n’émerge des profondeurs son corps et ne l’aide à se détendre. Ses doigts s’attardèrent un court instant dans les boucles brunes de sa toison finement taillée avant de descendre un peu plus bas, dans une intimité brulante.

La chaleur qui l’accueillie, la douceur soyeuse, et le fruit du désir qui inondait ses doigts enivra aussitôt Kat et elle réalisa qu’elle ne voulait plus attendre. Elle voulait faire l'amour. Elle avait besoin de faire l’amour, de partager enfin ce moment si particulier, si intime par plaisir, et non par violence.

D'un geste soudain, elle se redressa et se débarrassa de son propre jean et sous-vêtement avant d’enjamber le corps de Lucy et se mettre à califourchon sur elle. Cette nouvelle position lui procura une sensation à la fois intense et merveilleuse et elle frissonna lorsque Lucy écarta un peu plus les jambes, l’invitant à mieux unifier leurs centres. Au premier effleurement, le contact presque brûlant poussa Kat à se relever presque instinctivement et elle haleta face à la crispation presque douloureuse que ce bref contact avait provoquée entre ses jambes, comme un vide ayant besoin d'être comblé.

Si elle s’était crue prête, son corps, lui, paniquait encore un peu devant la menace d’une pénétration étrangère, tout en le désirant farouchement. Doucement, elle se rabaissa, avant de venir chercher l’une des mains de Lucy et la mener entre leurs deux corps. Les doigts de cette dernière vinrent aussitôt frôler son petit bouton et elle prit une inspiration soudaine avant de la guider un peu plus bas.

— S’il te plaît...

Lucy ouvrit lentement les yeux et Kat sentit sa respiration se couper face au brasier qui brûlait en eux. Son inconnue porta sa main libre à sa joue et très doucement, la caressa de ses doigts infiniment tendres. Puis elle descendit le long de sa gorge, jusqu'à son t-shirt où elle s'attarda un moment, effleurant un sein après l’autre, avant de descendre jusqu’à la jointure de ses cuisses.

— Ça ne peut pas marcher si tu es trop tendue, murmura-t-elle du bout des lèvres sans la quitter des yeux.

Sa caresse fut aussi légère qu'une plume, la touchant doucement, l'apaisant, tandis que ses doigts taquinaient légèrement son entrée. Kat ferma les yeux pour mieux ressentir les effleurements de cette main qui la caressait si délicieusement, lui offrant une sensation qui ne lui était pas nouvelle, mais que l’horreur lui avait fait oublier. Les doigts de Lucy accentuèrent petit à petit leur pression et Kat ressentit un plaisir intense la parcourir, un gémissement s’échappant de ses lèvres tandis qu’elle commençait à onduler des hanches afin de revivre la douce sensation à nouveau. Bien vite récompensée, une danse subtile et sensuelle commença entre elles, le corps de Kat ondulant dans un rythme ancien, avançant et reculant comme les vagues de l'océan tandis que Lucy la guidait et qu’elle la suivait.

Le regard brûlant de passion, Lucy modifia elle aussi ses caresses, accentuant davantage sa pression entre les jambes de Kat, attisant son petit bouton, faisant inexorablement monter le plaisir. Kat avait si chaud qu’elle avait l’impression de brûler de désir, d’envie et de passion. Sa peau brillait de transpiration et elle pouvait sentir la vague de jouissance monter en elle, incontrôlable. Avec un gémissement rauque, elle se pressa contre Lucy et se mordit les lèvres pour ne pas crier quand cette dernière délaissa son petit bouton d’amour pour poser sa main sur ses fesses, la pressant encore plus contre elle et accentuant ses mouvements

Le gémissement qui monta en elle provoqua néanmoins un faible sourire chez Lucy, et Kat se redressa à nouveau, se perdant dans une joie primitive et sensuelle. Lucy continua à la caresser, à la guider même si elle n'en avait plus besoin. Elle bougea sur elle, de plus en plus vite, la prenant de plus en plus profondément et continua jusqu’à ce que son ventre se noue et qu’elle eut l’impression qu’elle allait exploser. Elle se figea tout en gémissant, et Lucy la saisit soudainement par la taille tout en s'enfonçant encore plus en elle. La sensation fut électrisante et presque trop intense. Un éclair de jouissance la traversa et Kat explosa, un cri d'extase que rien n'aurait pu étouffer s’échappant de ses lèvres.

Peu à peu, l'orage se calma et elle s’écroula sur Lucy, affaiblie et tremblante. Cette dernière la serra aussitôt contre sa poitrine avant de glisser ses bras autour d’elle tandis que Kat sanglotait à moitié, la respiration saccadée.

— Ça va ? murmura finalement Lucy, ses mains caressant son dos dans des gestes apaisants.

— Oui, répondit Kat, la gorge serrée. C’est juste... je ne pensais pas que ce serait aussi agréable.

Les lèvres de Lucy se posèrent sur son front et Kat resta là, allongée sur elle, la tête nichée au creux de son cou. Les battements de son cœur et son odeur, douce et chaude, lui parvinrent et elle réalisa qu’elle se sentait parfaitement à l’aise, sur elle, dans cette chambre d’hôtel. Mieux protégée qu’elle ne l’avait jamais été.

Pourtant, elle ne connaissait rien de sa vie. Elle ignorait son âge, d'où elle venait, ce qu'elle aimait manger, lire ou regarder à la télévision. Ni même si elle avait quelqu’un dans sa vie ou non. Et pourtant...

Kat écarquilla soudainement les yeux. Oh mon Dieu, je ne le lui ai même pas demandé si elle avait quelqu’un dans sa vie ! Elle se sentit soudainement nauséeuse. Si Lucy était déjà engagée dans une relation, alors elle n’était pas la femme qu’elle croyait, et elle venait tout juste de commettre la plus belle erreur de sa vie. Elle ne pourrait pas supporter d'entendre qu'elle lui avait fait l'amour par pitié.

Un soupir s’échappa de ses lèvres. Elle pouvait bien évidemment fermer les yeux et faire comme si la pensée soudaine qu’elle venait d’avoir ne s’était pas immiscée dans son esprit, mais elle savait au fond que si elle avait commis une erreur monumentale, elle voulait en être au courant.

— Lucy... hum, tu as quelqu’un ? demanda-t-elle tout à coup.

Kat s’attendit à la sentir se tendre, mais au contraire, Lucy resta étalée sous elle, parfaitement relaxée tandis qu’une de ses mains remontait le long de son dos jusqu'à sa nuque qu'elle caressa doucement.

— Non, j’ai même récemment divorcé, répondit-elle enfin d’une voix calme avant de sourire contre sa tête. Tu peux rentrer tes griffes.

Surprise, Kat réalisa que ses ongles s’étaient légèrement enfoncés dans son épaule et elle retira vivement ma main.

— Pardon, balbutia-t-elle, gênée. Je ne voulais pas te faire mal.

Lucy l’embrassa sur le front.

— Il n’y a pas de mal, tigresse, la taquina-t-elle aussitôt, les yeux brillants.

— Tigresse ? s’étonna Kat avant de secouer la tête d’amusement. Je ne suis pas une tigresse.

Lucy glissa sa main libre sous le haut que Kat portait toujours pour venir caresser ses fesses nues et elle ronronna à son oreille :

— Oh si... une tigresse terriblement adorable, d’ailleurs.

Son souffle chaud contre sa joue poussa Kat à fermer les yeux et elle s’étira légèrement, avant de sursauter lorsque sa cuisse entra en contact avec un centre chaud et humide. Les doigts de Lucy se crispèrent aussitôt sur ses fesses tandis qu’elle inspirait soudainement.

— Pardon, marmonna aussitôt Kat, embarrassée.

— T’excuse pas, la rassura Lucy en lui donnant une légère tape sur le nez du bout de son doigt. Surtout pas pour ça, taquina-t-elle avant de s’approcher de son oreille. Je crois même que tu peux recommencer... autant de fois... que tu le désires...

Kat ferma les yeux, le désir montant de nouveau en elle, si bien qu’elle entendit à peine lorsque Lucy continua, le ton soudainement sérieux :

— Kat, je peux te poser quelques questions ?

— Quoi ? murmura Kat d'une voix distraite.

— Où en sont tes mauvais souvenirs ? continua doucement Lucy tout en venant caresser sa joue.

Quoi ?

Ses paupières s’ouvrirent péniblement et Kat cligna un instant des yeux avant de croiser le regard de Lucy. Son air sérieux et concerné la ramena soudainement à la réalité et elle comprit qu’elle faisait référence à cette brute qui l’avait violentée. Elle réfléchit un instant, et réalisa, avec surprise, que cela n’avait plus d’importance. Pas pour le moment. Bien sûr, une part d’elle était toujours en colère, et avait une irrésistible envie de le faire incroyablement souffrir pour ce qu’il lui avait fait. Mais aujourd’hui, sa féminité blessée avait triomphé sous le plaisir intense qu’elle venait de ressentir en faisant l'amour avec Lucy, et c’était le plus important à ses yeux. Lucy l’avait guérie.

Elle l’avait sauvée.

— Disparus, chuchota-t-elle en venant caresser les lèvres de Lucy du bout du doigt. Grâce à toi.

— D'accord, murmura Lucy avant de sourire. Seconde question : crois-tu qu'il te serait possible de te débarrasser de ce t-shirt ?

Kat haussa un sourcil de surprise avant de se redresser. Elles venaient tout juste de faire l'amour, et pourtant, elle ne pensait pas pouvoir l’enlever. C’était son armure — la seule chose qui l'empêchait de perdre pied. Un symbole bien plus important qu'un simple rempart à sa pudeur. Peut-être n’était-elle pas aussi guérie qu’elle le pensait, finalement. Son ravisseur l’avait déshabillée, forcée à rester nue en face de lui. Elle en avait eu horriblement honte. Elle ne savait pas si elle supporterait, même avec Lucy, de se retrouver entièrement dénudée.

Son regard bleu était calme et patient et elle réalisa qu’à nouveau, Lucy la comprenait. Mais qu’elle voulait aussi davantage. Elle réclamait sa confiance, sans aucun noir secret entre elle.

Elle voulait qu’elles deviennent réellement amantes.

Cette prise de conscience fut presque douloureuse pour Kat. Elles avaient fait l'amour, physiquement, mais il y avait encore un mur érigé entre elles. Lucy avait fait tout ce qu’elle lui avait demandé, et maintenant, elle voulait quelque chose en retour. Un quelque chose que Kat fut surprise de désirer elle aussi.

Baissant les yeux vers son t-shirt, elle réalisa que ses mains y étaient désespérément accrochées, et, dans une inspiration difficile, elle détacha ses doigts un à un avant de venir s’emparer de l’ourlet. Lucy l’arrêta en posant une main sur les siennes.

— Laisse, souffla-t-elle en venant caresser sa joue. Laisse-moi faire, d’accord ?

Kat se mordit la lèvre avant de hocher la tête et lentement, petit à petit, pour lui laisser le temps de protester, Lucy souleva le tissu jusqu’à dévoiler son ventre. Les dents de Kat accentuèrent leur pression sur ses lèvres, luttant contre son envie sauvage de rabaisser le tissu qui se soulevait peu à peu.

Le vêtement remonta jusqu’à la lisière de sa poitrine, et Lucy glissa ses mains sur sa peau, caressant son ventre avant de remonter un peu plus haut. Elle les glissa sous le tissu, attendant légèrement au cas où Kat refuserait, puis vint frôler ses seins, ses paumes douces et chaudes couvrants entièrement ses deux globes. Kat se sentit aussitôt réagir, ses tétons durcissant, comme s'ils savouraient le contact.

— Tu es magnifique, murmura Lucy en venant légèrement toucher la joue de Kat de ses lèvres. Magnifique.

Kat ferma les yeux et resta assise sur elle, sentant le doux contact de la toison de Lucy contre son sexe brûlant, de ses mains chaudes sur ses seins. Cette dernière les délaissa finalement, les laissant curieusement douloureux, pour de nouveau soulever son t-shirt. Le vêtement passa ses épaules et Kat leva les bras pour s’en délivrer.

Elle était enfin nue. L'air frais de la climatisation souffla sur sa peau en une caresse légère, et elle sentit les doigts de Lucy faire la même chose, effleurant ses épaules, ses bras, ses seins, son ventre. Mais Kat le sentit à peine. La main de Lucy se glissa derrière sa nuque, et après une légère pression, Kat comprit et sa laissa guider, plus bas, plus bas encore, jusqu’à ce que sa bouche se pose sur celle de Lucy.

Ses seins s'écrasèrent contre sa poitrine, et les tétons tendus qui frôlèrent les siens lui procurèrent un autre plaisir tactile qu’elle avait également écarté de son esprit. C’était délicieux. La langue exigeante de Lucy vint titiller ses lèvres et Kat l’invita aussitôt à entrer.

Les secondes s’écoulèrent, les minutes, et Lucy finit par laisser sa tête retomber contre les oreillers, la respiration sifflante, les paupières lourdes de désir.

— J'ai une autre question, haleta-t-elle.

— Laquelle ? demanda Kat, ne pouvant détacher ses yeux du spectacle qui s’offrait à elle.

Elle ne voulait pas que Lucy cesse de l’embrasser. Jamais elle n’avait autant apprécié un baiser auparavant, Lucy était diaboliquement douée. Elle se pencha davantage et mordilla sa lèvre inférieure avant de déposer des petits baisers avides sur sa bouche.

Lucy eut un rire musical qui la charma aussitôt.

— Tu me laisserais être au-dessus cette fois ? demanda-t-elle une fois calmée, ses mains faisant de doux va-et-vient dans son dos.

La question surprit Kat et elle sentit son sourire quitter son visage tandis qu’elle réfléchissait sérieusement à la question. Une part d’elle avait envie d’essayer, mais une autre, plus forte, avait peur de ne pas supporter et retourner là-bas, dans cette minuscule pièce, avec lui.

— Hé, murmura Lucy en venant caresser ses lèvres. Je ne t’y obligerai pas si tu ne t’en sens pas capable, tu le sais, pas vrai ?

Kat enfouie sa tête dans son cou et y embrassa la peau douce qu’elle y trouva avant d’acquiescer.

— Je sais, répondit-elle doucement avant de s’écarter.

Lucy la saisit aussitôt par la taille avant de la faire rouler sous elle, soutenant une partie de son poids sur ses avant-bras pour ne pas l'écraser tandis qu'elle entrelaçait leurs jambes. Les sens de Kat furent aussitôt bombardés de sensations nouvelles, et elle réalisa qu’en étant assise sur Lucy, elle avait eu le contrôle de la situation. Mais cette fois, cela allait être impossible ; elle se retrouvait à sa merci. Déjà, ses cuisses s’étaient écartées pour laisser place à l’une des siennes, mais elle réalisa qu’elle ne se sentait pas impuissante. Au contraire, elle se sentait parfaitement en sécurité, comme... protégée.

Lucy vint caresser ses cheveux tout en embrassant son front, son nez, puis ses lèvres.

— Ça va ? souffla-t-elle contre ces dernières, ses yeux étudiants son visage.

Kat lui offrit un sourire confiant et tendit les bras pour les nouer autour de son cou.

— Mieux que jamais, murmura-t-elle, poussant Lucy à sourire à son tour.

 

— Kat ?

La voix d’Elysia ramena soudainement Kat au présent et elle releva enfin la tête, notant l’air inquiet qui habitait le visage d’Elysia.

— La seule... la seule que je connais à avoir ce tatouage..., murmura-t-elle, confuse. C’est Lucy.

Le mot s’échappa de ses lèvres, et comme Ali Baba et son célèbre « Sésame, ouvre-toi ! », ce fut comme si elle venait tout juste de trouver la combinaison magique malgré elle. Un changement, bien que subtile, s’opéra juste sous ses yeux, et ce fut ébahie qu’elle observa des grains de beauté apparaître tandis que d’autres s’effaçaient, certaines parties du corps s’affiner là où d’autres s’affirmaient un peu plus, une toison devenir plus sombre, une poitrine se développer légèrement et lorsqu’elle remonta, elle retrouva ces boucles brunes dans lesquelles elle aimait inlassablement faire glisser ses doigts, ce sourire qui la poussait aussitôt à sourire en retour, ce regard aussi bleu que le ciel d’été, et qui s’assombrissait toujours sous la colère ou le désir.

La femme se trouvant sous ses yeux n’était plus Elysia, mais...

— Lucy. Tu... tu es Lucy, balbutia finalement Kat, abasourdie.

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26 août 2015

Chapitre 19

Mathilde attendit qu’Elysia ait fermé la porte avant de lui offrir son bras et tranquillement, elles rejoignirent Chloé et Kim qui les attendaient au bout de l’allée.

— Prête pour le deuxième round ? chuchota Elysia, désignant les deux jeunes femmes qui se tournaient le dos.

— Tu veux parler des deux cocottes minutes en pleine ébullition, là-bas ? Si Kim est du genre à être aussi possessive que Lyna, ça promet...

Elysia fronça les sourcils.

— Qu’est-ce que tu veux dire ?

— Tu as déjà rencontré Tawny ? demanda Mathilde.

— Le mari de Lyna ? Oui, il s’occupe de l’installation de la clim quelque part dans mon immeuble en ce moment.

— Il est beau garçon, hein ? sourit malicieusement Mathilde.

Elysia lâcha un rire.

— J’avoue qu’il faudrait être aveugle pour ne pas le remarquer.

— Exactement. Eh bien je faisais partie de ses groupies au lycée, il était tellement canon que toute les filles craquaient sur lui. Et comme Kat était sa meilleure amie, j’avais la possibilité d’être assez proche de lui.

— Coquine, la taquina Elysia.

— T’as pas idée, rit aussitôt Mathilde. Mais bien sûr, ça n’a pas plu à Lyna, même s’il lui a fallu du temps pour reconnaître qu’elle avait des sentiments pour lui. Au début, elle se retenait, mais ensuite, quand ils sont enfin sortis ensemble, c’est devenu autre chose. Kat était peut-être sa meilleure amie, mais moi, c’était plutôt l’opposé !

— Pourtant, quand on vous voit aujourd’hui...

Mathilde hocha la tête.

— Ça s’est calmé quand j’ai rencontré Aaron, expliqua-t-elle avant de rire. Avant ça, Lyna était une véritable tigresse ! Mais je ne l’en blâme pas, j’étais assez provocatrice.

— Il te plaisait tant que ça, Tawny ?

Mathilde secoua la tête, amusée.

— Non, c’est ça le pire, sourit-elle. Il était vraiment beau garçon, je pensais simplement qu’on aurait pu bien s’amuser. J’étais assez frivole à l’époque. Mais pour en revenir à nos moutons, ce que je voulais dire, c’est que ce n’est pas toujours évident d’entendre que sa chérie a vécu quelque chose avec une autre, surtout dans un contexte comme celui-là. Alors si Kim est aussi jalouse que Lyna...

— Ça risque d’être explosif, conclut Elysia en hochant la tête.

Elles entendirent justement Chloé marmonner alors qu’elles approchaient :

— ...intime ? C’était du sexe, y a absolument rien d’intime là-dedans.

Kim lui offrit un regard appuyé et Chloé soupira aussitôt de frustration tout en levant les mains au ciel. Elysia n’entendit cependant pas sa réponse car Mathilde lui souffla à l’oreille.

— Oups, je crois que le compte à rebours tant redouté vient d’être déclenché. On reste là, où on se met couvert ?

Les échanges de paroles entre Kim et Chloé passèrent très rapidement à de violents éclats de voix et Elysia répondit aussitôt :

— À couvert.

Mathilde lâcha un rire avant de se tourner vers les filles.

— On va vous laissez régler... ce que vous avez à régler, commença-t-elle tout en reculant, entraînant Elysia avec elle. D’accord ?

Aucune réaction ne lui parvint, chacune étant bien trop occupée à se disputer pour faire attention à elle, et Elysia tira Mathilde par le bras.

— Viens, vu comme elles sont parties, elles ne risquent pas de te répondre.

Mathilde acquiesça mais au lieu de prendre la direction de la maison, elle bifurqua soudainement sur la droite, vers l’accotement.

— Mathilde ! Mais qu’est-ce que tu fais ?! s’exclama aussitôt Elysia.

— Shhh ! répondit Mathilde en l’entraînant vers les buissons. Attention la tête.

— Mais —

Des branches venant s’agripper à ses cheveux la poussèrent à s’interrompre et elle se protégea du mieux possible.

— Mathilde ! se plaignit-elle tout en tirant sur la main qu’elle tenait toujours.

Mathilde s’arrêta enfin et posa un doigt sur ses lèvres afin de lui faire signe de se taire, avant de désigner quelque chose entre les buissons. Intriguée, Elysia jeta un œil et remarqua aussitôt que depuis leur position, elles avaient directement vue sur Chloé et Kim qui se disputaient toujours.

— Ça va ? murmura Mathilde en retirant plusieurs feuilles des cheveux d’Elysia.

Cette dernière hocha la tête avant de désigner la rue.

— Malin, sourit-elle, prenant appui sur le bras de Mathilde afin de s’accroupir à côté d’elle.

— Merci, répondit Mathilde en s’abaissant à son tour.

Elles reportèrent leur attention sur la rue et Elysia fut surprise par la violence avec laquelle Chloé et Kim s’exprimaient.

— Bon sang, Kim ! Ça fait une semaine qu’on est ensemble, tu t’attendais à quoi ? Que je vienne vers toi et te dise « salut, moi c’est Chloé, et ta boîte vient tout juste de m’embaucher parce que j’en avais marre d’être une pute » ? Ça marche pas comme ça !

— Non, mais t’aurais au moins pu me le dire avant qu’on se mette ensemble !

Chloé se figea aussitôt, et vu l’expression de son visage, ce n’était visiblement pas la réponse à laquelle elle s’attendait.

— Quoi ? souffla-t-elle. Alors quoi, si tu l’avais su avant, tu ne te serais pas engagée avec moi, c’est ça ? continua-t-elle, le ton à la fois douloureux et amer.

— C’est pas ce que j’ai dit, gronda Kim tout en croisant les bras sur sa poitrine.

— Ça en avait pourtant l’air.

 Kim soupira tout en levant les mains au ciel.

— Bon sang Chloé, arrête de toujours tout rapporter à toi ! T’es pas le nombril du monde non plus !

— D’accord, c’était quoi alors ? Hein ?!

— Je ne me serais pas sentie aussi conne si je l’avais su avant, voilà pourquoi ! Parce que visiblement, j’étais l’une des dernières au courant et quand t’es la copine de la fille en question, je trouve pas ça spécialement normal !

Chloé baissa aussitôt la tête et Elysia put dire que les propos de Kim ne la laissaient pas insensible, et la firent d’ailleurs certainement prendre conscience que Kim n’avait peut-être pas tout à fait tort.

Le silence les entoura, seulement brisé par leurs respirations saccadées, et quand Elysia pensa enfin voir leur dispute prendre fin, Chloé enfonça le clou.

— J’y peux rien, moi, si certaines ne savent pas tenir leur langue, marmonna-t-elle tout en donnant de petits coups de pieds dans le trottoir.

Kim secoua la tête tout en l’observant.

— Tu fais vraiment chier quand tu veux Chloé.

Et avec ça, elle tourna les talons et s’éloigna le long de la route.

Mathilde remua légèrement à côté d’Elysia.

— On devrait peut-être intervenir, non ?

Elysia observa Chloé hésiter alors qu’elle regardait Kim, mais elle finit par se raviser et s’assit simplement sur le rebord du trottoir, la tête entre les mains. Elysia tourna la tête vers Mathilde, acquiesçant silencieusement.

— Viens, dit Mathilde en s’emparant de sa main afin de les sortir des buissons.

Le chemin en sens contraire se fit plus facilement et lorsque la rue leur apparut enfin, Chloé sursauta avant de pousser un soupir de soulagement quand elle les reconnut. Mathilde se tourna vers Kim et porta ses mains à ses lèvres.

— Kim ! hurla-t-elle d’une forte voix.

Kim se retourna, surprise et Mathilde lui fit aussitôt signe du bras de les rejoindre. Kim hésita visiblement avant d’obtempérer et Mathilde se retourna vers Chloé.

— T’as exactement cinq secondes pour trouver quoi lui dire afin qu’elle te pardonne, et si j’étais toi, je me dépêcherais.

Chloé se redressa aussitôt, incrédule.

— Et c’est toi qui viens me dire ça ? Tout ça ne serait jamais arrivé si t’avais su tenir ta langue !

Mathilde serra des dents et Elysia ne put s’empêcher de rire, recevant aussitôt un regard noir.

— Excuse-moi, mais ce n’est pas comme si elle n’avait pas un point, là.

— Peut-être, marmonna Mathilde. Mais la question n’est pas là ; Chloé, arrête de faire ta tête de lard et pardonne-lui bon sang. C’est ridicule de vous prendre la tête pour un truc qui fait partie de ton passé en plus. C’est pas comme si elle te reprochait ce que tu as pu faire, elle te reproche juste le fait de ne pas l’avoir mise dans la confidence.

— C’est pas comme si j’avais eu l’occasion aussi, marmonna Chloé.

Mathilde leva les yeux au ciel.

— Dis-lui ça alors ! soupira-t-elle d’exaspération. Fais ce que tu veux, mais arrêtez de vous bouffer le nez pour des broutilles.

— Vous avez fini ? Ou je dois faire semblant de ne pas être là encore longtemps ?

Leur attention se porta vers Kim qui attendait patiemment, les mains profondément enfoncées dans les poches. 

— Tu es là depuis longtemps ? demanda Mathilde, légèrement embarrassée.

— Nan, mais étant donné que vous êtes les seules à faire un raffut pas possible, disons que j’ai tout entendu.

Chloé l’observa par en dessous, l’air mi-embarrassé, mi-indécis et Elysia décida de prendre les choses en main.

— Bon, commença-t-elle tout en glissant un bras autour de celui de Mathilde. On part devant, vous avez intérêt à vous être réconciliées avant de rentrer chez moi, sinon, c’est même pas la peine d’essayer.

De faibles sourires lui répondirent et quand elle regarda furtivement par-dessus son épaule quelques temps plus tard, elle vit qu’elles s’étaient assises côte à côte sur le trottoir.

— Ça a l’air plutôt bien parti, sourit Mathilde.

Elysia sourit à son tour.

— Ouais. Je pense qu’on peut dire qu’on forme une bonne équipe.

Elle leva une main et Mathilde la tapa aussitôt de la sienne.

— Prête à voir si on est aussi efficaces avec ma sœur ? demanda-t-elle, un sourcil haussé.

Elysia tendit un bras devant elle.

— Passe devant, je te suis.

💕

— Tu entends quelque chose ? chuchota Mathilde.

Elysia colla un peu plus son oreille contre la porte avant de secouer la tête.

— Rien du tout.

— Laisse-moi passer devant, répondit Mathilde en la poussant légèrement.

— Quoi ? Pourquoi ça ?

Mathilde colla à son tour son oreille contre la porte.

— Ben on sait jamais, imagine, elles sont peut-être en train de s’embrasser à pleine bouche ou pire, à essayer de faire un deuxième bébé !

— Mathilde ! s’exclama aussitôt Elysia avant d’éclater de rire. T’es complétement folle.

Mathilde lui offrit aussitôt un sourire amusé avant de doucement ouvrir la porte. Le faible son de la télévision leur parvint, ainsi que de quelques chuchotements, mais rien n’aurait pu les préparer à la vision qui s’offrit soudainement à elles quand leur attention se porta sur le canapé du salon.

— J’aurais bien envie de dire que je n’étais pas si loin que ça avec mes suppositions, commença Mathilde en penchant la tête sur le côté. Mais en vérité, je n’ai pas la moindre idée de ce qu’elles sont en train de faire.

Elysia pencha à son tour la tête, l’air pensif.

— Elle lui câline le ventre ?

— Ça expliquerait le t-shirt remonté, acquiesça aussitôt Mathilde en hochant la tête.

Leurs regards se croisèrent et elles éclatèrent aussitôt de rire, alertant ainsi Kat et Lyna qui ne les avaient toujours pas remarquées. Embarrassée, Lyna se mit à rougir mais quand elle chercha à recouvrir son ventre, Kat repoussa aussitôt ses mains. 

Elysia s’approcha, les yeux plissés.

— Dis donc toi, dit-elle en lui donnant un léger coup de pied dans la fesse. Ça va, on te dérange pas ?

Kat se redressa et quand Elysia voulut enchaîner par un « ah ben quand même ! » elle fut soudainement poussée vers l’avant, sa tête venant prendre place sur le ventre de Lyna.

— Kat ! s’exclama-t-elle tout en lançant un regard d’excuse vers Lyna.

— Écoute, l’intima Kat en positionnant correctement sa tête.

Elysia soupira avant de hausser un sourcil dans sa direction.

— Tu réalises au moins que tu es littéralement en train de coller ma tête sur le ventre d’une autre femme, hein ?

Kat leva les yeux au ciel.

— Écoute ! répéta-t-elle.

— D’accord, d’accord ! s’exclama Elysia avant de se concentrer.

Les minutes s’écoulèrent et quand Elysia s’apprêta à abandonner, elle sentit Lyna prendre doucement sa tête entre ses mains et la décaler légèrement vers la gauche.

— Tu sens là ? murmura-t-elle.

Elysia ouvrait tout juste la bouche pour répondre quand elle sentit quelque chose contre sa joue. Elle se redressa aussitôt.

— C’était lui, ça ? s’exclama-t-elle en touchant la partie en question avec sa main.

Lyna hocha la tête, un sourire sur les lèvres.

— Mathilde, tu veux sentir ? demande-t-elle en tournant la tête vers la sœur de Kat qui les observait depuis le fauteuil.

Mathilde s’approcha aussitôt et Elysia se décala légèrement, posant la main de Mathilde exactement là où se trouvait la sienne.

— Tu le sens ? murmura Elysia.

Mathilde fronça les sourcils avant de sourire franchement, elle hocha la tête.

— Félicitation Lyna, dit-elle en venant l’embrasser sur la joue. Et au papa aussi, taquina-t-elle.

— C’est quoi au fait alors ? s’exclama soudainement Elysia. Garçon ou fille ?

— Moi je sais..., les charria Kat depuis sa place à ses côtés.

Elysia la chatouilla aussitôt au niveau des côtes mais n’eut pas le temps de répondre que la porte d’entrée s’ouvrit, laissant apparaître deux demoiselles visiblement réconciliées si elle en croyait les sourires qui barraient leurs visages.

— Eh bien, ça a l’air d’aller mieux, taquina aussitôt Mathilde.

Chloé se contenta de lui tirer la langue tout en venant prendre place sur le fauteuil, tirant sur le bras de Kim pour qu’elle vienne prendre place sur ses genoux.

— Qu’est-ce que vous faites ? demanda-t-elle.

— Lyna nous laisse sentir son bébé, répondit Elysia. Mais là, elle allait surtout dire son sexe.

— Et ? enchaîna Kim, visiblement intéressée.

Lyna porta ses mains à son ventre avant de lever les yeux vers elles.

— Si on en croit l’échographie..., sourit-elle, ...c’est un petit bonhomme.

— Aww c’est trop chou, s’exclama aussitôt Mathilde.

— Parce qu’une fille, ça l’aurait moins été ? la taquina aussitôt Chloé.

Mathilde leva les yeux au ciel.

— Non mais je crois qu’on est déjà assez de filles comme ça, non ? rit-elle. Une de plus et Tawny aurait vraiment pensé à une coalition !

Sa réplique provoqua une tournée de rire et Elysia secoua la tête, amusée.

— Et le prénom ? demanda-t-elle.

- Kaden, sourit-elle. Un petit clin d’œil à la ville native de Tawny.

Un silence s’installa et Lyna leva les yeux au ciel.

— En Allemagne, soupira-t-elle.

— Tawny est allemand ? s’exclama aussitôt Mathilde avant de tourner la tête vers Kat. Tu le savais toi ?

Kat secoua négativement la tête et Mathilde feignit aussitôt un air horrifié.

— Oh mon Dieu, j’ai craqué pour un boche !

— Mathilde ! s’exclama aussitôt Lyna en lui mettant une claque sur la cuisse. Pour la peine, j’aurais dû te le dire dès le lycée, marmonna-t-elle dans un air renfrogné.

Mathilde éclata aussitôt de rire.

— Nan, ça ne m’aurait pas arrêtée, taquina-t-elle.

— Mathilde, commence pas, la prévint Kat dans un sourire en se redressant. Bon avec tout ça, on n’a toujours pas mangé. Pizzas ça vous va ?

Toutes répondirent en chœur :

— Parfait !

Elysia sourit. Ça résumait assez bien la situation.

23 août 2015

Chapitre 18

— Bon, commença Mathilde, mal à l’aise. On a des bières, ça intéresse quelqu’un ?

— Je t’aide, répondit aussitôt Kim en prenant la direction de la cuisine.

Mathilde la suivit, mais s’arrêta une fois arrivée à hauteur de Kat, lui pressant amicalement l’épaule tout en lui soufflant quelque chose à l’oreille. Kat hocha la tête et Elysia attendit que Mathilde se soit à son tour éloignée pour s’approcher à son tour et se glisser dans les bras de sa bien-aimée. Elle releva légèrement la tête afin de croiser son regard.

— Hé, tu sais que c’est pas sexy de bouder comme ça ?

Le sourire qu’elle espérait apparut, même s’il fut minuscule, et Elysia lui vola un baiser avant de redessiner ses lèvres du bout du doigt, s’émerveillant une fois encore de leur douceur.

— C’est mal parti, hein ? murmura Kat d’un ton désemparé.

Elysia grimaça.

— C’est sûr qu’on aurait pu partir sur de meilleures bases, mais... ça aurait également pu être pire, tu ne crois pas ? On a toute la soirée devant nous pour percer les abcès et repartir du bon pied.  Alors si tu veux mon avis... je pense au contraire que ça commence plutôt bien. À nous de faire en sorte que les choses aillent dans la bonne direction.

Kat l’observa un moment avant de sourire.

— Je ne sais pas ce que je ferais sans toi et ton optimisme, dit-elle. Je t’aime.

— Et je t’aime, répondit Elysia en venant l’embrasser à nouveau. File rejoindre Chloé avant qu’elle ne se décide à donner acte à ses pensées et ne détruise toute ma déco.

Kat lâcha un rire tout en hochant la tête et Elysia prit la direction de la cuisine.

À elles deux, elles devraient pouvoir y arriver, non ?

💕

L'ambianceétaitsi tendue qu'Elysia n'osait même pas bouger, de peur de faire le moindre bruit. Autour d’elle, personne ne parlait, et quand les regards se croisaient, ils se faisaient si durs qu’on avait du mal à croire qu’il s’agissait d’une bande d’amis.  

Une fois de plus, la cuisse de Kat frôla la sienne et Elysia se concentra sur sa main qu’elle tenait dans la sienne, sur son pouce qui ne cessait ses va-et-vient contre sa peau dans l’espoir de la rassurer.

Enfin, elle entendit Mathilde se racler la gorge à côté d’elle.

— Bon, si personne n’est décidé à se lancer, moi j’aurais une petite question à notre nouvelle recrue que je ne connais pas encore, sourit-elle en direction de Kim. On m’a donné ton nom, ton âge, ton poste de graphiste... mais je crois qu’on a omis le plus important.

Elle se pencha légèrement vers l’avant.

— Ne le prends pas mal mais... comment une fille qui se présente avec des cheveux roses et au moins deux piercings visibles, parvient-elle à se faire embaucher par l’une des plus grosses boîtes de la ville ?

Kim se pencha vers l’avant à son tour.

— C’est simple, elle fait faire du chantage au Big Boss et prie pour que ça passe, répondit-elle dans un clin d’œil.

— Du chantage ? s’exclama aussitôt Mathilde en se redressant.

Elysia leva les yeux au ciel.

— Elle te fait marcher. Même si elle ne s’est pas gênée pour lui dire qu’elle était simplement une œuvre d’art sur pattes.

— Vraiment ? s’étonna Mathilde tandis qu’elle se retenait visiblement de rire.

 Kim se contenta de hocher la tête.

— Je crois d’ailleurs que c’est mon audace qui l’a poussé à me donner une chance.

— Ça et le fait qu’elle est surtout plus douée qu’on ne pourrait le croire, précisa Chloé avant de détourner le regard quand Kim tourna la tête vers elle.

Un silence gêné s’installa à nouveau et Elysia remercia intérieurement Mathilde pour le briser une fois de plus.

— Et les piercings, tu en as d’autres ?

Kim hocha la tête.

— À l’oreille, dit-elle en tirant légèrement sur la partie en question, en révélant quatre autres. Et... hum...

Elle baissa les yeux vers son ventre avant de les observer à nouveau.

— Au nombril ? demanda Lyna, confuse, prenant pour la première fois la parole.

Kim secoua la tête.

— Non, euh, un peu plus bas.

Ses traits se recouvrirent progressivement d’une légère rougeur et quand Elysia nota le sourire amusé qu’arborait Chloé, elle comprit aussitôt.

— Oh, lâcha-t-elle avant de grimacer. Oh, ah, non ! Ça a dû faire un mal de chien ! s’exclama-t-elle en serrant les cuisses par réflexe.

— Mal ? s’étonna Lyna avant de reporter son attention sur Kim.

Ses yeux passèrent de son nombril à un peu plus bas et elle fronça les sourcils, confuse, puis son visage s’éclaira soudainement.

— Oh, répondit-elle avant de grimacer, serrant des jambes à son tour. Oh ! Oh non, le simple fait d’y penser...

Elle frissonna franchement et Elysia tourna la tête quand Mathilde se mit à ricaner à côté d’elle.

— Quoi, tu en as un aussi ?

— Oh non, non, moi je m’en suis tenue au tatouage, répondit Mathilde. Une ancre au niveau de l’aine, précisa-t-elle, avant de porter son attention sur Chloé. Et toi Chloé, tatouage, piercing ?

— Aucun, répondit Chloé avant de jeter un rapide coup d’œil vers Kim. Mon ancien... hum, contrat l’interdisait. 

— Oh, répliqua Mathilde, mal à l’aise d’avoir remis le sujet sur le tapis sans le vouloir. Euh, Lyn’ ?

Lyna secoua négativement la tête.

— Non plus, il faut croire que je suis trop sage pour ça, plaisanta-t-elle dans un demi-sourire.

— C’est pour ça que tu te cantonnes au jus de fruit quand on est tous à la bière ? taquina aussitôt Mathilde. Je t’ai connu moins sérieuse.

Lyna baissa les yeux et Elysia pencha la tête sur le côté, l’observant d’un œil nouveau un instant. Elle avait justement remarqué son refus de les suivre sur la bière, mais maintenant que Mathilde le soulignait, c’était comme si toutes les pièces du puzzle s’assemblaient soudainement. Sa visite surprise à minuit passé, son refus de boire de l’alcool, Tawny qui insistait pour l’accompagner ce soir.

Tout était lié, et la raison derrière tout ça la rendit soudainement euphorique.

— Je l’ai connu moins rayonnante aussi, sourit-t-elle finalement.

Moins rayonnante ? s’exclama aussitôt Chloé, confuse.

Elysia se mordit la lèvre avant de sourire franchement en direction de Lyna.

— Tes vêtements amples parviennent peut-être à cacher ton ventre, mais ton tour de poitrine supplémentaire ne passe pas inaperçu. Ajoute à ça que tu ne consommes que de l’eau ou des jus de fruits...

Une légère rougeur envahit les traits de Lyna, mais quand elle voulut répondre, Kat la devança, surprenant tout le monde.

— Tu es enceinte ? s’exclama-t-elle.

Lyna grimaça face au ton qu’elle avait utilisé, celui-là même qui suppliait qu’on réponde à la négative. Elle hocha cependant la tête et Elysia sentit aussitôt Kat resserrer sa prise sur ses doigts.

— De combien ?

Lyna sembla hésiter avant de répondre.

— Presque six mois.

Un silence plana de nouveau puis Kat se redressa d’un bon, arpentant la pièce comme si elle ne parvenait pas à rester en place.

— Six mois..., répéta-t-elle enfin d’une voix mêlant incrédulité, colère et déception. Rassure-moi, tu comptais quand même me l’annoncer, j’espère ?

Lyna croisa aussitôt les bras sur sa poitrine.

— Ça dépend, tu comptais m’apprendre un jour que tu fréquentais une escorte ? rétorqua-t-elle, sarcastique.

— Avec qui je couche ou ne couche pas ne regarde personne, gronda aussitôt Kat, visiblement irritée.

Lyna lâche un rire dénué d’humour.

— Ça je veux bien te croire, vu la façon dont j’ai appris ta relation avec Elysia.

— Oh je t’en prie, t’es la première à m’avoir poussée dans ces bras ! Ne me dis pas que tu étais si surprise que ça ! répliqua Kat en levant les mains au ciel.

— Ça n’a rien à voir, répondit Lyna en se redressant, le corps vibrant de colère. En tant qu’amie, j’aurais pensé que tu aurais au moins pris la peine de m’en parler. Que tu aurais au moins voulu partager ça. Avec moi !

Kat haussa un sourcil.

— Comme tu l’as fait avec ta grossesse ?

— Exactement, répondit Lyna en la regardant droit dans les yeux. J’ai toujours voulu que tu sois la première à connaître l’existence de mon bébé et qu’il ait la chance de t’avoir toi pour marraine.

Ses paroles semblèrent bousculer Kat puisqu’elle l’observa, visiblement déstabilisée, avant de hausser un sourcil.

— C’était il y a trois jours, il t’a fallu quatre mois pour te rendre compte que tu étais enceinte ?

Lyna soupira tout en se passant une main sur le visage.

— On a découvert le sexe du bébé ce jour-là, expliqua-t-elle enfin, souriant faiblement face au souvenir. Ça faisait un moment qu’on essayait, mais c’était pas forcément très fructueux. Alors, quand la nouvelle est tombée trois mois plus tôt, on s’est promis d’attendre avant de mettre l’entourage dans la confidence.

Elle haussa les épaules.

— On n’avait pas envie de se faire de faux espoirs. Mais ce jour-là, quand le sexe nous a été révélé, on ne pouvait plus se retenir. On avait prévu de venir te l’annoncer le lendemain mais on est tombé d’accord sur un prénom ce soir-là. 

Elle leva les yeux vers Kat et lui sourit tristement tout en poursuivant :

— Tu es notre meilleure amie, on voulait... on veut, que tu sois la marraine. Je n’ai pas pu attendre, je voulais tellement t’annoncer la nouvelle et partager ça avec toi. Je ne m’attendais juste pas à ce que tu ais de la compagnie.

Mathilde se tourna légèrement de manière à pouvoir observer sa sœur.

— Tu vas avoir du mal à ne pas lui pardonner, maintenant, souffla-t-elle, son regard lui intimant de faire juste ça.

Kat l’ignora et reporta son attention sur Lyna.

— Ça n’explique pas pourquoi tu as pris la fuite juste après nous avoir surprises. Alors quoi, mon homosexualité te pose soudainement problème ?

Lyna roula des yeux.

— Je t’en prie, Kat. Je n’ai jamais eu de problèmes avec ça, c’est pas aujourd’hui que ça va commencer. En fait...

A la surprise de tous, elle rougit légèrement avant d’ajouter :

— Tu me croirais si je te dis que j’étais jalouse ?

Elysia écarquilla aussitôt les yeux tandis que Chloé lâchait un yes ! victorieux

— Je le savais, sourit-elle, avant de chantonner : I kissed a girl and I liked it...

Lyna la fusilla du regard.

— Pas comme ça, précisa-t-elle avant de reporter son attention sur Kat.

— Tu es ma meilleure amie, depuis toujours, commença-t-elle avant de prendre à nouveau un air triste. Seulement... j’ai l’impression que tu passes ton temps à me fuir, et à force, je crois que je ne le supporte plus.

Elle leva une main quand Kat voulut l’interrompre.

— Quand tu es revenue de l’armée... Ne me méprends pas, j’étais vraiment en colère quand j’ai appris ce qui t’était arrivé, et te voir dans cet état... ça m’a fait mal. Mais j’étais tellement heureuse de te retrouver Kat, de retrouver ma meilleure amie. Et je me suis promis de tout faire pour t’aider. Mais, plus tu te rétablissais, plus je te sentais t’éloigner à nouveau. Avec Tawny aussi, mais il faut croire qu’il a eu la chance de t’aider à retaper quelques voitures. Difficile de l’ignorer dans ces circonstances, hein ?

— Lyna...

— Non, attends, la supplia Lyna en levant une main. J’ai bientôt fini. Quand tu m’as appelée pour te défendre au tribunal il y a plus de trois ans, je me suis dit, enfin, ça y est, elle revient enfin vers moi. Mais une fois le verdict tombé... tu as de nouveau disparue. Je n’ai jamais compris pourquoi. Je ne comprends toujours pas. Tu n’as visiblement aucun mal à faire entrer de nouvelles personnes dans ton cœur, pourtant moi, j’ai beau essayer, mais...

Elle soupira, la voix tremblante.

— J’aimerai juste comprendre pourquoi ma meilleure amie ne veut plus de moi.

La vue de Kat s’était tellement brouillée qu’elle ne la voyait presque plus. Sa poitrine lui faisait mal tellement elle était compressée, et sa gorge était si nouée qu’aucune parole ne parvenait à franchir la barrière de ses lèvres.

Alors, lorsque le premier sanglot monta, elle ne le retint pas. Et quand d’autre suivirent, elle se roula simplement en boule face à la douleur qui lui tordait le ventre. Elle avait mal. Elle avait mal parce qu’elle avait fait souffrir l’une des personnes les plus chères à son cœur pendant toutes ces années. Elle avait mal parce qu’elle réalisait que son absence l’avait affectée plus qu’elle ne l’aurait cru possible. Elle avait mal parce qu’elle n’avait même pas de raison valable à lui offrir.

Une main se glissa dans ses cheveux et la tira légèrement jusqu’à ce que son visage trouve refuge contre une épaule accueillante. Des paroles réconfortantes furent murmurées à son oreille mais elle pleurait si fort qu’elle n’en déchiffrait que la moitié. Mais ce n’était pas grave. Le simple fait de savoir qu’ils étaient là lui offrait le réconfort dont elle avait besoin.

Finalement, ses larmes se tarirent et elle resta simplement là à écouter les battements de cœur contre son oreille, à sentir la main qui remontait le long de son dos jusqu’à ses cheveux, à apprécier le souffle qui la caressait légèrement. Un verre d’eau lui fut finalement présenté et elle releva la tête pour croiser deux yeux pers qu’elle affectionnait plus que tout au monde. Elysia lui embrassa le haut de la tête avant de caresser sa joue.

— On va aller faire un petit tour avec les filles, je crois que vous avez besoin de discuter, toutes les deux.

Kat se racla péniblement la gorge.

— Tu es sûre ?

Elysia hocha légèrement la tête puis leva les yeux vers Lyna.

— Je te la confie. Je te demanderai bien de prendre soin d’elle, mais je sais que tu le feras de toute façon, finit-elle dans un clin d’œil. À tout à l’heure.

Kat les regarda disparaître à travers la porte avant de reprendre sa place sur le canapé. Elle laissa aussitôt sa tête retomber contre le dossier.

— Ça va ? demanda Lyna, l’inquiétude présente dans sa voix.

Kat se passa une main sur le visage avant de répondre.

— Non.

Elle ne put s’empêcher de sourire faiblement quand Lyna haussa les sourcils.

— C’était pas la réponse à laquelle tu t’attendais, hein ?

Lyna sourit à son tour. C’était bien, l’atmosphère était beaucoup trop chargée en émotion.

— Non, admit-elle. Alors dis-moi, qu’est-ce qui ne va pas ?

Kat réfléchit un instant avant de finalement se lancer.

— J’aimerais pouvoir te dire que je ne sais pas pourquoi je me suis éloignée de toi après être revenue de l’armée, mais ce serait mentir, parce que je le sais pertinemment.

Lyna baissa les yeux avant de glisser ses bras autour de sa taille et Kat comprit qu’elle redoutait ce qu’elle s’apprêtait à dire.

Elle prit une profonde inspiration avant de lâcher.

— J’avais honte.

— Quoi ? répondit aussitôt Lyna en levant la tête.

— J’avais honte... de ce qu’il m’avait fait. Je ne pouvais même plus me regarder dans le miroir. Et le fait que vous soyez au courant ne m’aidait pas. Je me sentais sale et... j’avais honte.

Elle relâcha un soupir tremblant avant de poursuivre.

— Tawny n’est pas du genre à parler des sentiments. J’ai toujours su que je pouvais compter sur lui si j’avais besoin, mais qu’il ne me pousserait jamais là où je n’ai pas envie d’aller.

— Mais moi si, répondit platement Lyna.

Kat dut se mordre la lèvre pour ne pas pleurer à nouveau.

— Lyna... c’est pas ce que j’ai dit.

— Je t’en prie, Kat, soupira Lyna, lui offrant un regard appuyé. C’est bien ce que j’ai fait la première fois que je t’ai revue, non ?

Kate secoua négativement la tête tout en s’emparant de l’une de ses mains.

— Justement, non. Toi, tu m’as aidée à faire mon premier pas dans la bonne direction. Moi... moi je n’ai fait que déballer mon linge sale, et je ne suis plus jamais parvenue à te regarder en face après ça.

Lyna voulut protester, mais le visage de Kat, couvert de larmes, lui rappela la douleur qui autrefois l’habitait, et elle fut soudainement transportée dans le passé.

 

Mardi 03 Juillet 2004, Orlando, Floride.

Frapper à la porte de l'appartement de Kat fut encore plus effrayant que ce que Lyna avait imaginé, et elle hésita avant de donner trois petits coups contre le battant. Il lui était venu à l’esprit hier soir, alors qu’elle était allongée sur son lit, que ça allait être la première fois qu’elle allait parler à une survivante d’une expérience aussi terrible. Et que cette personne était sa meilleure amie.

Cette pensée l’avait maintenue éveillée toute la nuit, couplée à l’inquiétude qui ne l’avait pas quittée depuis que Tawny l’avait appelé deux semaines plus tôt pour lui annoncer terrible nouvelle. Domiciliée à New York pour ses études, Lyna avait pris le premier avion direction Fort Campbell, où l’équipe médicale qui avait pris Kat en charge les avait à peine laissé la voir. Puis, ses examens terminaux approchant, elle avait dû repartir, laissant derrière elle une jeune femme brisée qui lui avait à peine adressé deux mots.

Deux semaines plus tard, Lyna n’avait pas la moindre idée de ce à quoi elle devait s'attendre, ni même si elle serait à la hauteur.

Comme s’il avait détecté son anxiété, ce dernier choisit justement ce moment pour ouvrir la porte et Lyna lui sourit instinctivement, mais celui que Tawny lui renvoya était crispé.

— Hé, murmura-t-il tout en écartant les bras.

Lyna s’y réfugia aussitôt, relâchant un soupir de contentement quand ses bras l’entourèrent. 

— Je suis vraiment content que tu sois enfin là.

Il fit un pas en arrière et entraîna Lyna avec lui à l’intérieur de l’appartement.

— Mathilde a accepté d’aller passer ses examens uniquement parce qu’elle savait que tu serais là. 

Il afficha un sourire forcé.

— Elle craignait que Kat ne soit pas très à l’aise si elle se retrouvait seule avec moi. Elle est dans sa chambre là. J'étais sur le point de regarder quelque chose à la télévision ; je pense qu’il vaut mieux que je reste ici pendant que vous parlez.

— Bien sûr.

Lyna resserra son étreinte puis rassembla son courage et rencontra son regard.

— Comment va-t-elle aujourd'hui ?

Le visage de Tawny s’assombrit et il serra des dents pour refouler son émotion.

— Elle est mal, Lyn’. Elle fait des cauchemars. Elle est triste, elle souffre et elle se blâme, et il n'y a rien que je puisse faire. J'essaie de la faire manger, de lui apporter des calmants, lui tenir la main... Je lui parle, mais il y a tellement de choses qu'elle ne veut pas me dire. Je ne me suis jamais senti si impuissant de toute ma vie. Je déteste ça.

— Te sous-estime pas Tawn’, je sais que tu aimes Kat plus que tout. Je suis sûre tu l’aides. Juste en étant là.

Tawny relâcha un souffle tremblant.

— Je ne sais même plus qui elle est, Lyn. Elle n'agit plus comme elle le faisait avant. La lumière dans ses yeux ? Elle est partie. Il l'a pris.

— Elle reviendra.

Sa gorge remua et Lyna sut qu’il retenait ses larmes.

— Je l'espère.

— Elle est forte. Elle s’en sortira. On va tout faire pour l’y aider, d’accord ?

Tawny hocha la tête.

— Tu as raison, je me sens juste un peu responsable. Je suis celui qui l’a poussé à te parler. Peut-être qu'elle n'est pas prête.

Lyna se colla à nouveau contre lui, sa tête venant reposer contre son épaule.

— Crois-moi, elle l’est. C’est jamais bon de garder tout ça à l'intérieur. Il n'est jamais trop tôt pour commencer la guérison.

Elle désigna le couloir situé sur la gauche.

— Sa chambre est là-bas ?

— Ouais. Je vais lui faire savoir que tu es ici.

Lyna le regarda marcher jusqu'à la porte située au bout du couloir et frapper doucement. Un moment passa, puis il entre-ouvrit légèrement le battant et passa la tête à l'intérieur. Quelques chuchotements lui parvinrent puis il recula d'un pas et fit signe à Lyna d’approcher.

Une fois arrivée à sa hauteur, Tawny posa une main dans son dos tandis que ses lèvres venaient embrasser sa tempe.

— Tu vas être géniale, je le sais.

Lyna se contenta de lui offrir un faible sourire en réponse, son cœur battant tellement fort qu’elle se sentait incapable de quoi que ce soit d’autre, avant de s’avancer légèrement. Elle rencontra aussitôt le regard effrayé d'une jeune fille qui semblait à peine assez âgée pour pouvoir s'acheter une canette de bière légalement. Étourdie tant par la jeunesse et l'épuisement inscrit sur son visage, Lyna ne put lui offrir qu’un faible geste de la main.

— Hé, Kat.

— Hé.

Assise les jambes croisées au pied du lit, Kat tripotait nerveusement sa couette du bout des doigts tout en évitant son regard. Lyna fut surprise de sentir de la colère et de la tristesse s’emparer d’elle face au son apeuré de sa petite voix et elle les repoussa avant d’adresser à Tawny un hochement de tête résolu.

— Ça va aller.

— D'accord.

Son regard se tourna vers Kat lorsqu’il ajouta :

— Je serai dans le salon si vous avez besoin de moi.

— Je sais, marmonna Kat. Ça ira.

Tawny hocha la tête d’un air entendu puis exerça une pression sur la main de Lyna avant de quitter la pièce, prenant soin de refermer la porte derrière lui. Lyna hésita, peu sûre de savoir où s'asseoir. Le mobilier était assez modeste, un lit, une table de chevet, et une commode, et elle n’était pas sûre de savoir comment Kat réagirait si elle envahissait son espace personnel.

Mais à sa plus grande surprise, Kat se déplaça vers la tête du lit.

— Tu peux t’assoir si tu veux.

Lyna soupira de soulagement.

— Merci.

Elle s’installa, le corps tourné vers Kat. Puis, sentant que cette dernière n’allait pas engager la conversation, Lyna décida de commencer, mais elle réalisa bien vite qu’elle n’avait aucune idée de ce qu’elle allait bien pouvoir dire.

Kat lui surprit à nouveau en brisant le silence.

— Je te trouvais déjà très belle au lycée, mais ce n’est rien comparé à ce que tu es devenue. Tu es sublime.

Prise au dépourvu, Lyna ne put s’empêcher de rougir face au compliment. Elle l’avait déjà entendu auparavant, mais la douce admiration qui apparut dans son timide regard la fit se sentir encore plus déséquilibrée.

— Et tu as gagné en amabilité, répondit-t-elle d’un ton légèrement taquin.

Kat ne réagit pas et elle n’en fut pas surprise, même si un peu déçue.

— Tu as toujours pour ambition de devenir avocate ?

Le cœur de Lyna se serra, la question de Kat prouvait combien la distance les avait éloignées l’une de l’autre.

— Oui. Je viens de terminer ma dernière année d’université, j’entame mon doctorat en jurisprudence à la rentrée.

Le regard de Kat dévia et sa gorge remua difficilement.

— C’est bien, murmura-t-elle d’une voix enrouée. Je suis vraiment contente pour toi.

Puis, sans que Lyna ne comprenne ce qui se passait, Kat fondit en larmes dans une rapidité désarmante qui l’alarma aussitôt. Pourtant, elle n’eut pas le temps de réagir, car aussi vite que c’était arrivé, ce fut terminé et, profondément embarrassée, Kat essuya son visage comme si elle essayait de chasser ses émotions.

— Je suis désolée.

— Non, je suis désolée, murmura aussitôt Lyna, posant une main entre elles sur la couette.

Elle voulait la rassurer mais elle n’était pas tout à fait sûre de ce qui l'avait bousculée ainsi, ou de comment la calmer.

— On n’est pas obligée d’en parler si c'est trop dur pour toi, Kat.

Kat secoua la tête, s'essuyant les yeux de ses mains tremblantes.

— J’y ai pensé pendant toute la journée. La nuit dernière, quand je n’arrivais pas à dormir, je pensais à ce que Tawny m’a dit, que ça finirait par aller mieux et combien en parler m’aiderait. Et... je suis pathétique, Lyn’. Je ne peux pas continuer comme ça.

Lyna essaya de capter son regard mais échoua.

— Alors... alors tu veux en parler.

— Oui, répondit Kat avant de recouvrir sa bouche lorsqu’un sanglot s’en échappa. Je ne sais pas ce que je peux dire à voix haute, mais j'ai besoin d'essayer.

— Tu n’as pas à me dire ce qu'il t’a fait. Tu n’as pas à me parler de ce que tu ne veux pas partager.

— Je sais, souffla Kat avant de pencher la tête et fermer les yeux, comme si elle réfléchissait profondément.

Après une minute, elle lui dit :

— Il m'a violée pendant près de deux heures. D’autres soldats ont pénétré dans le couloir et ont fait fuir ceux qui gardaient la porte. Il a pris peur. Il s’est rhabillé et il est parti à son tour. Je pensais qu'il allait me tuer quand il en aurait enfin terminé, et je le souhaitais presque...

Elle expira et baissa la voix jusqu’à chuchoter :

— À un certain moment, je voulais juste qu’il le fasse. Me tuer, pour que ça s’arrête enfin.

Deux heures. La réalité de ce que Kat avait connu frappa Lyna tel un coup de poing dans l’estomac, coupant son souffle. La nausée s’empara d’elle alors qu’elle essayait de s’imaginer la douleur et la terreur sur une telle période de temps prolongée.

— Ces hommes m’ont sauvée, sans le savoir. Je ne saurai jamais s'il m’aurait tuée ou non. Mais je ne peux pas m'empêcher de me le demander.

Kat ouvrit finalement les yeux.

— Je suppose que ça n'a pas vraiment d'importance. Je suis en vie, non ? C'est ce qui compte.

— C’est ce qui compte, oui, lui répondit doucement Lyna.

Pour la première fois depuis son arrivée dans la pièce, Kat rencontra enfin son regard. Elle relâcha un soupir tremblant.

— Tu m’as manquée.

Le cœur de Lyna se serra à nouveau, et la confiance qui transparaissait dans le regard de Kat lui donna envie de fondre en larme.

— Toi aussi, ma belle. Plus que tu ne peux l’imaginer.

— Mon père m’a offert un poste.

Ses joues rougirent légèrement.

— Je veux dire, il a besoin d’aide au garage, il pense que je devrais sérieusement y réfléchir.

— C’est excellent ça, sourit Lyna. Pourquoi ne suis-je pas surprise ? Tu as toujours eue les mains dans le cambouis, voilà ce que c’est de passer son temps libre dans une décharge, la taquina-t-elle.

— C’est pas n’importe quelle décharge, elle est vraiment cool.

— Je pense aussi.

Les paroles de Kat repassèrent dans sa tête et Lyna fronça les sourcils.

— Mais pourquoi avoir besoin d’y réfléchir ?

Kat se mordit la lèvre inférieure et Lyna devina aisément qu’elle refusait à nouveau de succomber aux larmes. Son ventre se serra face à l’agonie qui se reflétait sur son visage à vouloir garder toutes ces émotions à l'intérieur.

— Kat, murmura-t-elle. Si tu as besoin de pleurer, pleure. Il n'y a pas de honte à avoir besoin de faire sortir tous ces sentiments négatifs.

Une larme s'échappa et poursuivit son chemin le long de la joue de Kat, puis son menton se mit à trembler.

— Parce qu'en ce moment, je ne veux rien. Je pense à mon avenir et je me sens désespérée. Comme s’il n'y avait plus rien pour moi maintenant. Comme s’il avait volé ma passion. Ma motivation. C'est encore pire que d’avoir voler mon esprit, ma santé mentale. J’ai peur tout le temps. Les choses les plus stupides peuvent m'envoyer dans une panique totale. Je n’arrive même plus à me concentrer.

— Oh, ma belle...

Lyna avala difficilement, luttant contre ses propres larmes.

- Donne-toi du temps pour guérir. Crois-moi. Je te le promets, ça reviendra.

Kat lui offrit un air sceptique.

- Je suis allée à la clinique hier afin de réaliser le test du HIV, un mec était assis à côté de moi dans la salle d’attente. Je suis restée là une demi-heure complètement paralysée. J’avais peur de bouger, parce que j’arrêtais pas de repenser à ce que ce monstre avait fait de moi, encore et encore. J'ai pas entendu lorsque l’infirmière m’a enfin appelée.

Les larmes coulaient librement désormais, mais elle ne prit pas la peine de les essuyer. Lyna n’était même pas sûre qu'elle réalisait qu'elle pleurait.

— Tu penses que mes crises de panique s’arrêteront un jour ?

La douleur de Kat était si forte qu’elle déclencha une myriade d'émotions en Lyna, si bien qu’elle eut du mal à garder une voix contrôlée.

— Je pense que tu peux apprendre à les gérer.

— Comment ?

— Eh bien...

Lyna réfléchit un instant avant de relever la tête.

- Tu te souviens du divorce de mes parents ?

Kat cligna un instant des yeux, certainement surprise par le changement de direction dans la conversation, avant de hocher légèrement la tête. Elle savait mieux que personne combien les années durant lesquels les parents de Lyna n’avaient cessés de se battre l’un contre l’autre l’avaient affectées. Elle était tout juste adolescente et la maison avait ressemblé plus à l’enfer qu’autre chose pour elle.

— J'ai eu une thérapeute merveilleuse à l’époque, je pense qu’elle pourrait t’aider à apprendre comment éviter les flashbacks et traiter ce qui les a déclenchés.

La mâchoire de Kat se serra.

— Je ne veux pas aller en thérapie.

— Je ne le voulais pas non plus.

— Un thérapeute me ferait parler de ce qui s'est passé, pas vrai ?

— Elle ne m’a jamais forcé à parler si je n’en avais pas envie. Mais ce qui est drôle au sujet de la thérapie, cependant, c'est que j’avais vraiment envie de lui dire toutes ces choses que je ne pouvais pas dire à quelqu'un d'autre. Je ne pensais pas que ça aurait pu m’arriver, et pourtant...

Elle s’interrompit avant d’ajouter :

— J'étais très réticente à l'idée d’une thérapie, il m’a fallu un certain temps avant que je ne me décide à y aller.

Elle sourit en repensant à la semaine qui avait précédé cette décision.

— Ma cousine m’en avait parlé. Et Tawny et toi vouliez que j'y aille. Comme toi, je savais que quelque chose devait changer. J'avais du mal à gérer. Les gens qui se souciaient de moi me demandaient de recevoir de l'aide, et je le voulais, je le désirais tout autant que je détestais l'idée de parler avec un professionnel. Mais j’ai fini par me dire que ça ne pouvait pas me nuire. Après tout, je tentais de faire face à tout ce qui m’arrivait par moi-même, mais j’échouais lamentablement.

Kat resta silencieuse avant de murmurer :

— Tawny, hein ?

— Mmh, mmh. Il a été d’un grand soutien, tout comme toi.

Lyna fut heureuse de voir enfin un sourire se dessiner sur les lèvres de Kat, même s’il était minuscule. Son regard se posa sur la porte de la chambre, puis de nouveau sur elle et la triste nostalgie qui captura soudainement son visage rendit son regard encore plus perdu qu’avant.

— Tu as vraiment trouvé l’homme parfait.

— Il l’est, en effet.

Lyna sentit l’expression de son visage s’adoucir aussitôt à la seule pensée de Tawny, comme il le faisait toujours à chaque fois qu’elle pensait à lui, et elle fut heureuse de voir la bouche de Kat se former en un sourire momentané en réponse.

Lyna hésita, puis ajouta :

— Et toi, tu as quelqu’un ?

Le visage de Kat s’assombrit aussitôt et elle renifla avant de murmurer :

— Non, je crois pas. Je veux dire, non.

— Tu ne m’as pas l’air très sûre de toi.

Sa réponse déclencha un nouveau cycle de larmes et elle grimaça intérieurement, se sentant aussitôt coupable de la peine qu’elle ajoutait sur celle qui l’habitait déjà.

— Eh bien, j'ai quelqu’un. En quelque sorte. Depuis quelques mois. C’était plutôt sérieux mais...

Elle se mordit la lèvre si fort que Lyna s'attendit à voir du sang.

— Je ne sais pas comment être avec elle. Elle est venue à l'hôpital cette nuit-là, mais quand elle est arrivée près de moi...

Un air de dégoût passa sur son visage.

— Pour l'instant, je ne peux pas être près d’elle. Ou de n'importe qui, mais surtout elle. Je ne la mérite plus. Pas après ça... elle ne peut pas me vouloir encore après ça.

— Kat... Il faut du temps pour rétablir l'intimité. Pour que tu te sentes suffisamment à l'aise pour la laisser entrer dans ton espace. C'est normal ça, je te le promets.

— Elle a dit qu'elle m'attendrait, qu'elle désirait du long terme, mais il ne me semble pas juste de rester avec elle.

Lyna perçut aisément l’amour qu’elle portait à sa petite-amie rien qu’à la douleur dans sa voix quand elle lui en parlait, mais ce qu’elle réalisa surtout avec grande désolation, c’était que Kat semblait penser qu’elle faisait ce qui était pour le mieux pour chacune d'elles. Oh Kat...

— Je ne suis pas sûre de pouvoir avoir de nouveau des relations sexuelles avec elle. Je ne peux même pas me l’imaginer, pour dire la vérité. Pas après ce que cet homme a fait de moi.

— Ne dis pas ça, Kat, déclara Lyna. Ça prendra peut-être un certain temps, mais je pense qu’arrivera un jour où tu décideras de récupérer ton corps. Même si ça te semble impossible aujourd'hui, l'amour et l'intimité partagé avec une personne de confiance ne doit pas disparaître à jamais.

Kat lui offrit un regard larmoyant.

— J’aurais pensé que ça aurait été plus facile de laisser tomber ma garde avec une autre femme. Et pourtant, j’ai l’impression que ça me sera impossible.

— Il te faut simplement du temps. La thérapie t’aidera, j’en suis sûre.

Kat serra de nouveau la mâchoire et Lyna pu voir qu’elle essayait de réunir son courage afin de lui dire quelque chose de difficile. Il lui fallut seulement l'espace de quelques respirations.

— Deux heures, c'est long. Et l'idée de faire l’une de ces choses, et ce de manière volontaire, même avec une personne que j’aime...

Elle encercla son ventre comme si elle allait être malade.

— Je ne peux pas. Je ne veux pas.

La gorge de Lyna se serra et elle s’empara de son sac à main qui reposait à ses pieds.

— Laisse-moi de te donner le numéro de ma thérapeute, d’accord ? Elle est...

Kat tourna brusquement la tête.

— Je ne peux pas.

— Si, tu peux, répondit aussitôt Lyna, levant néanmoins une main dans un signe d'apaisement. Je vais te donner ses coordonnées, et tu pourras l’appeler une fois que tu te sentiras prête. Mais s'il te plaît... fais-le, d’accord ? Tu as beaucoup trop de choses auxquelles tu dois faire face, Kat, et je te promets que parler aide.

Elle laissa un petit sourire apparaître sur ses lèvres dans l’espoir d’alléger l’atmosphère.

— Elle est très gentille, et ne fait pas peur du tout.

Kat encercla ses bras autour de ses genoux, comme un enfant qui cherchait désespérément à se protéger.

— J’étais de dos quand il est arrivé près de moi. Il m'a bousculée. Maintenant, j'ai peur de marcher dans la rue, je ne supporte pas que quelqu’un soit juste derrière moi.

Le tremblement de ses mains qui s’intensifiait interrompit son discours et elle entrelaça ses doigts ensemble dans une lutte évidente pour arrêter la réaction instinctive de son corps à la peur que ses mots avaient suscités.

— Ne te laisse pas retourner à cette journée-là, lui dit doucement Lyna. C'est fini Kat. Tu es en sécurité, ici, avec moi.

Une des mains de Kat jaillit et vint enserrer celle de Lyna qui reposait encore sur la couette entre elles, et Lyna enroula aussitôt ses doigts autour des siens, son toucher semblant l’aider à se détendre. Quand sa main cessa de trembler, Lyna saisit l'autre et les tint toutes les deux serrées contre elle.

— Il a été si monstrueux avec moi, lâcha Kat dans un souffle, comme si elle ne pouvait pas supporter le fait d'entendre ses propres mots. Je savais, je sentais que ma peur l’excitait vraiment.

Kat la regarda avec une telle tristesse que le cœur de Lyna se serra.

— Bon sang, mais quel genre de monstre fait ça?

— Je ne sais pas, murmura difficilement Lyna.

La douleur de Kat était si forte qu’elle dut détourner le regard sous peine de s’effondrer sous ses yeux. Elle observa la chambre pour la première fois et remarqua aussitôt qu’elle ne possédait rien rappelant Kat. Pas de photos sur les murs, pas de bibelots, rien qui ne fasse allusion à ses intérêts. Sa chambre d’adolescente chez son père était complétement différente. À l’opposé même.

— C’est la chambre d’ami.

L’affection se glissa dans la voix de Kat.

— Tawny a insisté pour que je m’installe ici, ma chambre est emplie de celle que j’étais avant... je ne pouvais tout simplement pas rester dans un endroit où... où tout me rappelait ce qu’il m’avait fait. Ce qu’il m’avait pris.

— Il assure aussi dans le rôle du grand frère, hein ? répondit Lyna dans un triste sourire.

— Il est génial, acquiesça Kat avant que son sourire ne s’efface. Il m’a tellement soutenue...

— Je suis heureuse que tu ais quelqu'un, ça fait toute la différence.

Le visage de Kat s’assombrit à nouveau et elle étouffa un sanglot.

— Honnêtement, ça m’est difficile d'être dans la même pièce que lui maintenant. Je suis tellement gênée par ce qui s'est passé.

— Tu n'as aucune raison d'être embarrassée, tu n'as rien fait de mal.

Lyna pressa ses mains.

Il l’a fait. D'accord ?

Kat détourna son visage et ferma les yeux.

— J’ai l’impression que tout le monde me regarde et peut voir ce qu'il a fait. Je suis dégoûtante.

L’estomac de Lyna se serra face à la haine qui parut dans sa voix, une haine non pas contre lui, mais contre elle-même. Elle savait que peu importe ce qu’elle pourrait dire, ça ne servirait à rien. De simples paroles ne la feraient pas se sentir différemment. Tout ce qu’elle pouvait faire, c’était faire preuve d'empathie.

— Je sais que je peux simplement imaginer ce que tu as subit, mais Tawny t’aime, il ne pense pas moins de toi. Et peu importe l’impression que tu as, personne ne sait ce qui s'est passé en te regardant. Je te promets. Ça ne marche pas comme ça.

Sans ouvrir les yeux, Kat murmura :

— Il s’est servi de ma bouche sur lui, j'avais peur et j’avais mal et je voulais juste que ça s'arrête. Mais il était évident qu'il n'allait pas abandonner aussi rapidement... alors il m'a... il m’a...

Lyna resserra son emprise sur ses mains dans l’espoir de l'arrêter avant qu'elle n’en dise plus. Elle n’était honnêtement pas sûre de pouvoir gérer le fait d’entendre ce qu’il avait pu faire de sa bouche.

— Tout va bien maintenant, Kat. Nous savons toutes les deux que tu n’as pas voulu ce qu'il t’a fait.

Kat dévoila ses yeux bordés de rouge, paraissant vaincue.

— Même en étant entourée par un cadre familier, par des personnes chères à mon cœur,  je ne me sens pas en sécurité. Et je ne peux m’empêcher de me demander si je me sentirais de nouveau en sécurité un jour. Je suis épuisée, Lyna, et je ne sais pas comment continuer. Je ne sais même pas si j’en ai envie.

Horrifiée par le désespoir qu’elle entendit dans ses paroles, Lyna relâcha ses mains et ouvrit ses bras, la suppliant ouvertement de la laisser lui offrir son soutien. À son plus grand soulagement, Kat s'y effondra aussitôt, se cramponnant avec une force surprenante. Son corps se souleva alors que des sanglots brisés lui parvenaient et Lyna les balança d’avant en arrière tout en la tenant proche.

— Tu vas surmonter tout ça, murmura-t-elle à son oreille. Il ne doit pas gagner, d'accord ? Il va être puni pour ce qu'il a fait, et toi... toi tu iras bien. Je te le promets.

Kat hocha légèrement la tête depuis sa place entre ses bras.

— Je suis désolée, je me comporte comme un vrai bébé.

Lyna embrassa le haut de sa tête avant de murmurer :

— Non. Tu es très loin d’en être un.

— J’aurais dû attendre, ne pas y aller seule. J’avais déjà reçu des menaces, mais non, au lieu de ça, j’ai marché droit vers le danger. Parce que j’étais bornée, parce que je ne pensais pas qu’une chose aussi... affreuse pouvait se passer.

Un sanglot lui échappa et elle releva la tête afin de la regarder.

— Peut-être que je l'ai mérité. Pour avoir été si stupide. Si naïve.

La gorge serrée, Lyna repoussa ses larmes tout en la serrant encore plus fort contre elle.

— Hé, dit-elle en touchant son menton. Un homme t’a attaqué. Il t’a blessée. Tu n'as rien fait de mal.

— Je sais.

Sa réponse était automatique et Lyna pouvait voir qu'elle ne croyait pas ce qu'elle disait.

— Non, répéta Lyna avec force tout en la regardant profondément dans les yeux. Tu n'as rien fait de mal. D’accord ?

Kat hocha la tête, le menton tremblant.

Tu sais combien de fois j'ai marché seule dans la rue après la nuit tombée ?

Lyna baissa la tête, forçant Kat à maintenir un contact visuel lorsqu’elle essaya de détourner le regard.

— Combien de fois j’ai emprunté des petites ruelles à peine éclairées ? Combien de fois j’ai traversé des quartiers chauds sans jamais demander à être escortée ? Si ça avait été moi là-bas ce soir-là, si cet homme m'avait violée, tu penserais que je le mériterais ? Que j’aurais fait quelque chose de mal ?

Le visage de Kat blanchit aussitôt.

— Bien sûr que non. Mon Dieu, Lyn’, je ne veux même pas y penser.

— Personne ne pense que c’est de ta faute.

Lyna la fixa dans les yeux. Elle savait que son regard était intense, mais elle avait besoin que Kat le comprenne une fois pour toutes.

— On s’est tous retrouvé seul à un moment donné. Tu n'es pas la seule. C’était un coup de malchance.

Essuyant ses yeux d’un revers de main, Kat expira en tremblant.

— Tu vas me faire pleurer.

Lyna cala de nouveau sa tête sous son menton et se remit à se balancer.

— Excuse-moi, je veux juste que tu comprennes que tu n’y es absolument pour rien Kat, il est coupable.

— Je le déteste, dit doucement Kat.

La force de la haine qui transparaissait dans sa voix surprit Lyna mais la rassura également. Elle la faisait se sentir mieux, elle s’y raccrochait.

— Je veux qu’il meure.

— Je sais.

— Je ne veux pas me sentir de cette façon. Je ne suis pas censée me sentir de cette façon.

— Comment es-tu censée se sentir?

Kat hésita.

— Différente. Comme moi-même.

— Tu es toujours toi. Et je ne te blâme pas pour le haïr. Je le hais, aussi.

Sa main caressa doucement ses cheveux.

— Tu devrais essayer de dormir un peu, ma belle.

— Lyna ?

Cette dernière ralentit ses mouvements puis s’arrêta.

— Oui ?

— Tu veux bien me tenir comme ça un peu plus longtemps ?

La vulnérabilité qui transparaissait dans sa voix la rendit encore plus jeune que son âge.

— Ça m’aide.

Lyna posa sa joue contre ses cheveux sombre et recommença à les balancer, doucement et de façon paisible.

— Alors je continuerai aussi longtemps que tu en ressentiras le besoin.

💕

Kat avait dormi pendant plus de deux heures lorsqu'elle remua et cligna des yeux, hébétée. Lyna arrêta de caresser ses cheveux et sourit.

— Hé, murmura-t-elle. Tu t’es endormie.

Kat se redressa rapidement, les joues rougies.

— Je suis vraiment désolée.

— Ne le sois pas. Tu as fait une bonne sieste ?

Kat hocha la tête puis allongea le cou pour regarder le réveil.

— J’ai dormi combien de temps ?

— Quelques heures. 

Kat écarquilla les yeux de panique et Lyna reprit aussitôt sa main dans la sienne.

— Ça va, j’étais heureuse d'être ton oreiller.

— Oh bon sang, je suis tellement embarrassée.

Son regard évita celui de Lyna et elle s'agita, mais Lyna fut contente de voir qu’elle ne s’écartait pas.

— Tawny doit attendre.

— Je lui ai envoyé un texto pour lui faire savoir que tu te reposais, répondit Lyna en se redressant, soupirant d’aise de pouvoir enfin se dégourdir les jambes. Il a parfaitement compris.

Kat se leva à son tour et se passa une main dans les cheveux tout en regardant autour d’elle comme si elle reconnaissait à peine l’endroit.

— Je me sens mieux.

Elle se tourna vers Lyna et lui offrit un sourire, petit, mais authentique.

— Et je n'ai pas rêvé.

— Bonne nouvelle, sourit Lyna à son tour. Essaye de le faire à nouveau après mon départ, d'accord ?

Le sourire de Kat s’effaça.

— Je vais essayer.

Lyna s'approcha et plaça soigneusement ses mains sur ses épaules, la regardant les yeux dans les yeux.

— Tu vas t’en sortir, tu m’entends ?

Kat hocha la tête.

— Il t’a fait vivre l’enfer, Kat. Je ne peux même pas imaginer ce que tu as dû endurer.

Kat secoua la tête et ouvrit la bouche pour parler, mais Lyna l’interrompit.

— Mais il ne doit pas gagner. C'est comme ça que tu commenceras à guérir, quand tu décideras qu'il ne doit pas gagner. Tu peux et tu guériras. Ce ne sera pas facile, et ça ne se fera pas d’un coup, mais ça ira mieux. Je te le promets.

Kat tomba dans ses bras et l’étreignit fortement.

— Je vais essayer, dit-elle à nouveau, la voix chevrotante. Merci.

Lyna lui frotta légèrement le dos.

— Tu appelleras la thérapeute ?

— Peut-être.

Lyna sentit son cœur se serrer à nouveau face au doute qui transparaissait dans sa voix. Elle avait peur qu’elle ait déjà pris sa décision, et que cette dernière ne soit pas celle qu’elle espérait au plus profond d’elle.

— Elle va t’aider. Vraiment.

Kat se recula, essuyant ses larmes.

— Je vais y réfléchir.

C’était tout ce qu’elle pouvait lui donner ce soir, Lyna le savait. Pourtant, elle ne put résister à lui donner une autre suggestion.

— Et pense aussi à appeler ta douce, d'accord ? On dirait qu'elle se soucie vraiment de toi. Essaye de la laisser t’aider.

Kat détourna le regard mais Lyna bougea en même temps qu’elle, maintenant un contact visuel.

— Je sais que ce n'est pas facile, et parfois, quand les gens t’aiment, ils veulent que tu parles, même si tu penses que tu ne peux pas. Mais je te le dis dès maintenant, l'amour qu’elle a pour toi t’aidera certainement plus à guérir que toute autre chose.

Hochant rapidement la tête, Kat lui répondit :

— En parlant de ça, je te permets de retrouver Tawny.

Lyna sourit, comprenant qu’elle en avait assez eu pour la journée.

— Je vais y aller. Repose-toi.

— Oui, merci.

Kat ouvrit la porte de la chambre et se tourna vers Lyna, l’attirant dans un autre câlin rapide, puis s’écarta afin de lui permettre de sortir dans le couloir.

— Je repasse te voir très vite, d’accord ? dit Lyna.

Kat lui sourit puis ferma la porte dans un léger clic.

Lyna se sentit aussitôt soulagée, elle n’avait pas craqué devant elle. Pourtant, Dieu savait que l’envie l’avait prise à plusieurs reprises.

Elle se dirigea vers le salon et Tawny tourna les yeux vers elle à l'instant même où elle entrait dans la pièce. Leurs yeux se croisèrent et quand le sourire de Tawny s’effaça, Lyna comprit qu’elle faisait vraiment un mauvais travail pour cacher son état émotionnel tumultueux. Profondément préoccupé, Tawny se leva et contourna la table basse pour la rejoindre.

— Ça va ?

— On a eu une bonne conversation, elle a même réussi à obtenir quelques heures de sommeil.

— Tu penses que ça va aller ?

— Tant qu'elle y travaille, oui. Je lui ai donné le numéro de ma thérapeute. Encourage-la à l'utiliser, d’accord ?

Sentant la chaleur de la main de Tawny dans son dos, Lyna se détendit contre lui et il l’encercla aussitôt de ses bras.

— J'ai également suggéré qu'elle donne une chance à sa petite amie pour l'aider à traverser tout ça. Je ne suis pas sûre qu'elle suive mes conseils, mais -

— Non, c'est très bien.

Tawny expira, l'air heureux.

— Je ne m'attendais pas à ce que tu accomplisses un miracle. Mais tu l'as aidée à obtenir un peu de sommeil, et il semble qu’elle se soit un peu ouverte, alors... Je te l’avais dit, tu es géniale.

Il l’embrassa sur le front et Lyna se colla encore plus contre lui.

— Je ne sais pas, Tawny. Elle m’inquiète vraiment. Elle va vraiment mal. Je lui ai dit que je reviendrais très vite afin de veiller sur elle.

— Parfait. Elle va avoir besoin de toi.

Consciente qu’elle était sur le point de craquer émotionnellement, Lyna secoua frénétiquement la tête, lâchant un « elle va avoir besoin de toi aussi » tremblant avant de fondre en larmes. Inquiet, Tawny la serra aussitôt contre lui mais maintenant que le torrent avait commencé, Lyna ne pouvait plus le retenir. Ses sanglots s’intensifièrent au point qu’il lui devint difficile de respirer.

Semblant sentir la panique qui l’envahissait, Tawny frotta vivement une main dans son dos afin de la calmer.

— Respire, mon amour. Respire.

Secouant la tête, Lyna tenta de trouver la force de lui dire qu’elle ne pouvait plus respirer, qu’elle avait peur, qu’elle allait s’évanouir, mais elle ne pouvait pas former les mots. Au lieu de cela, elle s'accrocha à lui en désespoir de cause, terrifiée de lâcher prise.

— Je te tiens, lui dit alors Tawny tout en ralentissant le mouvement de sa main contre son dos.

Il la serra le plus près possible, jusqu'à ce que sa poitrine soit collée contre son torse et que Lyna puisse sentir le battement de son cœur, presque aussi tonitruant que le sien.

Lyn’, reste ici avec moi. Ça va. Tu es en sécurité.

Lyna ferma les yeux et canalisa toute son énergie afin de se sortir de cette spirale. Tawny avait raison, elle était en sécurité. Dans le cercle de ses bras, rien ne lui ferait de mal. Peu à peu, sa respiration se calma et ses larmes ralentirent. Sa poitrine continuait à lui faire mal, mais le pire était derrière elle.

— Hé, qu'est-ce que c’était, ça ? demanda Tawny, soucieux.

Lyna ouvrit les yeux mais ne recula pas sa tête de son épaule.

— Il l'a violée pendant deux heures.

Tawny resserra son étreinte.

— Je ne peux même pas imaginer ce à travers quoi elle est passée.

— Honnêtement, je ne peux pas non plus. Deux heures, Tawny. Deux heures de relations sexuelles forcées, de torture, d'humiliation.

— Pas étonnant qu'elle soit dans cet état aujourd’hui.

La colère s’était glissée dans sa voix, même si Lyna savait qu’il avait essayé de l’étouffer.

— Elle ne méritait pas ça.

— Elle est tellement brisée, Tawny. Elle est tellement mal. Je lui ai dit que ça irait mieux, mais la vérité c’est que je n'ai aucune idée de comment elle se sent en ce moment. Deux heures, Tawn’.

Sa poitrine se serra alors qu’une vague de colère impuissante s'écrasait sur elle.

— Elle est passée par tellement d’horreur, et je ne peux même pas la débarrasser de ces putains de cauchemars. Qui suis-je pour lui dire que ça ira mieux ?

— Elle ira mieux.

La voix de Tawny était douce, mais pleine d'autorité et Lyna sentit son menton se mettre à trembler.

— Elle est juste une enfant. Elle ne devrait pas avoir à faire face à tout ça, et elle ne devrait certainement pas avoir l'impression qu'elle n’a plus d'avenir. Il doit être puni, pour elle.

Tawny encadra son visage dans ses mains alors que ses propres yeux débordaient de larmes.

— Je t'aime, Lyna, et je n'ai jamais été aussi fier de toi. Je sais combien ce soir a été difficile. Je sais combien tu as donné de toi-même pour Kat là-dedans. Et je pense ... Je pense que tu es géniale. Et s'il y a quelque chose que je puisse faire pour te faire sourire en ce moment, n’importe quoi, je veux le faire. Parce que tu ne devrais pas avoir à te sentir comme ça, non plus.

Emportée par l'émotion intense et pure qui jaillissait de Tawny, Lyna se pencha pour lier leurs bouches ensemble. Tawny resta très calme et ne fit aucun effort pour approfondir le baiser, mais frotta ses pouces contre ses joues avec une tendresse déchirante. Fermant hermétiquement les yeux, Lyna murmura :

Juste, s'il te plaît, ne me lâche jamais.

Tawny secoua la tête, serrant ses mains sur son visage, la gardant près de lui.

— Je ne le pourrais pas. Même si je le voulais.

Lyna sourit.

💕

— Je sais combien tu essayais d’être courageuse pour m’aider. Je l’ai toujours su, Lyn’, lui assura Kat en prenant sa main dans la mienne. Et je l’ai toujours grandement apprécié.

— J’aurais simplement aimé que ce soit suffisant... pour que tu restes près de moi.

— Oh Lyn’, souffla Kat, l’émotion la gagnant à nouveau. Bien sûr que c’était suffisant. Je t’en supplie, ne pense pas que ça venait de toi, parce que ce n’est absolument pas le cas. C’était moi, c’était comme si j’étais en train de mourir de l’intérieur. J’étais persuadée que tout le monde connaissait la vérité, qu’ils pouvaient le voir dans chacun de mes mouvements, dans chacune de mes paroles. J’étais tellement embarrassée. Je n’avais pas envie que les gens parlent de moi. Je n’avais pas envie que les gens me regardent. Et toi et Tawny savaient. Te parler cette nuit-là m’avait fait du bien, mais ensuite... J’ai eu peur de ce que tu pouvais penser. De ce que tu pouvais ressentir. Que tu ais ce regard. Que tu me vois telle que j’étais. Sale et dégoutante et...

Ses paroles furent coupées court par une main qui se posa soudainement sur ses lèvres avant de dévier pour venir caresser sa joue.

— Jamais Kat, jamais, tu m’entends ? lui intima Lyna en la regardant droit dans les yeux, la voix tremblante. Tu es ma meilleure amie et je t’aime. Et Dieu sait que je tuerais cette ordure de mes propres mains si je le pouvais. Il n'y a rien, absolument rien dont tu doives avoir honte.

— Je sais. Je le sais aujourd’hui. Mais à l’époque... j’étais complètement brisée.

Lyna hocha faiblement la tête tout en s’essuyant les yeux d’un revers de main.

— Tu sais, j’ai passé les années qui ont suivies à me dire que je donnerais n'importe quoi pour avoir ne serait-ce que dix minutes seule avec ce type.

— Et moi à souhaiter qu’il meurt dans d’atroces souffrances.

Lyna hocha la tête avant de relever les yeux vers Kat, hésitante.

— Tu vas plus me fuir alors, pas vrai ?

Kat vint aussitôt la prendre dans ses bras avant de murmurer à son oreille.

— Jamais. Je te le promets.

Lyna resserra son étreinte puis s’écarta, un petit sourire sur les lèvres.

— Tant mieux, parce qu’il est hors de question que mon petit bout grandisse sans toi. Surtout quand on sait qu’il te doit la vie.

Kat l’observa avec confusion.

— Je ne suis pas sûre de comprendre...

— Moi et Tawny, cette nuit-là... c’était toi, pas vrai ? demanda-t-elle en l’étudiant intensément. Tu avais tout calculé avant de partir pour l’armée.

Kat sourit.

— Tu veux dire que ça a marché... exactement à ce moment-là ?

Lyna hocha frénétiquement la tête avant de lui raconter.

 

Un rayon de soleil venu prendre place sur son visage la poussa à froncer les sourcils et elle tourna la tête pour échapper à la lumière aveuglante, s’éveillant lentement. Ça faisait longtemps qu’elle n’avait pas aussi bien dormi, surtout après un lendemain de fête. Elle se sentait reposée, revigorée, si bien qu’elle garda ses paupières closes, savourant le bien être qui l’étreignait. La chaleur de la couette qui l’enveloppait lui offrait un cocon oh combien confortable et elle ne put retenir un soupir de contentement.

Jusqu’à ce que le lit sous elle se mette soudainement à bouger.

Et qu’une érection matinale très enthousiaste ne frôle sa cuisse.

Surprise, elle se figea. Elle n’avait pas bu au point de ramener un inconnu, quand même ? Un bras enserra sa taille et elle réalisa que ses jambes étaient emmêlées avec d’autres, ce qui expliquait très certainement pourquoi elle le sentait si... volumineux contre elle.

Bon sang, mais combien mesurait-il ?

Les joues rougies d’avoir eu une telle pensée, elle bondit finalement hors du lit quand une main endormie se rapprocha un peu trop de sa poitrine à son goût et elle croisa aussitôt le regard interloqué de Tawny qui semblait aussi surpris qu’elle.

Lyna se rappela alors son sexe contre sa cuisse, et elle ignora l’embarras au profit de la colère.

Elle lui avait laissé le canapé, et voilà qu’il se retrouvait dans son lit à frotter sa rigidité contre elle !

— Je peux savoir ce que tu fiches dans mon lit ? demanda-t-elle en posant les poings sur ses hanches.

— Lyna, tu…

— Et tu as intérêt à avoir une excuse en béton ou je te promets de faire de tes testicules de la chair à pâté !

Tawny haussa les sourcils avant de fixer un point sur sa droite.

— Je ne sais pas comment je suis arrivé ici, mais tu devrais…

— Comment ça, tu ne sais pas ?! s’exclama aussitôt Lyna, incrédule. Je te laisse sur le canapé, et je me réveille avec toi tout autour de moi ! Sans compter ta... ta...

— Lyna, tu es…

— Et je te prierais de me regarder quand je te parle ! gronda-t-elle.

Tawny serra des dents avant de croiser son regard.

— Très bien ! s’irrita-t-il à son tour. Je tenais juste à te faire remarquer que tu es en petite tenue !

Hein ?

Lyna abaissa les yeux sur son corps et remarqua avec horreur qu’elle ne portait qu’une petite culotte et débardeur qui ne cachait pas grand-chose. Sans réfléchir, elle s’empara du drap et l’entoura autour de son corps avant de réaliser que ce faisant, elle venait de dévoiler le torse finement sculpté de Tawny, ainsi que le boxer qu’il portait.

Et la jolie bosse qui allait avec.

Arg !

La gorge sèche, elle se retourna rapidement pour tenter de cacher ses joues rougies. Puis, une fois sûre que son visage était neutre, elle se tourna de nouveau vers Tawny qui la dévisageait d’un air gêné mêlé d’autre chose qu’elle n’arriva pas à déchiffrer.

— La vue te plaît ? lui demanda Tawny d’un ton taquin.

Lyna sentit ses joues s’enflammer de nouveau et elle détourna le regard tout en marmonnant :

Ça t’apprendra de m’avoir reluquée.

— Reluquer ? s’exclama aussitôt Tawny. Je te rappelle que c’est toi qui m’as dit de te regarder !

— Tu aurais pu me dire que je n’avais rien sur le dos !

— Tu m’en as empêché ! répliqua Tawny en dégageant une partie du drap pour se couvrir.

Cette conversation ne rime à rien. Lyna soupira et reprit sa place sur le lit, prenant appui contre les oreillers alors que sa colère s’envolait peu à peu.

— Bon, de quoi est-ce que tu te souviens ? demanda-t-elle au bout d’un moment.

Tawny lui jeta un coup d’œil comme pour vérifier son état d’esprit avant de répondre.

— Tu es partie te coucher, j’ai allumé la télé et…

— Et ? interrogea Lyna en se redressant sur un coude pour le fixer.

Tawny fronça les sourcils, pensif.

— Et je sais pas, je me suis certainement endormi, soupira-t-il en venant se frotter les yeux. Qui s’amuserait à nous mettre à moitié nus dans le même lit ?

— Il n’y a pas cinquante réponses possibles à cette question, maugréa Lyna. Kat, probablement aidée par Mathilde. Ferme les yeux, je veux m’habiller.

— J’ai déjà tout vu, je te rappelle, répondit Tawny avant de lever les mains en signe d’apaisement quand Lyna lui asséna un regard noir. D’accord, d’accord, marmonna-t-il avant de lui tourner le dos.

Lyna se dirigea vers sa penderie et sélectionna des vêtements propres avant de s’immobiliser quand la voix de Tawny lui parvint à nouveau.

— Tu sais, je comprends pas pourquoi tu t’emportes comme ça, commença-t-il d’une voix simple. C’est pas comme si on avait fait quelque chose, hein.

Le ton blessé et confus lui parvint aisément et Lyna sentit sa poitrine se contracter. En vérité, ses sentiments pour son meilleur ami n’avaient cessé de se renforcer avec le temps, lui rendant de plus en plus difficile le simple fait d’être en sa présence tout en sachant qu’il n’était justement que ça : un ami. Se réveiller au creux de ses bras était une scène qui avait hanté ses rêves pendant tellement de fois qu’elle ne les comptait même plus. Mais les voir se réaliser de cette manière lui était trop douloureux. Elle faisait partie de ces gens qui préféraient ne rien avoir plutôt que de n’avoir qu’un peu.

Elle se mordit la lèvre tout en se retournant, l’observant alors qu’il jouait avec le drap d’un air absent. La vérité, c’était qu’elle était morte de trouille, terrifiée à l’idée que ses sentiments ne soient qu’à sens unique. Et par-dessus tout, elle avait peur qu’en lui déclarant sa flamme, leur relation ne soit plus la même et qu’ils ne se parlent plus du tout. Alors pendant tout ce temps, elle s‘était tue et elle avait observé toutes ces rivales qui défilaient dans ses bras.

Sans réfléchir, elle le rejoignit et posa sa main sur celle de Tawny, sentant son cœur s’emballer à la seconde près où leurs peaux se touchèrent. Elle leva la tête et croisa le regard sombre de Tawny, il semblait surpris. Lentement, sa main glissa le long de son bras et elle se rapprocha de son corps. Un frisson la parcourut et elle s’arrêta sur son épaule, sa poitrine frôlant son torse musclé.

Voyant qu’il ne réagissait toujours pas, elle s’empara de sa main pour la poser sur sa taille avant de venir caresser doucement sa joue, ses doigts descendant lentement jusqu’à sa bouche dont elle redessina les contours. Avec bonheur, elle vit son visage se pencher vers elle et bien vite, leurs lèvres se frôlèrent. Désirant plus que ce simple contact, Lyna se hissa un peu plus contre lui pour ravir à nouveau ses lèvres. Leur baiser fut doux, puis sa langue vint caresser ses lèvres qu’il entrouvrait aussitôt, permettant ainsi à leurs langues de se trouver, se cajoler. Ses bras se resserrèrent autour de sa taille, rapprochant leurs corps qui s’épousaient à merveille, leurs arrachant à tous deux un gémissement. Quelques minutes plus tard, ils se séparèrent à bout de souffle et Lyna ne put détacher son regard de ses joues rosies, de son souffle chaud caressant son visage. Elle le savait d’avance, jamais elle ne se lasserait de ce spectacle. Son regard croisa le sien et elle y lut du bonheur mais aussi de la perplexité.

— Je t’aime, confessa-t-elle simplement, surprise de réaliser combien les mots sonnaient juste à ses oreilles.Je t’aime depuis un moment. Et ça m’est difficile de t’avoir auprès de moi alors que tu ne m’es pas accessible.

Elle lâcha un petit rire gêné.

— Enfin, je devrais dire « étais », non ? demanda-t-elle, incertaine.

— Mais…tu… Enfin, et Chris ?

Lyna roula des yeux tant sa question lui paraissait bête, mais s’arrêta aussitôt quand elle remarqua son air vexé.

— Tawny, on a jamais été ensemble, lui expliqua-t-elle doucement. Enfin, pas vraiment. C’était juste comme ça.

— Oh.

Lyna l’observa, confuse.

— Tu... croyais que c’était sérieux ?

— Non, répondit aussitôt Tawny. Enfin, je l’espérais, avoua-t-il en venant caresser sa joue.

Lyna sentit ses yeux se fermer d’eux-mêmes.

— Tu n’as pas à t’inquiéter à son sujet, tu es et resteras toujours le seul pour qui mon cœur bat.

Tawny lui sourit aussitôt.

— Toi aussi, murmura-t-il et Lyna afficha un sourire quand il se pencha vers son oreille et murmura : « je t’aime ».

14 août 2015

Chapitre 17

— Tawny... j’ai dit non, répéta Kat en se passant une main sur les yeux.

À côté d’elle, Elysia se maquillait légèrement tout en ricanant et elle lui donna un léger coup de hanche avant de prendre appui contre le lavabo. Tawny avait appelé peu de temps après qu’elles soient sorties de la douche, et depuis, Kat bataillait afin qu’il comprenne enfin qu’il n’avait pas sa place parmi eux à la soirée de ce soir. 

Kat avait eu la gentillesse de le mettre en haut-parleur pour qu’Elysia puisse entendre de ce qu’ils se disaient.

— Donc tu invites ma femme, mais moi, j’ai pas le droit de venir ?

Kat leva les yeux au ciel avant d’avancer légèrement le téléphone quand Elysia voulut répondre.

- Tawny ? dit-elle en rangeant son mascara dans sa trousse à maquillage.

Un silence surpris lui répondit, puis Tawny parla à nouveau.

— Oui ?

— C’est une soirée entre filles, alors à moins que tu aies changé de sexe entre temps, tu n’es pas invité.

Kat ricana aussitôt et Elysia l’embrassa furtivement sur la joue avant de ranger sa trousse dans le meuble situé sous le lavabo.

— Kat est ma meilleure amie, vous ne pouvez vraiment pas faire une exception ?

Elysia fronça les sourcils.

— Mais qu’est-ce qu’il a à être aussi insistant comme ça ? chuchota-t-elle.

Kat haussa les épaules avant de rapprocher le téléphone de ses lèvres.

— C’est le fait de laisser Lyna toute seule qui t’embête ? Parce que tu sais, c’est une grande fille, elle peut très bien passer toute une soirée sans son gros nounours.

Tawny grogna et elle poursuivit, fière d’elle :

— Sérieusement, Tawny, t’as pas autre chose à faire ? Je sais pas moi, organise un truc avec tes potes. Profite de son absence justement !

— C’est déjà prévu..., marmonna la voix à l’autre bout du fil.

Kat haussa les sourcils.

— Ben alors, pourquoi est-ce que tu insistes pour venir ?

— Pour rien, soupira-t-il avant de se racler la gorge. Prends soin d’elle d’accord ? Sinon, attends-toi à ce que je vienne te botter les fesses, taquina-t-il.

Kat lâcha un léger rire.

— Promis Tawn’, passe une bonne soirée.

— Vous aussi.

Kat raccrocha et Elysia lui adressa aussitôt un regard interrogateur.

— Qu’est-ce qu’il a à réagir comme ça ?

— Je sais pas, peut-être parce qu’il se sent mis à l’écart ? répondit Kat dans un regard appuyé.

Elysia leva les yeux au ciel.

— Mais c’est une soirée entre filles ! gémit-elle, excédée. T’as déjà vu un mec dans une soirée entre filles toi ?

Kat feignit un air songeur avant de sourire.

— Le stripteaseur ?

Elysia lui asséna aussitôt une tape sur les fesses.

— C’est une soirée entre filles, pas un enterrement de vie de jeune fille.

— Dommage, au moins là, j’aurais été sûre de m’amuser, soupira Kat, l’air boudeur.

Elysia s’empara de sa main afin de l’entraîner dans les escaliers, puis vers le salon.

— Tu plaisantes ? Les femmes deviennent folles dans ce genre de soirées. Et puis, tu as vu comment elles déguisent la future mariée ?

Elle frissonna.

— Je suis sûre que c’est dans l’unique but de lui faire du chantage plus tard.

Le sourire qu’elle espérait apparut sur les lèvres de Kat et elle l’arrêta juste avant qu’elle n’ait eu le temps de s’assoir sur le canapé.

— Allez Kat, la rassura-t-elle en entourant sa taille de ses bras. Je suis sûre qu’on va bien s’amuser.

Ce fut à Kat de lui offrir un regard appuyé avant de relever la tête lorsque la porte s’ouvrit soudainement, laissant apparaître Mathilde. Contrairement à sa sœur, qui portait des tongs, un bermuda et un t-shirt à manches courtes légèrement décolleté, Mathilde avait opté pour une légère robe d’été qui laissait deviner les formes de son corps et dont le bas, évasé, ondulait avec élégance et découvrait ses jambes fines jusqu'à mi-cuisses.

Elysia sourit. Elles n’auraient pas pu faire plus différent si elles l’avaient voulu.

— Je sais, je sais, je n’ai pas frappé, s’excusa aussitôt Mathilde avant que l’une d’entre elles n’ait eu le temps de prononcer un mot. La batterie de mon portable est à plat et j’ai désespérément besoin de passer un coup de fil...

— Rien de grave, j’espère ? demanda aussitôt Kat.

Mathilde soupira tout en accrochant sa veste au porte manteau.

— Non, juste un crétin au boulot qui a oublié que j’étais en vacances.

— Va dans mon bureau, tu seras plus tranquille, proposa Elysia en désignant la petite pièce située à droite de l’entrée.  

— Merci ! s’exclama Mathile avant de plisser les yeux.

Elle les observa tour à tour avant d’afficher un grand sourire.

— Eh bien, y en a qui ne s’embêtent pas... elle était bonne, la douche ?

Elysia se sentit aussitôt rougir furieusement et remercia intérieurement Kat lorsqu’elle jeta un coussin du canapé à sa sœur.

— File !

— D’accord, d’accord ! s’exclama Mathilde en s’éloignant. Quelles rabat-joie...

Kat rit avant de grimacer quand la sonnette de la maison retentit et Elysia vint aussitôt glisser une main dans la sienne.

— Viens, murmura-t-elle en tirant légèrement afin que Kat la suive.

Arrivée à hauteur de la porte, Elysia lui adressa un dernier sourire rassurant avant d’ouvrir, et une petite tête blonde leur apparut aussitôt.

— Hé Sexy, sourit Chloé tout en venant enlacer Kat, l’embrassant sur la joue.

Elle salua ensuite Elysia et quand une deuxième personne entra à son tour, cette dernière découvrit avec surprise que Chloé n’était pas venue seule, et le fut encore plus quand elle remarqua que la jeune femme qui l’accompagnait ne lui était pas inconnue.

— Kim ? s’étonna-t-elle avant d’abaisser son regard vers son jean, un sourire apparaissant aussitôt sur ses lèvres. Wow, c’est... bleu ça.

— Bien vu Sherlock, sourit Kim en la prenant dans ses bras. Mais ne t’y habitue pas trop vite.

Elysia feignit un air outré, une main sur la poitrine.

— J’oserai pas ! s’exclama-t-elle, recevant pour la peine une petite tape sur le bras.

Elle remarqua du coin de l’œil que Chloé et Kat étaient déjà lancées dans une discussion animée et en profita aussitôt pour entraîner Kim légèrement à l’écart avant de murmurer d’un air conspirateur :

— Je ne m’attendais pas à te voir ici, alors j’imagine que Chloé et toi..., commença-t-elle avant de s’interrompre. Attends, ce jour-là, quand Chloé et toi faisiez des heures sup’, avec vos cheveux tout en bataille...

Elle écarquilla les yeux.

— Oh mon Dieu ! Vous vous êtes envoyées en l’air au bureau !

— Shhh ! s’exclama aussitôt Kim en posant une main sur les lèvres d’Elysia.

 Cette dernière se dégagea aussitôt.

— Ose me dire que c’est pas vrai, vous étiez toutes les deux complètement dépareillées !

Elle fut surprise de voir Kim rougir.

— C’est arrivé sans qu’on ne le prévoie, hein, marmonna cette dernière, embarrassée.

— Et encore heureux ! s’exclama aussitôt Elysia avant de secouer la tête. Lors de la première semaine de Chloé en plus, vous n’avez vraiment pas perdu de temps.

Elle reçut aussitôt une autre tape sur le bras.

— Ouch ! Hé, c’est pas parce que Chloé aime ça que je vais aimer aussi, hein ! taquina-t-elle.

Le visage de Kim passa de rouge à cramoisie et Elysia ne put s’empêcher de rire de plus belle tandis que Kim posait une main sur ses lèvres dans l’espoir de la faire taire.

— Que j’aime quoi ? interrogea Chloé tandis qu’elle et Kat se rapprochaient.

— Rien, coupa aussitôt Kim, son regard intimant à Elysia de rester silencieuse. Mon jean, elle parlait de mon jean. Tu sais, comme je ne porte que du noir...

Chloé afficha un air dubitatif avant de hausser les épaules, mais ce qui inquiéta Elysia, ce fut le petit sourire qui vint prendre place sur ses lèvres à la place. Il n’avait pas fallu bien longtemps à Elysia pour découvrir que Chloé n’avait pas sa langue dans sa poche et quelque chose lui disait qu’au moins une d’entre elles n’allait pas apprécier ce qu’elle allait laisser échapper...

Chloé se pencha légèrement vers l’oreille de Kim.

— Oui enfin, à choisir, je te préfère sans rien du tout...

Kim piqua de nouveau un fart avant de tout simplement baisser la tête de dépit, et Elysia ne put retenir le rire qui montait de nouveau en elle.

Elle tapota amicalement l’épaule de Kim.

— En plus, avec la chérie que tu viens de te trouver, t’as pas fini d’en voir de toutes les couleurs si tu veux mon avis !

Kim la fusilla aussitôt du regard mais n’eut pas le temps de répondre que la sonnerie retentit à nouveau.

— Sauvée par le gong, sourit Kat avant d’aller ouvrir, laissant apparaître la dernière invitée attendue.

 Chloé promena son regard sur la tunique de la jeune femme, son pantalon blanc, puis sur ses sandales avant de tourner la tête vers Elysia.

— Lyna ?

Elysia acquiesça et Chloé reporta aussitôt son attention sur Kat.

— Hé Sexy, tu ne m’avais pas dit que ta meilleure amie était aussi séduisante, taquina-t-elle, les yeux brillants.

Lyna, qui s’apprêtait à enlacer Kat, se figea un instant avant de lever la main droite.

— Elle est surtout très mariée, répondit-elle en désignant son alliance.

— Oh... très mariée, hein ? répondit Chloé, un sourcil haussé. C’est marrant, en général, elles ont plutôt tendance à défendre leur hétérosexualité... Intéressant.

Lyna lui jeta un regard incrédule, une légère rougeur recouvrant progressivement ses traits et Elysia décida qu’il était grand temps de dévier la conversation sur un autre sujet avant que les choses ne dégénèrent.

Des bruits de pas résonnèrent derrière elle et elle tourna la tête pour voir Mathilde qui entrait tout juste dans la pièce, ses cheveux lisses se balançant légèrement sur les épaules.

— Ça va ? chuchota-t-elle.

Mathilde roula des yeux.

— Maintenant que cet imbécile a été remis à sa place, oui, soupira-t-elle avant de sourire. Hé Lyn’, salua-t-elle avant de tourner la tête vers Kim et Chloé. Tu dois être Kim... et je suppose qu’il s’agit de la fameuse escorte, poursuivit-elle fièrement tout en détaillant Chloé de la tête aux pieds. Mathilde, se présenta-t-elle en tendant une main. J’ai longuement entendu parler de toi, et si j’en crois ce qui se dit, je te dois un infini remerciement.

Un silence choqué s’ensuivit et Mathilde les observa tour à tour avant de s’arrêter sur Elysia et grimacer :

— Laisse-moi deviner... tout le monde n’était pas au courant, c’est ça ?

Elysia hocha faiblement la tête, un air désolé sur le visage.

— Escorte ? s’étonna finalement Lyna, son regard passant alternativement entre Chloé et Kat. Comment... que...

— Qu’est-ce que ça veut dire ? enchaîna aussitôt Kim en dévisageant Chloé.

Cette dernière fusilla Kat du regard.

— Je croyais que tu ne l’avais dit à personne ? lâcha-t-elle avant de tourner la tête vers Elysia, accusatrice.

Cette dernière leva aussitôt les mains en signe d’apaisement.

— Woah, woah, woah. Je n’ai rien dit du tout moi, et puis Mathilde est sa sœur alors...

— Ouais, la coupa Chloé en lui passant devant le nez afin de prendre place sur le canapé. À croire que pour certaines personnes, la notion de « vie privée » leur est totalement étrangère.

— Chloé..., commença aussitôt Kat avant d’être coupée par Lyna.

— Et la notion de « meilleure amie » doit leur être tout aussi inconnue, lâcha-t-elle en venant prendre place sur le fauteuil à son tour.

Kat baissa aussitôt la tête et Elysia se mordit l’intérieur de la joue tandis qu’un silence pesant s’installait. Elle qui avait eu pour but de rapprocher tout le monde, elle se dit que ça allait prendre un travail monstre.

Mathilde avait donné le ton, le reste de la soirée promettait.

12 août 2015

Chapitre 16 :

— Allez juste un !

Elysia secoua négativement la tête.

— Non.

— Mais s’il te plaît...

Elysia posa les mains sur ses hanches, un sourcil haussé.

— « S’il te plaît » ? Vraiment ?

Mathilde lui offrit un air de chien de battu et elle leva les yeux au ciel.

— T’es pas possible, soupira-t-elle avant de tendre une main. Bon, un seul.

Mathilde se mordit la lèvre inférieure.

— Ben, après réflexion, si tu pouvais en prendre deux...

Elysia lui offrit un regard appuyé avant de s’emparer de tous les sacs que Mathilde tenait dans sa main droite.

— C’est la dernière fois que je fais du shopping avec toi, lâcha-t-elle en pénétrant dans l’immeuble.

— Rho tout de suite les grands mots ! répondit Mathilde en accélérant le pas pour arriver à sa hauteur. J’ai juste acheté deux trois ou bricoles.

Elysia haussa les sourcils.

— Tu plaisantes ? Je porte une dizaine de sacs à moi toute seule là !

— Oui bon d’accord, mais au final, j’ai à peine trois tenues là.

Elysia secoua la tête tout en appelant l’ascenseur.

— T’es folle.

— Peut-être, admit Mathilde avant de la détailler de la tête aux pieds. Mais on sait toutes les deux que la seule raison pour laquelle tu ne m’as pas suivi, c’est parce que tu étais trop préoccupée par ma sœur. Sinon, on est pareille.

La sonnette de l’ascenseur retentit et Elysia rentra dans la cabine avant d’afficher un petit sourire.

— Possible.

— Ah ! Tu vois, s’exclama Mathilde en appuyant sur le numéro 12. Je savais que ma sœur avait choisi la femme parfaite.

Elysia lâcha un rire.

— Arrête de me complimenter juste parce que je porte tes sacs, dit-elle en la frappant gentiment avec ces derniers.

— J’oserais jamais ! s’exclama aussitôt Mathilde en battant innocemment des paupières.

Elysia roula des yeux puis sortit de la cabine quand la sonnette de l’ascenseur retentit à nouveau. Elle frissonna légèrement quand Mathilde lui murmura à l’oreille.

— Prête à affronter la musique ?

— Quoi ? s’exclama aussitôt Elysia en lui faisant face.

Le visage de Mathilde s’adoucit.

— Sa voiture est garée en bas, je pensais que tu l’avais vue.

Elysia grimaça.

— Non, je n’ai pas fait attention.

— Ça va aller, t’en fais pas, la rassura Mathilde dans un clin d’œil avant de tourner la tête lorsque Kat ouvrit justement la porte de l’appartement et apparut dans le couloir.

Mathilde s’approcha de sa sœur avant de s’emparer de l’une de ses mains et l’examiner sous toutes les coutures.

— Quoi ? Pas de cambouis ?! s’exclama-t-elle avant de feindre un air contrarié. Je ne suis pas prête de l’avoir ma Pontiac à ce rythme-là, hein !

Kat laissa apparaître un faible sourire et Elysia réalisa soudainement que Mathilde essayait de détendre l’atmosphère qui s’était légèrement alourdie depuis que Kat était apparue dans le couloir. Cette femme est vraiment géniale.

— Elle n’est pas pour toi, répondit Kat en récupérant sa main.

— Pour qui alors ? rétorqua Mathilde. Ta dulcinée ? ajouta-t-elle en portant une main à son cœur et en battant des sourcils.

Elle sentit sa mâchoire s’affaisser quand Kat se mit à rougir furieusement.

— Oh merde, souffla-t-elle en tournant la tête vers Elysia. T’as plutôt intérêt à lui pardonner, elle t’offre une caisse !

— Mathilde ! s’exclama Kat avant de la pousser à l’intérieur de l’appartement. T’es chiante !

— Oh ça va, c’est pas moi qui ne sait pas contrôler ma rougeur hein !

Kat lâcha un grognement puis Elysia entendit la porte de la chambre d’amis claquer, et quand Kat se tourna vers elle à nouveau, elle se précipita dans ses bras pour l’embrasser à pleine bouche. D'abord surprise, cette dernière mit du temps à réagir, et quand enfin elle répondit au baiser en même temps que ses bras entouraient Elysia, la jeune Daï-Natha fut soulagée, et les émotions qui l’avaient traversée jusqu’ici s’évaporèrent peu à peu. Elles n’avaient pas encore discuté, mais le simple fait que Kat soit revenue signifiait tout pour Elysia.

Essoufflées, leurs bouches se quittèrent finalement à regret et elle appuya son front contre celui de Kat avant d’ouvrir les yeux et de plonger dans son regard.

— Tu m’offres une voiture ?

Kat lui sourit timidement.

— Si tu veux toujours de moi... oui.

— Bien sûr que je veux toujours de toi, répondit aussitôt Elysia en lui volant un autre baiser. C’est plutôt moi qui devrais te demander ça. Je suis désolée Kat, c’était stupide de ma part de —

Elle fut interrompue par des lèvres sur les siennes.

— Ne crois pas que je n’aime pas lorsque tu m’embrasses, reprit Elysia une fois libérée, mais ça risque d’être un peu embêtant pour pouvoir discuter.

Kat lâcha un rire tout en l’entraînant à l’intérieur de l’appartement puis vers le canapé et Elysia déposa les sacs de Mathilde à même le sol avant de s’allonger contre elle.

— C’est moi qui suis désolée, répondit Kat. Je me suis emportée sans raison, et j’ai été incroyablement présomptueuse. Je n’aurais jamais dû réagir comme ça.

Elysia tripota un instant le col du t-shirt de Kat avant de relever la tête.

— Je sais que c’est probablement un sujet difficile à aborder pour toi, mais ce matin... je suis quasiment sûre que l’immeuble tout entier nous a entendues, et même si un couple finit toujours par se disputer un jour ou l’autre... Je n’ai pas envie d’avoir l’impression de marcher sur des œufs quand je suis avec toi, Kat. Je t’aime, j’aime ce qu’on a, ce qu’on partage. Je ne veux pas changer ça. Alors... tu veux bien me dire ce que tu entends exactement par « je n’ai pas envie d’avoir un enfant » ?

Kat s’allongea sur le dos, le regard rivé vers le plafond. Plusieurs secondes s’écoulèrent avant qu’elle ne soupire.

— J’ai du mal à aborder le sujet du désir d'enfant, parce que ça me renvoie à trop de choses. Je ne peux pas laisser un homme m’approcher, et une insémination m’est tout autant inenvisageable. Outre le fait d'être touchée, vue, examinée... je ne supporterai pas d’être inséminé. Le simple fait d’y penser me donne la nausée.

Elysia ressentit aisément le frisson qui parcourut le corps de Kat et elle resserra ses bras autour d’elle, attendant patiemment qu’elle continue.

— Alors tu vois, ça réduit pas mal les possibilités. Je ne sais pas, Elysia... Tout ce que je sais, c’est qu’avoir un enfant moi-même m’est inenvisageable.

La gorge d’Elysia se serra et elle vint doucement caresser l’un des sourcils de Kat avant de descendre le long de sa joue.

— Et si c’était quelqu’un d’autre qui le portait, cet enfant ?

Le regard de Kat descendit vers le visage d’Elysia et elle l’observa un instant avant de répondre.

— C’est ce que tu voudrais ?

— Si tu le veux aussi, murmura aussitôt Elysia. Il ne t’a pas tout pris Kat, tu peux toujours avoir une famille si tu le désires.

La gorge de Kat remua et Elysia devina que le sujet de conversation devenait vraiment difficile pour elle.

— Je ne sais pas, lui répondit-elle honnêtement. Je... je crois qu’une part de moi aurait trop peur qu'ils souffrent, et... que je sois une mauvaise mère. Je veux dire, comment pourraient-ils être heureux avec une mère extérieurement intacte mais intérieurement brisée ?

— Oh Kat, souffla Elysia en encadrant son visage de ses mains. N’importe quelle femme envisageant d’avoir un enfant passe par là. Et puis, si tu veux mon avis, je vois plutôt tes inquiétudes comme quelque chose positif, c’est ton côté protecteur qui ressort. Et ça, ce serait loin de faire de toi une mauvaise mère. Au contraire.

Kat cligna des yeux avant de se mordre la lèvre.

— Tu crois ?

— J’en suis sûre, sourit doucement Elysia. Crois-le ou non, devenir maman ne se fait pas en un claquement de doigt. C’est un apprentissage continuel. Je serais même rassurée que tu sois complètement paniquée, taquina-t-elle.

Cette fois-ci, un véritable sourire étira les lèvres de Kat et elle serra encore plus Elysia contre elle.

— J’en conclus que toi et Mathilde avez pas mal discuté alors ?

— Hmm, disons que j’étais une vraie boule de nerf lorsque tu es partie et qu’elle essayait de me rassurer.

— Je suis désolée, lui répondit aussitôt Kat en affichant un air coupable. Je n’aurais pas dû prendre la poudre d’escampette comme ça.

Elysia baissa les yeux vers sa main qui tripotait le t-shirt de Kat.

— C’est vrai que j’aurais préféré que tu restes, commença-t-elle calmement. Mais je comprends pourquoi tu as eu besoin de partir. C’était juste un peu frustrant et inquiétant.

Elle sentit Kat sourire contre le sommet de son crâne.

— Un peu ?

— Bon d’accord, énormément, admit Elysia en levant les yeux au ciel. Il ne me reste plus qu’à trouver un moyen pour caser ton garage dans la chambre d’amis.

Kat éclata aussitôt de rire et Elysia sentit un sourire prendre place sur ses lèvres. La tempête était passée, elle n’avait plus envie qu’aucune d’elles deux ne se torture encore avec cette histoire.

— Je ferais en sorte de rester dans les parages la prochaine fois, répondit Kat une fois calmée.

Elysia secoua la tête.

— Non. Même si j’aimerais vraiment que tu optes pour la chambre d’amis, je comprends pourquoi tu préfères le garage. Je survivrai.

Kat l’embrassa furtivement.

— Merci. Je ferais au moins en sorte de garder mes réactions sous contrôle en tout cas. Je ne suis pas du genre à m’emporter comme ça, d’habitude. Je suis vraiment désolée.

Elysia reprit une position assise tout en entraînant Kat avec elle.

— C’est oublié, lui rappela-t-elle. Ne t’en fais pas. Par contre, je ne sais pas toi, mais je meurs de faim moi maintenant. Chinois, ça te dit ?

— Hmm, j’ai faim..., commença Kat en frottant son nez contre le cou d’Elysia,... mais d’autre chose.

Elysia sourit, sa respiration s’accélérant légèrement et ses yeux se fermant d’eux-mêmes. La main de Kat glissa sous son débardeur et elle sursauta lorsqu’une voix leur parvint aussitôt.

— Il m’avait semblé te dire d’attendre que je sois partie de l’appartement avant d’entamer l’étape réconciliation !

Elysia sentit Kat soupirer dans son cou tandis que son visage virait au cramoisi.

— Arg Mathilde ! s’exclama-t-elle en laissant retomber sa tête dans ses mains.

— Oh ça va, je file..., rit la concernée tout en sortant ses clés de voiture de son sac à main. Et n’oubliez pas, sortez couverte !

La porte claqua derrière elle et Elysia se laissa retomber contre le dossier, un grognement s’échappant de ses lèvres. Kat rit tout en venant l’embrasser dans le cou.

— Elle compte rester combien de temps, déjà ? gémit Elysia.

Sa remarque fit rire Kat encore plus et elle se redressa tout en entraînant Elysia avec elle, l’attirant contre son corps alors que ses bras trouvaient naturellement place autour de son cou.

— Le temps qu’elle aille mieux, lui répondit simplement Kat en venant embrasser le bout de son nez.

— Tu crois que ça prendra longtemps ? demanda Elysia en feignant un air plein d’espoir.

— Arrête de faire la vilaine, la chatouilla Kat en riant à nouveau. Peu importe le temps que ça prendra, elle sera toujours la bienvenue ici. Et puis, je ne me fais pas de soucis pour elle, elle est forte.

— Comme toi, répondit aussitôt Elysia en lui volant un baiser.

Kat secoua la tête.

— J’ai parfois l’impression que tu me vois bien meilleure que je ne le suis, lui répondit-elle avant de glisser sa main dans celle d’Elysia.

Elle commença à les diriger vers la chambre mais Elysia l’arrêta une fois arrivée à hauteur de la porte.

— Je te vois telle que tu es, Kat, dit Elysia en caressant le revers de sa main de son pouce. J’espère juste qu’un jour, tu te verras telle que tu es toi aussi.

Les yeux de Kat plongèrent dans les siens et Elysia devina aisément que son silence n’était rien d’autre que le fruit de l’émotion provoqué par ses paroles. Ce n’était pas grave, elle n’avait pas besoin de réponse, son regard parlait pour elle.

— Allez viens, sourit doucement Elysia, je suis morte de faim.

Kat vint l’encercler de ses bras, puis lui souffla un « je t’aime » au creux de son oreille avant d’embrasser sa tempe. Son visage se recula légèrement afin qu’elle puisse regarder Elysia et elle lui offrit un petit sourire tout en dégageant une mèche rebelle de son visage.

— Ça tombe bien, moi aussi.

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10 août 2015

Qui suis-je ?

Qui suis-je


Une petite demoiselle née à la fin des années 1980, perdue quelque part en région Centre de ce cher pays qu'est la France. En plus de ça, que puis-je vous dire...

Kelsey_Jae n'est bien évidemment pas mon vrai nom, mais un pseudonyme créé à partir de deux personnages fictifs issus de romans lesbiens que j'ai littéralement dévorés (Exposure de Fanatic et T. Novan et Silent Legacy de Ciaran Llachlan Leavitt). Une bonne façon d'écrire en toute liberté sans que cela n'interfère avec ma vie professionnelle ou personnelle.

Avant d'écrire, j'ai appris à aimer à lire en découvrant des auteurs comme Raymond Radiguet, Boris Vian ou encore Vladimir Nabokov (assez tardivement, je dois l'admettre... merci les études lettres et langues !). Puis, après une active participation à un forum communautaire, j'ai décidé de créer ce blog afin de partager mes écrits. 

Chose surprenante, ça ne fait que sept ans que je me suis lancée dans l'écriture (complètement par hasard, je dois l'admettre, puisqu'on m'a tout simplement lancé un défit x)), et ne me suis jamais arrêté depuis. Je n'en reste pas moins une amatrice, comme vous pourrez le découvrir sur ses pages.

Côté passions, je pratique la haute voltige qu’on nomme traduction et je m’attache en particulier à restituer avec un immense plaisir les oeuvres saphiques de grandes auteures Américaines et Britanniques.

Enfin, je passe le plus clair de mon temps devant un écran, un clavier, une tablette ou le nez sur du papier, entourée de crayons, à lire, écrire, et imaginer. Bref, rêver… =)

 

Si jamais vous cherchez à me contacer, c'est par ici :

📧 kelsey_jae@outlook.fr

10 août 2015

Chapitre 15

Ses larmes enfin taries, Elysia releva la tête et croisa aussitôt un regard noisette soucieux.

Elle soupira.

— Votre ressemblance est vraiment déstabilisante, tu sais.

— Désolée, sourit maladroitement Mathilde. Le déjeuner nous attend, tu viens ?

Elysia baissa les yeux vers la porte par laquelle Kat était sortie et sa gorge se serra à nouveau.

— Je ne suis pas sûre de pouvoir avaler quoi que ce soit, admit-elle. Je ferais peut-être mieux de partir à sa recherche...

Mathilde secoua négativement la tête.

— Crois-moi, elle préfèrera être seule pour l’instant.

Elle poursuivit quand un air blessé élu domicile sur le visage d’Elysia.

— Ce n’est pas contre toi, Elysia. Elle a juste besoin de se retrouver seule afin de se calmer et réfléchir. Elle reviendra dès que ce sera fait.

— Tu es sûre ? ne put s’empêcher de demander Elysia. S’il lui arrivait quelque chose...

— Elle va bien, la coupa Mathilde en se redressant. Je te le promets. Tu viens ? ajouta-t-elle en lui tendant une main.

Après une dernière hésitation, Elysia se leva et la suivit jusqu’au salon où Kat et Mathilde avaient tout préparé. Café, chocolat chaud, jus de fruit, tout y était. Avec en prime, des tartines couvertes de confiture, des croissants chauds, du lait et diverses boîtes de céréales.

— Le petit déjeuner des champions, sourit Mathilde en prenant place sur le canapé, tapotant la place à côté d’elle.

Elysia s’installa à son tour et l’observa se préparer un chocolat chaud. Elle avait beau essayer, mais rien n’y faisait, son estomac était tellement noué qu’il lui était inenvisageable d’avaler quoi que ce soit.

— Ely..., la prévint Mathilde tandis qu’elle s’emparait d’une tartine.

— Je suis désolée, c’est juste que... je ne sais pas, j’aurais préféré qu’elle ne fuit pas. Parce que maintenant, je suis une vraie boule de nerf, je regrette, je me sens coupable, et peu importe ce que tu dis, il lui est peut-être arrivé quelque chose.

Mathilde soupira tout en se tournant vers elle.

— C’est une dispute, ça arrive à tout le monde. On s’énerve, le ton monte, on dit des choses que l’on ne pense pas toujours, puis on en discute et on se réconcilie, énuméra-t-elle avant de la pointer du doigt. Et je ne veux certainement pas être dans les parages quand vous en serez à cette partie-là.

— Mathilde...

Elysia n’avait aucune envie de rire pour l’instant.

— Bon, d’accord, reprit Mathilde en s’essuyant les mains après avoir terminé son dernier morceau de tartine. Elle va bien, elle est au garage.

— Elle te l’a dit ? s’exclama aussitôt Elysia.

Mathilde secoua la tête.

— Non, mais c’est toujours là qu’elle va quand elle a besoin de se retrouver seule et de réfléchir. Parce qu’elle sait que s’il arrive quelque chose, et qu’on a vraiment besoin de la trouver, on y parviendra sans mal. Et puis, c’est son refuge.

Elysia hocha la tête, un peu honteuse de ne pas y avoir pensé plus tôt.

— Ne lui en veux pas, continua Mathilde en prenant la main d’Elysia dans la sienne. Vous avez chacune besoin de laisser la tension retomber un peu avant d’en discuter calmement.

Elysia se passa une main sur le visage, un soupir s’échappant de ses lèvres.

— Je me sens stupide tu sais, la conversation est tombée sur l’envie d’avoir des enfants et... je sais ce qui lui est arrivé, j’aurais dû me douter qu’après ça, il était possible qu’elle n’ait pas envie d’en avoir mais... je sais pas. J’ai pas réfléchis. Je lui ai ri au nez et... bref. Stupide, stupide, stupide.

Mathilde lui servit un verre de jus d’orange puis le lui tendit, plissant des yeux quand Elysia voulut refuser.

— Je pense surtout que tu es trop dure avec toi-même. Tu n’as pas la science infuse, deviner ce genre de chose, c’est pas simple. Il y a d’ailleurs beaucoup de femmes qui ont justement voulu avoir des enfants pour se reconstruire. Et puis, je ne pense pas qu’elle ne veuille pas d’enfants, à mon avis, elle ne se sent simplement pas capable d’en avoir elle-même.

— Et toi ?

Les mots s’échappèrent de ses lèvres et Elysia rougit aussitôt d’embarras. Mathilde lui offrit un petit sourire.

— Je suppose que la conversation est tombée sur l’envie d’avoir des enfants parce que vous en êtes venues à parler de moi, non ?

— Gagné, marmonna Elysia, provoquant aussitôt un rire.

Mathilde rapprocha l’assiette de croissants et cette fois, Elysia ne se fit pas prier, son appétit se manifestant à nouveau à mesure que son estomac se détendait peu à peu.

— La réponse est non, lui dit-elle enfin. Ça surprend, hein ? J’ai l’impression d’être un monstre parfois, ou anormale vu la façon dont on me dévisage quand je le dis. Ça dérange, ça interroge. Car après tout, le désir d’enfanter n’est-il pas sacré, incontestable ? Personnellement, je perçois ça comme un degré de soumission aux déterminismes. Aujourd’hui, il ne va plus de soi qu’une femme fasse des enfants. On peut très bien réaliser pleinement sa féminité sans ça, ce n’est pas un passage obligatoire pour moi.

Elysia lui offrit un sourire amusé.

— Mais concrètement, qu’est-ce qui fait que tu n’en ressens pas l’envie ?

Mathilde rit doucement.

- D’accord, d’accord, dit-elle avant de prendre un air concentré. Mon poste de direction export dans les cosmétiques me pousse à devoir être mobile : je passe environ six mois par an à l’étranger, le plus souvent dans trois pays différents. Je ne pourrais pas trimballer un enfant avec moi. Poser mes valises ? Je ne suis pas sûre d’en avoir envie. Pourtant, j’aime les enfants, mais… je ne sais pas, je ne connais pas ce désir physique d’enfanter, et ne nourris pas le projet d’être mère. J’ai toujours eu pour projet de rendre un homme heureux et de réussir ma vie professionnelle. M’épanouir dans l’un comme dans l’autre. C’est tout.

— Hmm..., et s’ancrer dans une famille et la perpétuer ? demanda Elysia. Je pense que c’est ce que beaucoup recherchent, un hommage au passé et une promesse d’avenir, un regard tourné vers le futur et l’opportunité de construire, de se construire mutuellement et ensemble.

Mathilde se mordit la lèvre inférieure.

- Surement, admit-elle. Ce n’est peut-être pas le bon timing, ça viendra peut-être plus tard, qui sait ? Mais je pense surtout que je trouve simplement mon épanouissement ailleurs.

Elysia fronça les sourcils, pensive.

- Kat m’a dit pour toi et ton compagnon... c’est pour ça que vous avez fini par rompre ? Ton refus d’avoir des enfants ?

— Non, lui répondit Mathilde en prenant une gorgée de jus d’orange. Enfin, ça y a surement joué, mais ce n’était pas l’élément principal. Aaron m’a fait part de son envie d’avoir un enfant peu de temps après notre quatrième anniversaire. Je lui ai fait part de mon ressenti et il n’a pas insisté. Je pense surtout qu’il pensait que j’allais finir par changer d’avis un jour ou l’autre... Les années ont passées, et il a fini par insister un peu plus, puis ses parents s’y sont mis eux aussi. Ils se montraient moins patients et insistaient à chaque visite, et je le supportais de moins en moins. Mais le vrai problème, c’était que j’ai simplement fini par m’ennuyer dans mon couple. La séparation qui, au début, était insupportable a fini par devenir un soulagement. Crois-moi, ça m’a vraiment fait réfléchir. Il ne me manquait plus, j’en étais même venue à attendre ces voyages d’affaires pour pouvoir me retrouver seule avec moi-même. Les disputes ont commencées à se faire de plus en plus présentes, jusqu’à ne plus nous quitter et, un beau jour, j’ai fini par dire stop avant que l’on finisse vraiment par sortir blessés de cette histoire.

Elysia tendit une main pour la poser sur celle de Mathilde.

— Je suis désolée.

— Moi aussi, sourit tristement Mathilde. Je pense que même si mes sentiments ne s’étaient pas dissipés, j’aurais mis fin à notre relation de toute façon. Je ne pense pas que faire un enfant pour faire plaisir aux autres soit la solution. Et le priver de ça n’aurait pas été juste non plus.

— Il t’aime toujours, lui ?

Mathilde baissa les yeux, son visage s’assombrissant ostensiblement.

— Il m’a dit qu’il renoncerait à l’envie d’avoir des enfants si cela pouvait me faire rester, dit-elle faiblement tout en ramassant des miettes de pain de son doigt.

Elle releva la tête, le regard embué.

— Je pense que cette phrase est assez parlante en elle-même, non ?

— Oh Mathilde, dit Elysia en la prenant dans ses bras. Je suis tellement désolée...

— Non, ne le soit pas, répondit Mathilde en s’essuyant les yeux. C’est la vie, comme on dit, pas vrai ?

— J’imagine, sourit tristement Elysia. Je suis contente de t’avoir parmi nous en tout cas. Je pense que ça va vous faire autant de bien à l’une qu’à l’autre de vous retrouver ta sœur et toi.

— Je pense aussi, répondit Mathilde, son sourire retrouvé. Bon, maintenant qu’on a terminé notre déballage émotionnel, mettons-nous en route. J’ai envie de faire du shopping !

— Euh, shopping ? répéta bêtement Elysia tandis que Mathilde commençait à débarrasser la table. Après ce qui vient de se passer avec ta sœur, tu crois que j’ai envie d’aller faire du lèche-vitrine ?

Mathilde haussa les épaules, les bras chargés de nourriture.

— Tu comptes faire quoi d’autre ? Des mots-croisés en attendant qu’elle revienne ? Je t’en prie Elysia, ça peut prendre des heures, autant tirer profit de son absence ! En plus, j’ai un argument infaillible qui te fera dire oui.

— Lequel ? demanda Elysia, sceptique.

Mathilde lui sourit tout en se dirigeant vers la cuisine.

— Devine devant quoi on passe pour aller en centre-ville...

Le garage de Kat.

— Tu es une vraie manipulatrice, tu sais ça ? sourit Elysia en se redressant à son tour.

Le rire de Mathilde lui parvint aussitôt.

— Et encore, tu n’as pas tout vu !

Elysia secoua la tête, amusée. Une chose était sûre, avec la présence de Mathilde à ses côtés, elle ne risquait pas de s’ennuyer.

💕

Mathilde eut à peine le temps de remonter en voiture qu’Elysia la harcela aussitôt :

— Alors ?

— Elle est à l’intérieur en train de déballer des pièces qu’elle vient apparemment de recevoir.

— Oh. Et ?

Mathilde lui adressa un regard confus.

— Et... quoi ? demanda-t-elle tout en attachant sa ceinture de sécurité.

— Ben, c’est tout ? Tu ne lui as pas parlé ?

Mathilde leva les yeux au ciel.

— Je suis partie deux minutes, bien sûr que non je ne lui ai pas parlé ! Je me suis juste — non, oublie ça, s’interrompit-elle en remuant une main. J’ai simplement vérifié ce que je soupçonnais déjà pour que madame soit rassurée, finit-elle en offrant un regard appuyé à Elysia.

— Oui ben on sait jamais hein, marmonna cette dernière en croisant les bras sur sa poitrine.

Une main se posa sur la sienne.

— Je sais bien, je te taquinais, la rassura Mathilde. Tu veux bien nous éloigner d’ici maintenant ? Je ne pense pas qu’elle apprécierait si elle nous surprenait en train de l’espionner.

— Justement... tu ne penses pas que je devrais aller la voir ?

— Démarre, l’intima aussitôt Mathilde, un léger sourire néanmoins présent sur les lèvres. Elle te fera savoir quand elle sera calmée. Et puis, tu lui as déjà envoyé un adoraaaable petit sms, la taquina-t-elle.

Elysia lui tira la langue avant de démarrer, priant à la rougeur qu’elle pouvait sentir lui monter au visage de bien vouloir disparaître. 

— Je déteste quand on se dispute.

— Ça vous arrive souvent ?

Elysia secoua la tête.

— Non, c’était la première fois, répondit-elle tout en s’engageant dans la petite rue.

Mathilde hocha doucement la tête, le regard rivé vers le paysage qui défilait à travers la vitre. Elle laissa passer un temps avant de demander.

— L’armée... ça fait longtemps qu’elle t’en a parlé ?

A son ton hésitant, Elysia comprit aussitôt ce qu’elle demandait réellement et elle baissa légèrement le son de l’autoradio avant de répondre.

— Non, il y a quelques jours seulement. Pourquoi ?

— Pour rien, c’est juste... Ce n’est pas un sujet qu’elle aborde très souvent, je suis juste surprise qu’elle l’ait fait aussi rapidement. Elle t’a parlé de Lucy aussi j’imagine ?

Sa question fut tellement inattendue qu’Elysia remarqua au dernier moment que le feu était rouge et ce fut seulement parce qu’elle freina brusquement qu’elle ne rentra pas dans la voiture de devant.

— Ça va ? lui demanda Mathilde une fois la voiture arrêtée.

Elysia dégagea la ceinture qui lui avait soudainement comprimée la poitrine avant de hocher la tête.

— Oui, désolée. Lucy ?

Mathilde l’observa avec confusion avant de porter une main à son visage. Elle jura entre ses dents.

— Laisse-moi deviner... Kat ne t’a rien dit ?

Non seulement Kat ne lui avait rien dit, mais Elysia pensa surtout à ses supérieurs qui avaient pris le soin de lui cacher ce petit détail pour une raison qu’elle ignorait.

Il fallait vraiment qu’elle en discute sérieusement avec Mysa le plus tôt possible.

— Non. Enfin, j’ai vu une photo dans sa chambre, elle m’a dit qu’elle avait disparue. Je sais juste que c’est une ex, à part ça...

— Oui, Lucy a été la première après ce que cette ordure lui a fait subir. Je ne pense pas que sans elle, Kat se serait remise aussi rapidement.

— Elle a l’air d’avoir été la petite amie parfaite alors, marmonna Elysia avant d’avoir pu s’en empêcher.

Mathilde haussa un sourcil.

— Tu n’es pas jalouse quand même, hein ?

— Non.

Elysia grimaça. Non mais qui est-ce que j’espère convaincre avec un mensonge aussi gros ?

Mathilde plissa des yeux avant de sourire.

— Oh si ! s’exclama-t-elle avant de reprendre plus sérieusement. Mais tu n’as pas à l’être Elysia, crois-moi.

- Pourquoi ? Parce que c’est une ex ?

Mathilde leva les yeux au ciel.

— Si tu veux, admit-elle. Mais surtout, cette histoire remonte à des années. Et puis...

— Et puis ?

Mathilde prit une profonde inspiration avant de lâcher :

— Lucy est morte.

💕

Le feu passa au vert et ce fut d’un air absent qu’Elysia redémarra.

— Morte ?

Mathilde hocha la tête.

— Elle était hôtesse sur des bateaux de croisière. Kat et moi l’avions accompagnée jusqu’à Miami le jour où elle devait partir pour une croisière Caraïbe-Mexique pendant de deux semaines. On avait décidé de rester sur place le temps qu’elle revienne histoire de profiter de la région. Seulement, quelques jours plus tard, on nous a appris qu’en raison de mauvaises conditions atmosphériques, le navire avait heurté un vraquier et avait coulé en quelques minutes seulement.

Mathilde s’interrompit et s’essuya les yeux d’une main légèrement tremblante avant d’ajouter :

— Lucy faisait partie des quatre cents et quelques disparus, son corps a été retrouvé au large de Cancún des semaines plus tard.

Le centre commercial apparut et Elysia enclencha aussitôt son clignotant afin de s’engager sur le parking, l’histoire de Mathilde ne l’avait pas laissée insensible et elle doutait être en capacité de conduire ne serait-ce qu’une minute de plus.

— Je suis désolée, prononça-t-elle enfin en jetant un rapide coup d’œil en direction de Mathilde. Je n’imagine même pas combien ça a dû être douloureux.

— Ça l’est toujours, quelque part, répondit Mathilde avant de hausser les épaules. Mais c’est le passé. Ce que je voulais dire, c’est que tu n’as aucune raison d’être jalouse. Lucy était tout pour ma sœur, et je pensais sincèrement qu’elles étaient faites l’une pour l’autre. Mais quand je la vois aujourd’hui...

Elle sourit doucement.

— Non, vraiment. Tu n’as pas à être jalouse. 

Elysia enclencha le frein à main puis coupa le contact avant de venir prendre Mathilde dans ses bras.

— Merci, souffla-t-elle à son oreille. Merci de me dire tout ça.

— C’est rien, lui murmura Mathilde avant de se reculer. Entre belles-sœurs, c’est normal, non ?

Elysia hocha la tête, un sourire sur les lèvres avant d’hésiter :

— Le fait que Kat ne m’ait rien dit à propos de Lucy... c’est parce que c’est encore trop douloureux pour elle, pas vrai ?

— Surement, admit Mathilde. Mais à mon avis, il est aussi possible qu’elle veuille simplement laisser tout ça derrière elle. La vie ne lui a pas fait de cadeaux, tu lui offres ce qu’elle attendait depuis si longtemps, la promesse d’un avenir enfin heureux.

Elle haussa les épaules.

- Je serais elle, je laisserais le passé où il est, et me concentrerais sur le présent.

Le cœur d’Elysia se serra légèrement face à ses paroles. Même si son temps sur Terre était limité, Mathilde avait mis pile le doigt sur ce qu’elle comptait offrir à Kat, et qui lui avait fait défaut durant toutes ces années.

La promesse d’un avenir enfin heureux.

7 août 2015

Chapitre 14

Le regard d’Elysia ne cessait de passer de l’une à l’autre tandis qu’elle se mordillait l’ongle du pouce. Ce n’était pas possible, il devait bien y avoir un moyen de les différencier, non ? Pourtant, elle avait beau chercher... elle ne voyait que la même fraîcheur de leurs visages fins, la profondeur de leurs yeux noisette qui venait renforcer la beauté de leurs sourires, laissant entrevoir un charisme naturel. Et c’était exactement ceux-là qui faisaient la rareté de leur beauté, douce et ténébreuse à la fois.

— Elle a les cheveux lisses, déclara soudainement Kat en défaisant l’élastique de sa sœur, assise à côté d’elle sur le canapé.

Elysia haussa un sourcil.

— Tu devrais peut-être te lisser les cheveux, tu es magnifique comme ça, sourit-elle avant de se mordre la lèvre tout en fronçant les sourcils. Enfin, elle est... et tu serais... bref, tu as compris.

— Je comprends surtout que tu as embrassé ma sœur pour ensuite me dire qu’elle est magnifique, marmonna Kat tout en croisant les bras sur sa poitrine.

Le sourire d’Elysia disparut et elle roula des yeux, ignorant le rire que la sœur de Kat essayait de retenir.

— Je croyais que c’était toi ! s’exclama-t-elle, exaspérée. Et j’ai dit que tu serais magnifique comme ça ! Et puis, de toute façon, tu ferais mieux de me la présenter au lieu de jouer la petite amie jalouse.

Kat haussa les sourcils, jetant un regard noir à sa sœur lorsque celle-ci laissa échapper un rire avant de soupirer, résignée.

— Ely, je te présente ma sœur, Mathilde. Mathilde, voici Elysia, ma petite amie.

Sa façon d’accentuer le « ma » fit sourire Elysia et elle vint s’emparer de la main que Mathilde lui tendait.

— Ravie de faire votre connaissance, dit-elle. Et, hum, désolée pour... enfin...

— Le baiser ? proposa Mathilde, une lueur malicieuse dans le regard. Ce n’est pas grave, j’ai connu bien pire comme accueil.

Kat se racla la gorge et Mathilde leva les yeux au ciel tout en s’emparant d’un coussin du canapé.

— Kat sait qu’elle n’a pas à s’inquiéter, dit-elle en remuant une main dans les airs. Nous sommes peut-être indissociables, mais nos caractères sont bien différents. Tout comme nos préférences sexuelles ; le touche minou n’a jamais été mon truc.

Elysia, qui venait de prendre une gorgée d’eau, avala aussitôt de travers. Kat vint lui frotter le dos tandis qu’elle toussait.

— C’est vraiment ta sœur ? lui demanda-t-elle enfin, incrédule.

— Malheureusement..., répondit Kat, l’air faussement désolé avant de rire quand elle reçut un coussin en plein visage. Comme elle te l’a dit, nous sommes assez différentes en ce qui concerne les goûts et les couleurs.

Elysia acquiesça tout en reportant son attention sur Mathilde. Même si elle venait tout juste de la rencontrer, elle devait bien admettre qu’elle possédait quelque chose de différent, de plus ouvert, de plus accessible, là où Kat avait tendance à se tenir en retrait et être plutôt renfermée. Elle dégageait aussi quelque chose de pétillant, de frais, d’espiègle, que Kat ne dévoilait généralement qu’une fois en confiance et à l’aise avec la personne.

La différence semblait aussi se porter sur le choix de leurs tenues vestimentaires, Mathilde paraissait très féminine, si Elysia pouvait en juger par le faible maquillage qui recouvrait son visage, ses bijoux, ses vêtements cintrés et ses talons. Kat était bien plus simple et naturelle, mais elle n’en était pas moins féminine pour autant, surtout quand elles sortaient en soirée... Elysia sourit, elle la trouverait de toute façon magnifique dans n’importe quoi.

— Ce n’est peut-être pas plus mal, non ? remarqua-t-elle enfin. C’est assez difficile de s’affirmer comme ça, je pense qu’entre jumelles, ça doit être encore plus dur...

— Avoir des traits identiques n’aide pas, en effet, acquiesça Mathilde. Mais papa a toujours fait en sorte qu’on puisse nous distinguer. Puis, arrivées à un âge où on était assez grandes pour nous occuper de nous-même, on a poursuivi dans la même lignée.

Elle échangea un regard plein de malice avec Kat avant d’ajouter :

— Mais ça a aussi ses avantages.

Elysia fronça légèrement les sourcils, intriguée, mais aussi appréhensive.

— Du genre... ?

— On adorait échanger nos places. Kat a même passé un oral d’espagnol à ma place lors de nos examens terminaux au lycée, sourit fièrement Mathilde. Et moi ses épreuves d’histoire-géo.

Elle se pencha légèrement afin de murmurer de manière conspiratrice :

— Quand on sait qu’elle plaçait Denver dans le Kentucky...

— Et que tu ne savais même pas quel chiffre venait après dix en espagnol ! s’exclama aussitôt Kat en lui envoyant à son tour un coussin en plein visage.

Mathilde rit de plus belle et Elysia ne put s’empêcher de sourire face à leurs pitreries.

— Vous n’avez pas intérêt à jouer à ce petit jeu pendant ton séjour ici, les prévint-elle néanmoins, les yeux plissés.

Mathilde éclata aussitôt de rire.

— Avec la crise de jalousie qu’un simple petit bisou a provoquée, crois-moi, Kat n’accepterait jamais de toute façon.

L’air grognon de Kat confirma ses propos, mais l’étincelle qui brillait dans le regard de Mathilde ne la rassura guère.

Oh bon sang, dans quoi est-ce que je me suis fourrée, moi, encore ?

💕

Le doux touché d’une main contre sa joue, son prénom doucement murmuré tandis qu’un corps doux et chaud enjambait sa taille poussa Elysia à quitter le pays des rêves le lendemain matin. Souriant, elle ouvrit les yeux et croisa aussitôt un regard noisette brillant de malice encadré par de longs cheveux bruns... bien trop lisses pour être ceux de Kat.

— Han, Mathilde ! s’exclama-t-elle en tirant la couette par-dessus sa tête. T’avais dit que tu ne t’amuserais pas à ça !

Mathilde la lui enleva aussitôt des mains.

Arg !

— Oh ça va, Ely, je t’ai déjà dit que je n’étais pas intéressée par le touche minou.

— Va dire ça à Shelley alors, marmonna Elysia tout en regonflant son oreiller et en se repositionnant plus confortablement.

Mathilde haussa les sourcils.

— Kat t’a parlé de ça ? s’étonna-t-elle. Merde, je ne savais même pas qu’elle était au courant.

Elysia écarquilla les yeux. Oh, la boulette. Mathilde et Shelley étaient meilleures amies depuis l’enfance, et, arrivée l’adolescence, elles avaient voulu savoir ce que ça faisait d’embrasser un garçon. Alors, comme beaucoup, elles avaient fini par décider d’essayer toutes les deux. Ce qui était amusant dans l’histoire selon Elysia, c’était qu’elles n’avaient pas pu aller plus loin qu’un simple petit bisou, puisque Kat était entrée dans la chambre juste à ce moment-là. La seule chose qui les avait sauvées de l’embarras était que Kat était tellement concentrée sur le livre qu’elle tenait entre les mains qu’elle n’avait rien remarqué du tout, et le temps qu’elle relève enfin la tête, Mathilde et Shelley s’étaient déjà éloignées l’une de l’autre depuis un moment. La seule chose qui aurait pu les trahir était la rougeur qui recouvrait leurs traits, mais Kat ne s’était pas attardée.

En général, elle et Mathilde se disaient tout. C’était, au jour d’aujourd’hui, la seule chose que Mathilde lui avait caché, d’abord par embarras, puis parce qu’elle avait simplement oublié avec le temps.

— Euh, non, balbutia Elysia.

— Non ? demanda Mathilde, confuse. Comment peux-tu être au courant si...

— Hé toi, s’exclama Kat en entrant dans la pièce et coupant par la même occasion la parole à sa sœur. Si tu passes de l’autre côté de la barrière, ais au moins la décence de te trouver ta propre copine. 

Mathilde ricana aussitôt et elle s’écarta d’Elysia afin de s’assoir à côté d’elle, en tailleur.

— Non, répondit-elle en secouant la tête. Elle est certes très jolie, il lui manque cependant une chose qui m’est indispensable, poursuivit-elle en posant son regard sur ce qu’Elysia devina être son entre-jambe.

Cette dernière haussa les sourcils d’incrédulité.

— Ils ont inventé les vibromasseurs, tu sais, sourit Kat par-dessus son épaule tandis qu’elle farfouillait dans l’armoire.

Mathilde leva aussitôt les mains au ciel.

— Bah voilà, où est l’intérêt d’être lesbienne si c’est pour utiliser un vibro, hein ?

— Parce que c’est plus simple que de demander à un homme de porter des faux seins ? ricana aussitôt Kat.

Elysia grogna tout en se couvrant le visage de ses mains. Je vois, l’une sort une bêtise, et l’autre répond aussitôt avec une de son propre cru. J’ai à faire à de vraies adolescentes, c’est pas possible.

— Oooh tu ne m’avais pas dit qu’elle était timide, la taquina Mathilde auprès de Kat.

— Je ne suis pas timide, gronda Elysia tout en repoussant la couette et s’asseyant sur le rebord du lit. Je n’ai simplement pas eu mon baiser du matin, poursuivit-elle en lançant un regard appuyé en direction de Kat suivit d’un sourcil haussé.

Des bras vinrent aussitôt encercler sa taille par derrière.

— Oh mais fallait le dire ma chérie, répondit Mathilde en venant l’embrasser sur la joue. Ça va mieux maintenant ?

Elysia laissa retomber son visage entre ses mains, dépitée.

— Kat ? gémit-elle.

Du mouvement lui parvint et les bras de Mathilde la quittèrent aussitôt, le matelas bougeant légèrement sous elle.

— Je vous laisse, dit Mathilde en sautant du lit, je n’ai pas envie que vous me coupiez l’appétit !

Elysia rit aussitôt avant d’être interrompue par des lèvres se posant sur les siennes pour un langoureux baiser.

— Hmm, ronronna-t-elle contre la bouche de Kat. Ah là, c’est mieux.

— Je suis entièrement d’accord, sourit Kat avant de lui voler un autre baiser. Désolée pour Mathilde, elle est... toujours comme ça.

Elysia lâcha un rire.

— T’en fais pas, la rassura-t-elle. Elle n’est pas méchante, elle est même plutôt amusante. Et puis, ça fait plaisir de vous voir réunies.

Kat acquiesça tout en prenant place à ses côtés.

— Je ne sais pas si c’est parce qu’elle est ma sœur, mais elle est la seule dont la présence ne m’a jamais posé problème, surtout après ce qu’il m’est arrivé, tu sais... à l’armée. Avec Lyna et Tawny, j’étais... mal à l’aise, embarrassée. Mais avec Mathilde, ça a toujours été différent.

— Hmm, il paraît que les jumeaux ont un lien particulier, dit Elysia, ses doigts glissant dans le cou de Kat d’un air absent, souriant légèrement face à l’incroyable douceur de sa peau. Ça vient peut-être de là.

Kat haussa les épaules.

— Peut-être, admit-elle avant de s’emparer de la main d’Elysia et de l’embrasser doucement.

Elysia soupira d’aise puis fronça les sourcils lorsqu’une question qu’elle voulait poser à Kat lui revint soudainement à l’esprit.

— Tu sais ce qui l’a fait revenir en ville ?

Kat prit une profonde inspiration qu’elle relâcha doucement.

— Elle vient de mettre fin à une relation de plus de sept ans, répondit-elle. La flamme s’est éteinte, elle s’ennuyait.

— Oh. Et... elle va bien ?

Kat lui sourit doucement.

— Sept ans, c’est long, les sentiments se sont taris, mais au fond, Aaron comptera toujours énormément pour elle. Elle a su dire stop avant qu’il ne soit trop tard, mais ce n’est pas évident pour autant. Je pense que c’est pour ça qu’elle a tenu à revenir ici, dans notre ville natale.

— Hmm, elle a envie de retomber sur ses pieds avant d’être prête pour un nouveau départ.

— Quelque-chose comme ça, oui, sourit Kat avant de froncer les sourcils. Ils avaient également des différences d’opinions, Mathilde pense que cela aurait de toute façon fini par les séparés.

Elysia lui offrit un regard confus.

— Comme ?

— Ma sœur ne veut pas d’enfants.

Un rire s’échappa des lèvres d’Elysia malgré elle.

— Comment peut-on ne pas vouloir d’enfants ? dit-elle en secouant légèrement la tête.

Kat se leva aussitôt du lit pour retourner vers l’armoire et au vu de la tension qui habitait ses épaules, Elysia réalisa avec surprise qu’elle était sérieuse. Elle se mordit la lèvre tout en la suivant du regard, regrettant soudainement la réaction qu’elle avait eue.

Bravo Elysia, tu penses pouvoir faire encore plus insensible ?

Ses doigts vinrent tripoter le couvre lit et elle s’apprêtait à reprendre la parole lorsque la voix de Kat lui parvint enfin.

— Peut-être parce qu’elle n’en ressent simplement pas l’envie, lui dit-elle simplement.

Tu n’en ressens pas l’envie ? demanda aussitôt Elysia.

Kat connaissait peut-être sa sœur mieux que quiconque, sa réaction la poussait cependant à penser que Mathilde n’était peut-être plus le sujet central de leur conversation.

Kat se retourna subitement et observa Elysia comme si elle avait perdu la tête.

— Bien sûr que non ! s’exclama-t-elle, incrédule. Tu as perdu l’esprit ou quoi ?

Elysia cligna des yeux, surprise. Elle ne sut si c’était ce que Kat venait de lui dire, ou le ton — dur — qu’elle venait d’employer, mais elle sentit son ventre se serrer soudainement tandis que la colère montait à son tour en elle. De quel droit lui parlait-elle de la sorte ? Comment pouvait-elle sous-entendre une chose pareille ? Elle avait l’impression d’avoir dormi pendant des semaines et de se réveiller soudainement et ne plus rien comprendre.

— Aux dernières nouvelles, ma tête allait très bien, répondit-elle sarcastiquement en se levant à son tour. Par contre, la tienne, je n’en suis pas sûre. Ce n’est pas moi qui ne veux pas d’enfants, hein !

En réponse, Kat s’approcha d’elle, les traits durs et la respiration saccadée. Un de ses doigts vint se placer contre la poitrine d’Elysia et elle tapa frénétiquement au fur et à mesure qu’elle lui répondait :

— Surement parce que tu n’as pas été violée, et tu n’as pas eu à avorter !

Sa voix était montée crescendo pour finalement hurler le dernier mot et Elysia sentit le sang quitter son visage. Sa colère s’évapora et elle se retrouva là, à la fixer bêtement, alors que le silence les entourait à nouveau, pesant, assourdissant, que seules leurs respirations saccadées brisaient.

Un léger raclement les poussa à tourner la tête, et elles virent Mathilde les observer depuis le chambranle de la porte, hésitante.

— Hum, tout va bien ?

Kat laissa retomber sa main tout en soupirant, et elle se recula, évitant le regard d’Elysia.

— Parfaitement, répondit-elle d’une voix à peine plus haute qu’un murmure. J’ai besoin d’aller faire un tour, m’attendez pas pour déjeuner, ajouta-t-elle en quittant la pièce.

Son ton empli de douleur accabla aussitôt Elysia et elle serra ses bras contre son ventre, comme pour calmer la peine qu’elle ressentait.

Mathilde suivit Kat s’éloigner du regard avant de reporter son attention sur Elysia.

— Qu’est-ce qui s’est passé ? demanda-t-elle d’un ton concerné.

Elysia prit place sur le lit et s’empara d’un oreiller qu’elle serra contre elle.

— J’ai merdé, répondit-elle simplement, les yeux embués.

La dernière chose que son esprit enregistra fut un bras enserrant sa taille et une main guidant sa tête contre une épaule accueillante.

4 août 2015

Chapitre 13

Bonjour, vous êtes bien sur le répondeur de Lyna Rivera, je ne peux pas vous répondre pour le moment, mais laissez un message après le bip sonore et je vous rappellerai dès que possible. BIP.

Elysia ne prit même pas la peine de répondre et raccrocha dans un soupir.

— Tu sais, ils font les malins ceux qui te vendent des téléphones là, mais si la personne que tu cherches à joindre ne décroche pas, ça sert rien, dit-elle en jetant son portable sur le tableau de bord.

— Elle est peut-être occupée ? proposa Mysa depuis sa place côté passager, les yeux rivés sur l’imposant bâtiment devant lequel ils étaient garés, celui du cabinet d’avocat Roberts & McDaniel

— Ou elle ne veut tout simplement pas me répondre, soupira Elysia en se passant une main sur le visage.

Une fois remises de sa visite surprise la veille, Kat lui avait dit ne pas comprendre pourquoi Lyna avait réagi ainsi. Leur amitié remontait à l’enfance, Lyna avait été la première à découvrir son homosexualité, et avait connu chacune de ses petites amies, alors pour Kat, le problème ne pouvait pas se trouver là. Pour Elysia, l’une des explications possibles était que Lyna se soit simplement sentie laissée de côté ces derniers mois.

Après tout, depuis le retour d’Elysia sur Terre, combien de temps Lyna et Kat avaient-elles vraiment passé ensemble ? Elysia n’était même pas sûre qu’elles se retrouvaient encore pour déjeuner. 

— On va avoir besoin d’un plan, Mysa. Lyna, je peux gérer. Elyana... Elle est beaucoup trop forte. Je veux dire, regarde, elle t’a manipulé en un tour de main hier soir.

Mysa se passa une main sur la nuque.

— Si tu pouvais éviter de me le rappeler, ça m’arrangerait, grimaça-t-il.

Elysia l’observa avec sympathie.

— Désolée. Je commence juste à me dire que j’ai sérieusement sous-estimé la chose. Je ne pensais pas que ce serait mission impossible quand j’ai fait ma requête auprès du Conseil.

— Ce n’est pas impossible, la contredit Mysa, les sourcils froncés de concentration. On va simplement devoir jouer aux plus malins.

Il prit une inspiration et tourna la tête vers Elysia, une légère lueur dans le regard.

— En attendant, une partie de ta mission remporte au moins un grand succès. Kat est loin d’être malheureuse.

Elysia se sentit rougir.

— Je n’ai pas vraiment été subtile, hein ? grimaça-t-elle en se mordant la lèvre inférieure.

Mysa lâcha un rire.

— Elysia, je pense que tu n’as dupé personne quand tu as demandé à retourner sur Terre. Une Daï-Natha se soucie toujours de son ou sa protégé(e)... Tu n’as rien fait de plus que ce que tu faisais là-haut. La différence, c’est qu’ici, tu avais une bien plus large marge de manœuvre.

Elysia acquiesça, les yeux baissés vers ses mains qui reposaient sur le volant.

— Et le Conseil, qu’est-ce qu’il a à dire dans tout ça ? demanda-t-elle.

Mysa haussa les épaules.

— Le Conseil veut voir Elyana disparaître. Ce que tu fais en parallèle — tant que tu ne révèles pas notre existence — est le cadet de ses soucis. Et puis, personnellement...

Il prit sa main dans la sienne.

— ...je pense que tu as bien fait. Kat a connu tellement d’horreurs... elle mérite ce que tu lui apportes aujourd’hui.

Pour toute réponse, Elysia se pencha par-dessus le levier de vitesse et l’embrassa sur la joue.

💕

Elysia poussa la lourde porte en verre, pénétrant dans un hall immense peuplé d’hommes en costard cravate et de femmes en tailleur, et s’approcha de l’imposant comptoir en bois sombre de la réception.

— Bonjour, j’ai rendez-vous avec Mme Rivera, sourit Elysia lorsqu’une jeune femme au chignon strict et aux lunettes carrées leva les yeux vers elle.

— Bien sûr. À quelle heure ?

— 13h30.

— Votre nom ?

— Lashera, Elysia Sonja. Mais j’ai pris rendez-vous sous mon deuxième prénom.

La jeune femme laissa courir ses doigts sur le clavier d’ordinateur quelques instants, les sourcils légèrement froncés de concentration avant de reporter son attention sur Elysia.

— Douzième étage, deuxième porte sur la gauche. Attendez dans le couloir, Mme Rivera viendra vous chercher.

Elysia la remercia puis se dirigea vers les batteries d’ascenseurs, entrant dans la cabine accompagnée de deux hommes et d’une femme qui la saluèrent poliment d’un léger signe de la tête. Ils sortirent au septième étage et Elysia continua jusqu’au douzième, avant de venir s’installer sur l’une des chaises longeant le couloir, comme l’hôtesse d’accueil le lui avait indiqué.

Quelques minutes plus tard, une porte s’ouvrit et Elysia vit Lyna en sortir, ses talons accentuant sa grande taille et la finesse de son corps. Et avec son tailleur noir, Elysia devait reconnaître qu’elle en imposait.

Le regard de Lyna parcourut le couloir avant de s’arrêter sur Elysia et cette dernière se redressa, lissant sa jupe, quand elle la vit se figer.

— Hé, salua-t-elle.

Lyna cligna des yeux à plusieurs reprises, regardant autour d’elle comme si elle s’attendait à ce que quelqu’un apparaisse soudainement et lui dise que c’était une plaisanterie.

Quand rien n’arriva, elle reporta son attention sur Elysia.

— Qu’est-ce que... hum, qu’est-ce que tu fais ici ? demanda-t-elle finalement.

Elysia s’approcha légèrement.

— J’ai rendez-vous. Avec toi.

Lyna afficha un air surpris.

— Je pense qu’il y a erreur, lui répondit-elle en abaissant son regard sur l’agenda qu’elle tenait entre ses mains. J’ai rendez-vous avec une certaine... Sonja Lasheras.

Elysia sourit.

— C’est moi, Elysia Sonja Lasheras. 

Lyna l’observa, imperturbable.

— Tu as pris rendez-vous avec moi.

— C’est ça.

— En utilisant ton deuxième prénom.

Elysia grimaça.

— J’ai donné mon nom complet, mais il est possible que j’aie demandé à ce que seul mon second prénom soit utilisé...

Lyna prit appui contre le chambranle de la porte, les bras croisés sur sa poitrine et Elysia reconnut là ce qui faisait de Lyna la grande avocate qu’elle était. Celle qui pouvait vous pousser à révéler vos plus sombres secrets sans faire le moindre effort, et ce juste en un léger plissement des yeux.

— Et tu as fait ça parce que... ?

— Je pensais que tu refuserais peut-être de me voir si tu savais qu’il s’agissait de moi, expliqua Elysia avant de jeter un œil par-dessus son épaule. Écoute... j’ai un rendez-vous, on pourrait en discuter à l’intérieur ?

Lyna haussa un sourcil avant de regarder autour d’elles à son tour puis de hocher la tête. Elle s’écarta légèrement afin de laisser entrer Elysia, puis referma la porte derrière elles.

Elle attendit d’être installée derrière son bureau avant de demander :

— Je t’écoute. Qu’est-ce qui me vaut une telle visite ? Pas de problèmes avec la justice, j’espère ?

— Non, répondit Elysia tout en prenant place dans l’un des sièges réservés aux visiteurs. En fait, ça n’a rien à voir avec ton travail.

Lyna croisa les mains devant elle, sur son bureau. Elle sourit légèrement malgré elle.

— Oui, ça, je l’avais plus ou moins deviné. De quoi s’agit-il alors ?

— J’organise une soirée entre fille ce vendredi. Et, comme tu es la meilleure amie de Kat, ta présence est non seulement désirée, mais elle est surtout indispensable.

Lyna prit appui contre le dossier de sa chaise. Elle hocha pensivement la tête.

— J’ai l’impression de ne pas avoir beaucoup de choix. Sans compter que c’est dans trois jours, je pourrais déjà avoir d’autres projets de prévus.

— C’est vrai, acquiesça Elysia. Mais à moins que ce ne soit quelque chose de professionnel... ta meilleure amie pourrait passer en premier... non ?

— Ma meilleure amie, répliqua Lyna dans un rire dénué d’humour. Hmm. Et c’est en quel honneur, cette soirée ?

Elysia se passa une main sur la nuque, avant de soupirer.

— O.K. Je ne vais pas tourner autour du pot, dit-elle tout en croisant le regard de Lyna. Hier, tu as débarqué à l’improviste chez Kat pour finalement repartir tout aussi rapidement, et ce, en larmes. Je ne sais pas ce qui se passe, mais je pense... je pense qu’une soirée entre vieilles copines pourrait vous être bénéfiques, tu ne crois pas ?

Elle vit Lyna se mordre l’intérieur de la joue puis soupira intérieurement quand elle hocha finalement la tête.

— Très bien, je vais y réfléchir.

Elysia grimaça. Le soulagement qu’elle venait d’éprouver s’évapora tout aussi rapidement qu’il était apparu.

— Lyna...

Cette dernière leva une main.

— Tu l’as dit toi-même, Elysia, tu ne sais pas ce qui se passe. Je veux bien faire des efforts, mais quand ça ne vient toujours que d’un côté...

— Kat veut que tu viennes, assura Elysia, perturbée par l’air las qui avait élu domicile sur le visage de Lyna. Je t’assure. Ça ne sera pas la même chose sans toi.

Lyna l’observa un instant puis se redressa afin d’aller ouvrir la porte.

— Je te l’ai dit, je verrais.

Elysia se leva à son tour, ignorant tant bien que mal la déception qui s’abattait sur elle. Elle hocha la tête.

— Promets-moi au moins une chose alors, dit-elle une fois arrivée à hauteur de Lyna. Passe au moins en coup vent, si tu décides de ne pas venir. Juste un petit coucou, rien de plus, ajouta-t-elle rapidement quand Lyna ouvrit la bouche.

Cette dernière secoua la tête.

— Tu ne lâcheras vraiment pas le morceau, hein ? fit-elle remarquer, à moitié pour elle-même. Très bien, je passerai.

Si tu choisis de ne pas venir, insista Elysia. Car j’espère quand même que tu le feras.

Pour toute réponse, Lyna lui tendit sa main et Elysia la serra à regret. Elle aurait voulu repartir avec un « oui », pas un « peut-être ».

Elle sortit dans le couloir avant de préciser.

— La soirée commence à 19h. Peu importe ce que tu décides, sache que je t’attendrai. Et Kat aussi.

Lyna hocha la tête, et elle regagna les ascenseurs, ignorant le sentiment désagréable qui lui disait qu’elle aurait pu faire plus.

💕

Quand Elysia regagna l’appartement de Kat ce soir-là, elle fut surprise de voir un post-it collé contre la porte, avant de soupirer quand elle vit qu’il était de Kat. Cette dernière avait apparemment reçue une pièce importante pour sa Chevrolet et s’était donc rendue au garage afin de l’installer. Elle qui avait passé la journée à attendre le moment où elle pourrait enfin se glisser dans ses bras et oublier la catastrophe qu’avait été son rendez-vous avec Lyna, c’était loupé.

Utilisant son double de clé que Kat lui avait remis après leur première nuit ensemble, elle pénétra dans l’appartement et laissa la porte se refermer derrière elle, retirant ses talons et sa veste de tailleur.

Ne sachant pas à quelle heure Kat en aurait fini, elle décida de commander Chinois et de se couler un bon bain chaud. Quitte à être seule et à avoir du temps libre, autant en profiter. Elle trouverait peut-être une solution pour faire venir Lyna à leur soirée, ou pour les réunir elle et Kat afin qu’elles puissent enfin discuter de ce qui visiblement n’allait pas.

Elle s’éloignait tout juste de l’entrée lorsque la sonnerie de l’appartement retentit et elle fronça les sourcils avant d’ouvrir la porte, surprise lorsque Kat lui apparut aussitôt

— Ben alors, on sonne pour rentrer chez soi maintenant ? la taquina-t-elle tout en tirant sur son t-shirt pour venir l’embrasser.

A peine ses lèvres se furent-elles poser sur les siennes qu’elle sentit Kat se figer aussitôt, la laissant perplexe. Les secondes s’écoulèrent, et quand la réaction de Kat ne changea pas, et qu’elle essaya au contraire de la repousser, Elysia rompit le baiser, confuse.

— Tu vas finir par me vexer à ne pas m’embrasser en retour, comme ça, reprit-elle d’un ton taquin mais néanmoins inquiet.

Un léger raclement de gorge la fit tourner la tête et elle sentit aussitôt le sang quitter son visage quand elle vit Kat par-dessus l’épaule de... Ses sourcils grimpèrent sur son front et sa mâchoire se détacha littéralement.

— Oh merde, je vois double.

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